Plaignant
M. Daniel Lambert
Mis en cause
M. André Duchesne, journaliste et le quotidien La Presse+
Résumé de la plainte
NOTE : La décision de la commission d’appel se trouve à la suite de la décision de première instance.
M. Daniel Lambert dépose une plainte le 4 juillet 2016 contre le journaliste André Duchesne et le quotidien La Presse+ concernant un article intitulé « Montréal et sa presse » publié le 5 juin 2016. Le plaignant déplore de l’information incomplète.
L’article mis en cause rapporte l’histoire de la presse montréalaise.
Analyse
Grief 1 : information incomplète
Le plaignant reproche aux mis en cause d’avoir omis d’inclure Le Journal de Montréal dans une liste de journaux présentant l’évolution de la presse écrite au Québec. Selon lui, cette omission occulte un fragment de l’histoire de la presse écrite au Québec.
Au nom des mis en cause, Me Patrick Bourbeau fait valoir que les médias jouissent d’une liberté éditoriale. « Ils sont donc libres de choisir les éléments d’informations qu’ils jugent pertinents à la bonne compréhension d’un sujet donné », écrit-il en précisant que « [l]’obligation de “complétude” prévue à l’article 9 du Guide n’équivaut pas à une obligation d’exhaustivité ». S’il reconnaît que l’inclusion du Journal de Montréal dans la liste « aurait effectivement pu s’avérer pertinente », Me Bourbeau juge cependant qu’elle n’était pas essentielle à la compréhension du sujet.
Le représentant des mis en cause rapporte que Le Journal de Montréal faisait d’abord partie de la liste, mais qu’il a été exclu « lorsqu’il fut décidé de ne traiter que des publications qui n’étaient plus actives, pour finalement demeurer exclu même lorsque certaines publications actives ont été réinsérées dans la liste ». Selon Me Bourbeau, cette décision relevait de la liberté rédactionnelle et « ne brimait en rien la bonne compréhension du lecteur ».
L’article 9, alinéa e) du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec stipule que « [l]es journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : e) complétude : dans le traitement d’un sujet, présentation des éléments essentiels à sa bonne compréhension, tout en respectant la liberté éditoriale du média. »
Dans son préambule, au paragraphe c), le Guide décrit la liberté éditoriale dont bénéficient les journalistes et les médias d’information : « Attendu que la liberté de presse exige que les médias d’information et les journalistes jouissent d’une liberté éditoriale et donc que les choix relatifs au contenu, à la forme, ainsi qu’au moment de publication ou de diffusion de l’information relèvent de la prérogative des médias d’information et des journalistes ».
Le paragraphe f) de ce même préambule fait valoir : « Attendu que les journalistes et les médias d’information sont d’abord et avant tout au service du public et que, dans leurs choix ou leur traitement rédactionnels, le droit du public à l’information prime sur toute autre considération ».
À la lecture de l’article mis en cause et des autres textes composant ce reportage sur les médias montréalais, le Conseil constate que des quatre quotidiens montréalais en activité (Le Devoir, The Gazette, La Presse et Le Journal de Montréal), seul Le Journal de Montréal ne figure dans aucun texte. La liste mise en cause fait état de la fondation des quotidiens Le Devoir et La Presse et l’un des articles faisant partie de ce reportage relate la fondation du quotidien The Gazette. La majorité des membres (4/5) juge donc que même si la liberté éditoriale du média ne l’obligeait pas à présenter une liste exhaustive des quotidiens de Montréal, le fait d’omettre Le Journal de Montréal, le quotidien papier ayant le plus grand lectorat, constitue un manque de complétude. Les membres majoritaires jugent que la source publiée dans le reportage, Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ), donne une crédibilité additionnelle à un contenu qui passe pourtant sous silence un joueur majeur de l’industrie de la presse quotidienne dont l’article présente l’histoire.
Un membre inscrit sa dissidence parce qu’il juge, au contraire, que la liberté éditoriale des mis en cause leur permettait de sélectionner les journaux présentés dans la liste. Il constate que celle-ci était composée de petites vignettes ce qui atténuait l’obligation d’exhaustivité. Ce membre fait également valoir que plusieurs autres journaux avaient été exclus et il considère que le choix d’inclure Le Devoir et The Gazette n’était pas lié à l’importance de ces publications, mais plutôt à des aspects historiques et/ou anecdotiques les concernant. Selon lui, l’information manquante n’était pas essentielle à la compréhension de l’article.
Le grief d’information incomplète est retenu à la majorité (4/5).
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec retient la plainte de M. Daniel Lambert à l’encontre du journaliste André Duchesne et du quotidien La Presse+ pour le grief d’information incomplète. Considérant que l’omission concernait un élément secondaire de l’article, le Conseil juge qu’il s’agit d’un manquement mineur.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. Les entreprises de presse membres s’engagent à respecter cette obligation et à faire parvenir au Conseil une preuve de cette publication ou diffusion dans les 30 jours de la décision. » (Règlement No 2, article 31.02)
La composition du sous-comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
M. Luc Grenier
Mme Nicole McKinnon
Représentant des journalistes :
M. Luc Tremblay
Représentants des entreprises de presse :
M. Luc Simard
Mme Nicole Tardif
Date de l’appel
21 June 2018
Appelant
M. Daniel Lambert
Décision en appel
RÔLE DE LA COMMISSION D’APPEL
Lors de la révision d’un dossier, les membres de la commission d’appel doivent s’assurer que les principes déontologiques ont été appliqués correctement en première instance.
MOTIF DE L’APPEL
L’appelant conteste la décision de première instance relativement à la sanction. M. Lambert estime que la sanction devrait être un « blâme » et non un « manquement mineur ».
Sanction
Règlement applicable
« S’il y a eu manquement, le comité peut déclarer que le manquement est d’une importance mineure et ne mérite aucun blâme, il peut blâmer le mis en cause ou le blâmer sévèrement. » (article 27.02 du Règlement 2)La commission d’appel doit déterminer si l’appelant apporte des éléments démontrant que la première instance a mal évalué la sanction de « manquement mineur » imposée dans le présent dossier.
Décision
Les membres de la commission d’appel estiment que la sanction a été appliquée correctement.
Ils maintiennent la décision rendue en première instance.
Analyse
En première instance, le Conseil avait retenu la plainte d’information incomplète, estimant que le fait d’omettre Le Journal de Montréal d’une liste de quotidiens montréalais constituait « un manque de complétude ». Cependant, le Conseil avait jugé que l’omission « concernait un élément secondaire de l’article » et avait donc jugé que le manquement était d’importance mineure et ne méritait pas de blâme.
L’appelant estime que le Conseil a fait « totale abstraction » de certains de ses arguments déposés lors de la plainte initiale. Il alléguait alors un lien entre le partenariat de La Presse pour les célébrations du 375e de la Ville de Montréal et l’omission de mentionner Le Journal de Montréal dans l’article en question.
La commission d’appel estime que l’appelant n’a pas apporté d’éléments démontrant qu’il y a eu vice procédural lors de la prise de décision de la première instance et que le comité des plaintes pouvait utiliser les éléments de preuve qu’il jugeait pertinents pour évaluer s’il y avait eu incomplétude de la part du média.
CONCLUSION
Après examen, les membres de la commission d’appel concluent à l’unanimité de maintenir la décision rendue en première instance.
Par conséquent, conformément aux règles de procédure, le dossier est clos.
Hélène Deslauriers
Au nom de la commission d’appel
La composition de la commission d’appel lors de la prise de décision :
Représentante du public :
Mme Hélène Deslauriers
Représentante des journalistes :
Mme Carole Beaulieu
Représentant des entreprises de presse :
M. Renel Bouchard