Le Conseil de presse retient des plaintes pour propos haineux, racisme et inexactitudes

Le tribunal d’honneur du Conseil de presse du Québec (CPQ) a rendu et publié huit (8) nouvelles décisions reliées à des plaintes qu’on lui avait soumises. Cinq d’entre elles ont été retenues, et quatre sont ici résumées. 

Carte interactive des « pédophiles » : le JdM déforme la réalité (D2012-11-049)

Suite à une plainte déposée par la présidente de l’Association des avocats et avocates de la défense, Mme Joëlle Roy, le comité des plaintes du Conseil de presse s’est penché sur la publication, sur le site web du Journal de Montréal, ainsi que sur le site d’information Canoë, d’une carte interactive qui permettrait aux lecteurs, selon la plaignante, de localiser le lieu de résidence de personnes décrites comme des « agresseurs sexuels » ou encore des « pédophiles ». 

La plaignante dénonçait, à juste titre selon les membres du comité, que cette information était inexacte, puisque le Journal de Montréal avait en fait comptabilisé les personnes qui n’était encore qu’accusées, sans avoir vérifié si elles avaient effectivement été reconnues coupables. Le journaliste admettait également, dans l’article, qu’il n’avait pu vérifier si ces personnes n’avaient pas, depuis le moment du dépôt des accusations, changé d’adresse. Dans sa décision, le comité note que « ces inexactitudes déforment la réalité, exagèrent l’étendue du phénomène des agressions sexuelles et insécurisent inutilement des citoyens qui résident aux alentours des points de localisation identifiés. »

Le comité des plaintes a par ailleurs rejeté le second grief de la plaignante, selon laquelle la publication de cette carte aurait porté atteinte au principe de la présomption d’innocence ainsi qu’à la vie privée des accusés, estimant que la carte n’offrait pas tout à fait le niveau de précision nécessaire à une identification claire des résidences identifiées sur celle-ci, bien qu’elle s’en soit dangereusement rapprochée.

Le Conseil a profité de cette occasion pour rappeler « [qu’]il n’est pas légitime de publier les adresses de personnes accusées de crime, sans avoir été trouvées coupables par un tribunal. La publication de cette information relève davantage de la curiosité du public que de l’intérêt public, sans compter que son dévoilement peut porter préjudice à la sécurité de l’accusé et de ses proches. » 

Le Conseil réprimande une fois de plus CHOI Radio X pour propos haineux (D2012-09-033)

Une fois de plus, le comité des plaintes s’est penché sur une plainte visant la station de radio CHOI Radio X pour propos haineux. La plaignante, Marie-Ève Duchesne, porte-parole du Front commun des personnes assistées sociales du Québec, reprochait aux animateurs Jérôme Landry et Denis Gravel de s’être livré à des propos haineux et empreints de préjugés lors d’une discussion portant sur les prestataires d’aide sociale.

Le comité des plaintes a donné entièrement raison à la plaignante, jugeant qu’en soutenant que « probablement que la personne que tu vas couper son chèque de BS, après 5 ans, ou que tu vas l’empêcher de s’acheter de la loterie pis de la boisson, au début il ne sera pas content », comme l’un des animateurs l’a fait, ils entretenaient des préjugés qui tendent à soulever la haine envers un groupe, les assistés sociaux.

Une information inexacte – à savoir que l’ex-ministre Sam Hamad avait été écarté du conseil des ministres pour avoir oser critique le programme d’aide social québécois – a également été relevée par la plaignante, à qui le comité des plaintes a donné raison sur ce point aussi.

Finalement, pour son manque de collaboration dans l’étude de cette plainte, le Conseil a blâmé la station CHOI Radio X. 

Fabi : donner libre cours à des propos antisémites était inacceptable (D2012-11-059)

En laissant une auditrice proférer des propos antisémites, le Conseil estime que Jacques Fabi, animateur de l’émission nocturne « Fabi la nuit », a manqué au devoir qui lui incombait, non seulement en s’abstenant de dénoncer sur-le-champ ces propos, mais en renchérissant sur ceux-ci.

Le comité des plaintes a donc entièrement donné raison aux deux plaignants, Alexandre Meterissian et Philip Hershman, qui reprochaient à Jacques Fabi d’avoir toléré que des propos haineux aient été tenus en ondes, sans qu’il n’intervienne pour couper court à la conversation.

Bien que l’animateur, de même que la station qui l’emploie, aient tous deux déjà émis des excuses publiques, le Conseil a estimé que la gravité de la faute justifiait que la plainte soit retenue.

Présomption d’innocence : la mince ligne à ne pas franchir (D2012-12-064)

Dans cette affaire, le plaignant reprochait à l’animateur Denis Lévesque, de même qu’à ses invités, d’avoir porté atteinte au droit à la présomption d’innocence de la mère de trois enfants assassinés le 2 décembre 2012. Estimant qu’il était trop tôt pour commenter cette affaire de meurtres, puisqu’aucune accusation n’avait encore été portée, le plaignant jugeait que les commentaires émis par le journaliste laissaient entendre que la mère était effectivement l’auteure des crimes. 

Le comité des plaintes a cependant jugé que l’animateur avait respecté le droit à la présomption d’innocence de la mère des enfants, notamment en utilisant le plus souvent le conditionnel, et en rappelant à plusieurs reprises qu’aucune accusation n’avait encore été portée contre elle.

La plainte a donc été rejetée. 

Deux autres plaintes retenues

Une plainte (D2012-11-050B) visant André Bellemare, collaborateur au journal Le Soleil, portant sur l’omission d’une mention à l’effet que le voyage de chasse de celui-ci avait été payé par un commanditaire, en l’occurrence la SÉPAQ, a été retenu. Le grief pour avoir accepté ce voyage a cependant été rejeté.

Une autre plainte (D2012-11-060), visant cette fois le site d’information Le Quotidien des Lacs, reprochait au site d’avoir plagié le contenu d’un autre site d’information, le ThetfordActu.com. Constatant des similitudes frappantes entre les textes publiés par les deux sites, le Conseil a donné raison au plaignant.

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Le texte intégral des décisions ainsi qu’un résumé des arguments des parties en cause peuvent être consultés à l’adresse conseildepresse.qc.ca, dans la section « Décisions ».

Ces décisions sont toutes susceptibles d’être portées en appel dans les 30 jours de leur réception par les parties.