Plaignant
Mme Karolyne Arseneault
Mis en cause
M. Frédéric Khalkhal, rédacteur en chef
L’hebdomadaire Les Versants du Mont-Bruno
Résumé de la plainte
Mme Karolyne Arseneault dépose plainte le 4 juillet 2016 contre l’hebdomadaire Les Versants du Mont-Bruno pour avoir omis de distinguer clairement publicité et information dans une série de trois articles publiés en juin 2016.
Tous chapeautés du titre « Les faits pour discerner le Vrai du Faux », ces textes portent sur un projet résidentiel du groupe Propriétés Sommet Prestige, à Saint-Bruno-de-Montarville.
Analyse
Grief 1 : omission de distinguer publicité et information
Dans sa plainte, Mme Arseneault affirme que la distinction entre publicité et information n’est pas claire, ce qui peut semer la confusion chez les lecteurs.
Selon elle, le journal a usé de normes graphiques semblables aux autres textes d’information. Les nuances ne sont pas suffisamment marquées.
La plaignante reconnaît que le texte n’est pas signé par un journaliste et qu’au bas du texte se trouve la mention « Propriété Sommet Prestige inc. ». Elle juge toutefois que ces moyens ne permettent pas une « distinction évidente », dès le premier coup d’oeil.
Mme Arseneault soutient que la présentation amène le public à croire qu’il s’agit d’une série de trois reportages plutôt qu’une série publicitaire. Le mot « reportage » figure d’ailleurs clairement dans chacun de ces articles.
Quant au mis en cause, il affirme que plusieurs éléments permettent aux lecteurs de comprendre qu’il ne s’agit pas d’un texte journalistique, mais d’un contenu publicitaire. Il cite une police de caractères distincte, l’absence de signature par un journaliste de la rédaction et la mention « Propriété Sommet Prestige inc. » en fin de texte.
Le rédacteur en chef ajoute que, contrairement aux textes publicitaires, les textes d’information sont tous signés ou présentent à tout le moins les initiales de leur auteur à la fin de l’article. Lorsqu’il s’agit d’un publireportage, une mention à cet effet figure au début du texte.
Enfin, il assure que ces textes relèvent de l’équipe des ventes. Il précise qu’une signature graphique verte a été donnée à cette série. Le vert serait la couleur adoptée par le journal pour différencier le contenu publicitaire des textes d’actualité.
Le Guide de déontologie journalistique, à l’article 14.2 – Distinction claire entre publicité et information – précise que : « Les médias d’information établissent une distinction claire entre l’information journalistique et la publicité afin d’éviter toute confusion quant à la nature de l’information transmise au public. »
La notion d’identification claire et limpide de la publicité a été traitée à quelques reprises par les instances du Conseil. Dans les dossiers, D2014-12-061 et D2014-12-070 sur le cahier XTRA de La Presse+, le Conseil avait jugé que la différence entre les polices de caractère de la section XTRA et celles des sections rédactionnelles n’était pas suffisamment importante pour aider le lecteur à faire la distinction entre la publicité et l’information. Le même commentaire s’appliquait aussi pour l’absence de signature pour les textes de cette section.
Le Conseil avait aussi conclu que la présence d’un encadré gris ne pouvait être considérée comme une référence acceptée et reconnue par tous pour séparer les deux types de contenu. Ces normes graphiques sont davantage un code qui a été créé par le média et on ne saurait leur attribuer une reconnaissance universelle. À preuve, dans le journal Les Versants du Mont-Bruno, c’est le vert qui a été adopté.
Dans le dossier D2005-12-029, le Conseil avait également retenu la plainte contre l’hebdomadaire Le Plateau où encore une fois, « malgré l’application de ces normes, il était difficile de faire la différence entre publicité et information ». De l’avis du Conseil, il aurait été plus simple et efficace d’inscrire « publicité », ce qui aurait été sans équivoque.
Ainsi, dans le cas qui nous occupe, et à la lumière des décisions passées, le Conseil ne peut que se ranger aux arguments de la plaignante et de constater que la distinction entre les contenus journalistiques et publicitaires était insuffisante, et pouvait tromper certaines franges du public.
Retenons notamment l’utilisation du terme « reportage » en amorce du texte ou encore d’expressions appartenant au champ lexical de la vérification des faits, la rédaction à la troisième personne et la présence d’un surtitre intitulé « Actualité » trônant au sommet de la page où les textes ont été publiés sont autant d’éléments qui entretiennent la confusion.
Le Conseil ajoute à cette analyse que l’éclatement des normes de mise en page, observable dans plusieurs journaux, et la démultiplication des codes graphiques font en sorte qu’il est illusoire de penser que l’utilisation d’une couleur ou d’une mise en page particulière suffit à marquer une distinction claire entre information et publicité.
Le grief d’omission de distinguer clairement information et publicité est donc retenu.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec retient la plainte de Mme Karolyne Arseneault et blâme l’hebdomadaire Les Versants du Mont-Bruno pour omission de distinguer clairement publicité et information.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. Les entreprises de presse membres s’engagent pour leur part à respecter cette obligation, et à faire parvenir au secrétariat du Conseil une preuve de cette diffusion au maximum 30 jours suivant la date de la décision. » (Règlement No 2, article 9.3)
Linda Taklit
Présidente du sous-comité des plaintes
La composition du sous-comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
- M. Luc Grenier
- Mme Linda Taklit
Représentants des journalistes :
- Mme Audrey Gauthier
- M. Philippe Teisceira-Lessard
Représentants des entreprises de presse :
- M. Jed Kahane
- M. Raymond Tardif