Mémoire du Conseil de presse du Québec portant sur le projet Inforadio de la Société Radio-Canada

Le Conseil de presse du Québec

Fondé en 1973, le Conseil de presse du Québec est un organisme privé, à but non lucratif, dont la raison d’être est de protéger la liberté de presse et de défendre le droit du public à une information exacte, complète et de qualité. Il doit sa création à l’initiative conjointe de journalistes et de dirigeants d’entreprise de presse, auxquels ont été associés dès le départ des représentants du public. Le Conseil de presse est donc né des besoins convergents et des inquiétudes communes de ces trois partenaires, indissociables depuis sa fondation.

Le Conseil de presse a pour mandat de promouvoir le respect des plus hautes normes éthiques en matière de droits et de responsabilité de la presse. Son action s’étend à tous les médias d’information distribués ou diffusés au Québec, qu’ils appartiennent à la presse écrite ou électronique.

L’objectif fondamental du Conseil reste donc d’assurer le droit à une information libre, honnête, véridique et complète, sous toutes ses formes. Il a aussi comme principale fonction la protection de la liberté de presse, c’est-à-dire le droit pour celle-ci d’informer et de commenter, sans être menacée ou entravée dans l’exercice de ses fonctions par quelque pouvoir que ce soit.

Le Conseil de presse ne possède aucun pouvoir judiciaire, réglementaire, législatif ou coercitif : il n’impose aucune autre sanction que morale. Mais la rigueur de ses interventions, ainsi que la confiance et l’appui que lui manifestent les médias et le public, lui confèrent une autorité indéniable.

Concrètement, à titre de tribunal d’honneur de la presse québécoise, le Conseil a traité quelques 1 500 plaintes de citoyens et citoyennes des quatre coins du Québec. Il a également publié près d’une centaine d’avis publics sur des questions d’éthique liées à la pratique du journalisme au Québec.

Son rôle d’ombudsman de la presse comporte aussi un effort d’éducation, tant auprès du public qu’auprès de la communauté journalistique toute entière. Lieu de réflexion et de débat permanent sur la déontologie journalistique, le Conseil cherche à développer, chez le public, le goût d’une information complète, rigoureuse et authentique, inspirée par un souci constant d’intégrité professionnelle, et à rendre les citoyens de plus en plus conscients du rôle essentiel de la presse dans une société démocratique.

Il vise également à favoriser l’exercice d’une presse responsable et soucieuse du respect de son public. Par diverses interventions publiques, le Conseil de presse est ainsi amené à contribuer au développement du respect des normes qu’il préconise. Son action s’exerce alors auprès des professionnels de l’information par le biais de blâmes, de décisions, de recommandations, d’encouragements, de propositions…

Dans un document intitulé Les droits et des responsabilités de la presse, le Conseil propose, depuis plus de 20 ans, à tous les médias québécois de même qu’aux professionnels de l’information, une série de principes déontologiques toujours d’actualité.

Notre appui au projet Inforadio

Quel a été le contexte de la dernière décennie dans le domaine de la presse radiophonique au Québec, sinon un contexte de rapetissement de l’espace médiatique consacré à l’information et de réduction des ressources journalistiques ?

La Société Radio-Canada n’a pas été épargnée par ce contexte de réduction des ressources, sortant à peine de quelques 10 années de décroissance. Dans cette période trouble, des centres de production de la SRC ont été fermés au Québec, comme à travers le Canada, entraînant d’importantes pertes d’effectifs.

Dans les médias privés, au cours de la même période, les ressources financières et humaines vouées à l’information se sont également appauvries.

Paradoxalement, au cours de cette période, le volet « divertissement » a nettement pris le dessus en programmation sur la mission information des médias… devenue parent pauvre.

Si le vent a tourné, si la conjoncture s’améliore depuis quelques temps dans le domaine de la presse électronique, cela ne s’est essentiellement produit que du côté de la télévision, grâce à la mise en service de chaînes de nouvelles continues.

La production radiophonique n’a pas, quant à elle, bénéficié de ce vent favorable. La radio a perdu, depuis 20 ans, une partie importante de son auditoire, au profit de la télévision. Alors que la radio voit ses bénéfices s’amenuiser au fil des ans, son intérêt et sa qualité fléchissent.

Ses auditoires déclinent parce qu’elle ne répond plus aux besoins nouveaux du public. Il faut donc aujourd’hui en favoriser le renouvellement, l’adapter aux conditions nouvelles, c’est-à-dire en faire un instrument d’information et d’analyse qui puisse éclairer, intéresser, voire stimuler les auditeurs. Telle est l’une des voies que nous sommes heureux de voir emprunter à la faveur du projet d’INFORADIO.

C’est en tenant compte de tout ce contexte qu’intervient aujourd’hui l’appui du Conseil de presse du Québec au projet de Radio-Canada. Plusieurs facteurs militent, aux yeux du Conseil, en sa faveur :

1.    La réputation de Radio-Canada dans le secteur de l’information n’est plus à faire. S’Inspirant d’une solide politique journalistique interne, la SRC cherche constamment – il faut le reconnaître – à produire des émissions d’information de qualité qui présentent à l’antenne une vision pluraliste de la société ; des émissions qui invitent aussi à la réflexion. Aussi pouvons-nous affirmer que Radio-Canada s’acquitte généralement, de façon honorable, de son mandat de réseau national d’information. Mais ce radiodiffuseur pourrait évidemment faire mieux et plus… et cela, en tant que réseau public national d’information.

2.    Le projet de création d’une chaîne de nouvelles continues à la radio de la SRC tombe donc à point nommé. La mise en service d’INFORADIO favoriserait à la fois l’enrichissement du contenu de sa programmation en information et de ses effectifs journalistiques, comme l’indique et s’y engage d’ailleurs Radio-Canada.

3.    Une autre retombée positive d’INFORADIO serait de permettre une meilleure utilisation et une mise en valeur du réseau de journalistes déjà en place dans les stations régionales de Radio-Canada au Québec, comme à travers tout le Canada.

4.    Le dernier élément, mais non le moindre, plaidant en faveur du projet : l’ajout d’une source d’information radiophonique continue, et crédible, à la disposition et à l’image de la société québécoise et canadienne.

Conclusion

De l’avis du Conseil de presse, il est bien difficile de s’opposer à un projet aussi réfléchit et bien structuré que celui d’INFORADIO dont la concrétisation aura des effets bénéfiques dans les milieux québécois et canadiens de la presse, tout autant que pour le grand public consommateur d’information à l’échelle nationale.

Le droit du public à l’information, à l’aube de l’an 2000, fait désormais partie de la liste des droits universels de la personne. Nul doute que le futur réseau de nouvelles continues de la radio de Radio-Canada contribuera à assurer la pérennité de ce droit auprès de la population québécoise et canadienne.

Enfin, si le CRTC agrée la demande de Radio-Canada, le Conseil de presse du Québec verrait d’un bon œil que le réseau INFORADIO songe à enrichir éventuellement sa programmation de quelques segments d’affaires publiques, de manière à favoriser, sur ses ondes, la réflexion sur l’actualité humaine et l’évolution de la connaissance et de la pensée.