Plaignant
M. Roger-Luc Chayer
Mis en cause
M. Stéphane Gendron, l’émission « Le Retour », la station CHOI 91,9 Radio X et M. Raynald Brière, président et chef de direction RNC Media
Résumé de la plainte
M. Roger-Luc Chayer dépose une plainte le 11 juillet 2013 contre M. Stéphane Gendron, animateur de radio, concernant des propos tenus durant l’émission « Le Retour », diffusée sur les ondes de CHOI 91,9 Radio X le 29 mai 2013, alors qu’il discutait des nouvelles règles de sécurité du réseau social Facebook. Le plaignant dénonce des inexactitudes dans les propos de l’animateur, une atteinte à sa vie privée, un conflit d’intérêts de l’animateur et le refus d’accorder un droit de réplique.
La station CHOI Radio X n’a fait parvenir aucune réplique en réponse à la plainte.
Analyse
Grief 1 : informations inexactes
Selon M. Roger-Luc Chayer, l’animateur commet plusieurs inexactitudes durant son intervention en ondes au sujet d’une plainte qu’il a lui-même déposée auprès du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) concernant des propos haineux publiés sur la page Facebook personnelle de M. Gendron. Il estime d’abord que ce dernier le présente faussement comme un militant homosexuel, ce qu’il sait être faux, étant donné que M. Gendron l’a représenté à titre d’avocat dans une cause visant justement à démontrer que M. Chayer était un journaliste et non un militant homosexuel.
Après écoute de l’émission, le Conseil a constaté que, contrairement à ce qu’affirme le plaignant, M. Gendron aurait plutôt associé M. Chayer à un activiste : « y’a un activiste de la communauté gaie à Montréal, c’est pas compliqué c’est Roger-Luc Chayer, qui est impliqué dans le Village avec les médias ». D’après l’édition 2010 du Larousse, un activiste est une personne qui préconise l’action directe. Selon les recherches du Conseil, M. Chayer est depuis plusieurs années un citoyen engagé à la défense de la cause des homosexuels. En 2001, M. Chayer a fondé le Conseil de presse gai du Québec et en a été l’un des dirigeants. Il est également à la tête de Gai Globe Média qui comprend notamment un magazine et une webtélé engagés en faveur de la communauté gaie. Ainsi, en juillet 2012, dans un communiqué émis par Gai Globe Média, le plaignant dénonce les propos homophobes publiés sur la page Facebook de M. Gendron, il critique l’inaction de M. Gendron devant ses demandes de retrait et dépose une plainte aux autorités policières. Au vu de ce qui précède, le Conseil juge que M. Chayer présente les caractères d’une personne engagée, militante ou activiste. En le qualifiant ainsi, le mis en cause n’a pas commis d’inexactitude sur ce premier point.
La deuxième présumée inexactitude dénoncée par le plaignant concerne le nombre de messages homophobes qui ont été placés sur la page Facebook de l’animateur. Le plaignant soutient que M. Gendron laisse croire qu’il n’y avait qu’un message haineux. Il note que ce sont plutôt des dizaines d’affirmations homophobes qui y ont été publiées. Une saisie d’écran fourni par le plaignant montre que l’internaute est intervenu plus d’une vingtaine de fois.
À l’écoute de l’émission, le Conseil constate que M. Gendron mentionne l’existence de plusieurs messages. « Y’a un débile de l’Europe qui s’est mis à mettre des posts homophobes, haineux », commence d’abord par affirmer l’animateur. Par la suite, l’animateur introduit une ambiguïté en parlant d’un message, auquel il réfère comme « le post ». Dans le cas présent, le Conseil juge que cette imprécision de M. Gendron n’a pas induit les auditeurs en erreur sur l’essentiel de l’histoire, à savoir que des propos homophobes avaient été publiés sur sa page Facebook. Le Conseil ne voit pas de faute d’inexactitude relativement à ce deuxième aspect du grief.
La dernière critique d’inexactitude concerne le retrait des messages homophobes en question. L’animateur raconte avoir accepté de retirer les commentaires litigieux lorsque la police lui a demandé. Or, le plaignant affirme pour sa part que l’animateur aurait dû préciser qu’avant de recevoir la requête de la police, il avait été auparavant interpelé par le plaignant lui-même, qui l’avait exhorté de retirer sur-le-champ les commentaires homophobes.
Dans son émission, M. Gendron admet qu’il a retiré les commentaires lorsque la police lui a demandé de le faire sans quoi il risquait d’en être complice. Bien qu’il ait omis de rapporter toutes les interventions du plaignant dans ce dossier, le Conseil estime que la version des faits de M. Gendron ne comportait aucune faute d’inexactitude. Le grief est également rejeté sur ce troisième élément.
Le grief pour informations inexactes est rejeté.
Grief 2 : atteinte à la vie privée
Le plaignant juge que M. Gendron a enfreint son droit à la vie privée en faisant référence à son orientation sexuelle. Il estime que même s’il vit son homosexualité ouvertement, cet aspect de sa vie lui appartient, et considère en outre qu’il n’était pas pertinent d’établir un lien entre son orientation sexuelle et le fait qu’il se soit plaint au SPVM, comme l’a fait M. Gendron.
Le Conseil, constatant que M. Chayer affiche publiquement, depuis plusieurs années, son homosexualité, considère que dans les circonstances, la référence à son orientation sexuelle ne constituait pas une atteinte à la vie privée du plaignant et qu’il n’était pas impertinent de préciser que la plainte contre la publication de propos homophobes provenait d’un membre de la communauté gaie.
Le grief sur l’atteinte à la vie privée est rejeté.
Grief 3 : conflits d’intérêts
Le plaignant estime que M. Gendron aurait dû mentionner aux auditeurs qu’il avait été son avocat en l’an 2000. Pour différentes raisons, notamment une insatisfaction au sujet de son travail, M. Gendron a été remercié. M. Chayer se demande si cela a pu créer des rancunes qui auraient influencé les propos de M. Gendron. Le plaignant juge que le public aurait dû être mis au courant de ces liens passés.
Le Conseil ne voit pas de quelle nature pourrait être le conflit d’intérêts de M. Gendron avec une personne qu’il a représentée il y a 13 ans. Le plaignant ne démontre pas où se situerait le conflit d’intérêts.
Le grief pour conflit d’intérêts est rejeté.
Grief 4 : refus de droit de réplique
Le plaignant estime qu’il aurait dû avoir un droit de réplique. Selon lui, cela lui aurait permis d’informer le public du conflit d’intérêts dans lequel se trouvait l’animateur et il aurait pu rectifier certains faits avancés par M. Gendron dans son récit. Il aurait également pu citer certains des propos homophobes de l’internaute.
Dans le cas présent, aucune inexactitude n’a été constatée et aucune faute déontologique n’a été reconnue. Le Conseil évalue que le média n’avait pas l’obligation d’accorder un droit de réplique.
Le grief pour refus de droit de réplique est rejeté.
Refus de collaborer
La station de radio CHOI 91,9 Radio X n’a pas souhaité répondre à la présente plainte
Le Conseil reproche à CHOI 91,9 Radio X son manque de collaboration pour avoir refusé de répondre, devant le Tribunal d’honneur, de la plainte les concernant.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de M. Roger-Luc Chayer contre M. Stéphane Gendron et la station CHOI 91,9 Radio X pour diffusion d’informations inexactes, atteinte à la vie privée, conflit d’intérêts et pour refus de droit de réplique.
Pour son manque de collaboration, en refusant de répondre à la présente plainte, le Conseil de presse blâme la station de radio CHOI 91,9 Radio X.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. Les entreprises de presse membre s’engagent pour leur part à respecter cette obligation, et à faire parvenir au secrétariat du Conseil une preuve de cette diffusion au maximum 30 jours suivant la date de la décision. » (Règlement No 3, article 8.2)
Analyse de la décision
- C02F Création/retrait de rubriques/d’émissions
- C11B Information inexacte
- C16D Publication d’informations privées
- C19A Absence/refus de rectification
- C22F Liens personnels
- C24A Manque de collaboration