Plaignant
Curateur public du Québec; Mme Michelle Duplessis, directrice territoriale Sud
Mis en cause
Mme Héloïse Archambault, journaliste; M. Dany Doucet, rédacteur en chef et Le quotidien Le Journal de Montréal
Résumé de la plainte
Mme Michelle Duplessis, directrice territoriale Sud pour le Curateur public du Québec dépose une plainte le 4 novembre 2013, contre la journaliste Héloïse Archambault et le Journal de Montréal, relativement à deux articles publiés le 6 octobre 2013. Les textes rapportent les démarches entreprises par un homme pour ramener sa mère chez lui, alors que le Curateur public l’a placée dans un CHSLD. Les mis en cause déplorent une atteinte au droit à la vie privée et au droit à la dignité de la dame.
Analyse
Grief 1 : atteinte au droit à la vie privée et au droit à la dignité
La plaignante fait valoir que les articles et les photos qui l’accompagnent ont été publiés sans le consentement du Curateur public et violent le droit à la vie et la dignité de la dame de 92 ans. Mme Duplessis souligne que le Curateur public a refusé d’accéder aux demandes répétées de la journaliste pour publier des photos de la dame, dont une montre son dos envahi par une dermatite et une autre exhibe une blessure à son poignet.
Mme Duplessis explique que la dame a été déclarée inapte et que le Curateur public du Québec agit à titre de curateur à la personne de la dame. Conséquemment, le Curateur public doit notamment « veiller au respect de la majeure [la dame] » et « au respect de ses droits et de sa dignité ». Il doit également « s’assurer du respect de sa vie privée ». Le Curateur public est responsable « de consentir à la divulgation de renseignements concernant les personnes qu’il représente ainsi qu’à l’utilisation de leur image ». Dans le cas présent, le Curateur public n’a pas consenti à ce que la dame accorde une entrevue à la journaliste et à ce que des photos d’elle soient publiées.
Mme Duplessis précise, lors d’un entretien avec le Conseil, qu’en raison de son inaptitude, la dame n’était pas habilitée à consentir à la publication des articles et des photos et que le Curateur public, à titre de curateur à la personne, répondait aux demandes de la journaliste en son nom.
Dans son guide de déontologie, Droits et responsabilités de la presse (DERP), le Conseil de presse note que : « Toute personne, qu’elle soit de notoriété publique ou non, a le droit fondamental à la vie privée, à l’intimité, à la dignité et au respect de la réputation. Le public, pour sa part, a le droit d’être informé sur ce qui est d’intérêt public et la presse a le devoir de l’en informer. Lorsque des faits, des événements et des situations mettent en cause la vie privée de personnes, la presse doit bien soupeser et mettre en équilibre son devoir d’informer et le respect des droits de la personne. » (DERP, p. 42)
Le Conseil estime que le sujet des articles de Mme Héloïse Archambault était d’intérêt public. Toutefois, en soupesant son devoir d’informer le public et le respect des droits de la dame, la journaliste devait tenir compte des refus d’accorder une entrevue et de publier les photos, exprimés par le Curateur public au nom de la dame. Ce qu’elle n’a pas fait. En l’occurrence, il aurait été possible de publier les articles sans les photos et en omettant de citer, même brièvement, la dame en question, qui « disait être « dans une prison » ». Ces mesures auraient permis de respecter le droit à la vie privée et le droit à la dignité de cette dernière, tout en respectant le droit du public d’être informé.
Le grief pour atteinte au droit à la vie privée et au droit à la dignité est retenu.
Refus de collaborer
Le Journal de Montréal n’a pas souhaité répondre à la présente plainte.
Le Conseil reproche au Journal de Montréal son manque de collaboration pour avoir refusé de répondre, devant le Tribunal d’honneur, de la plainte les concernant.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec retient la plainte de Mme Michelle Duplessis, directrice régionale Sud, Curateur public du Québec contre la journaliste Mme Héloïse Archambault et le Journal de Montréal pour le grief d’atteinte au droit à la vie privée et au droit à la dignité.
Pour son manque de collaboration, en refusant de répondre à la présente plainte, le Conseil de presse blâme Le Journal de Montréal.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. Les entreprises de presse membre s’engagent pour leur part à respecter cette obligation, et à faire parvenir au secrétariat du Conseil une preuve de cette diffusion au maximum 30 jours suivant la date de la décision. » (Règlement No 3, article 8.2)
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Mme Micheline Bélanger, présidente du comité des plaintes
M. Adélard Guillemette
Représentant des journalistes :
M. Denis Guénette
Représentants des entreprises de presse :
M. Éric Latour
M. Raymond Tardif
Analyse de la décision
- C16D Publication d’informations privées
- C24A Manque de collaboration