Plaignant
Mme Karen Hamilton
Mis en cause
Mme Emy-Jane Déry, journaliste
Les quotidiens Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec
Résumé de la plainte
Mme Karen Hamilton dépose une plainte le 5 mai 2017 contre Le Journal de Montréal et le Journal de Québec concernant l’article « Ses enfants intimidés car elle a dénoncé le maire qui l’a agressée sexuellement » publié le 5 mai 2017. La plaignante dénonce de l’information incomplète et inexacte, l’omission de vérifier l’information fournie par une source ainsi que le refus de publier un rectificatif. La plaignante s’identifie au Conseil comme la mère du fils de l’ex-maire de Baie-Trinité, Denis Lejeune, qui fait l’objet de l’article.
Les mis en cause n’ont pas souhaité répondre à la plainte.
Un article publié dans Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec relate que les enfants d’une femme qui a été agressée par le maire sa municipalité sont la cible d’intimidation.
Analyse
Grief 1 : information inexacte
Mme Karen Hamilton affirme que la journaliste a rapporté une information inexacte en écrivant que le fils de la victime est âgé de 7 ans. La plaignante soutient qu’il est plutôt âgé de 11 ans.
En matière d’exactitude, le Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec prévoit, à l’article 9, alinéa a), que : « Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : a) exactitude : fidélité à la réalité. »
Après analyse, le Conseil constate que l’article ne contient pas les allégations reprochées par la plaignante. En effet, le Conseil note que l’article rapporte ce que la plaignante aurait voulu y lire, que le garçon est âgé de 11 ans. Le Conseil n’y constate donc aucun manquement.
Le grief d’information inexacte est rejeté.
Grief 2 : informations incomplètes
Mme Hamilton reproche à la journaliste d’avoir omis des informations essentielles à une bonne compréhension de l’article.
2.1 Intimidation des enfants du maire pendant une manifestation
La plaignante affirme que la journaliste a fourni une information incomplète en ne relatant pas que les enfants du maire ont été eux-mêmes « victimes d’intimidation » pendant une manifestation d’appui à la victime qui se serait déroulée devant leur domicile.
En matière d’information incomplète, le Guide prévoit à l’article 9 alinéa e), que : « Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : […] e) complétude : dans le traitement d’un sujet, présentation des éléments essentiels à sa bonne compréhension, tout en respectant la liberté éditoriale du média. »
Dans le présent cas, le Conseil n’est pas en mesure d’évaluer la présence d’enfants chez le maire, ni même l’occurrence d’une manifestation devant la résidence du maire, la plaignante n’ayant pu en faire la démonstration. Le Conseil tient à rappeler sa jurisprudence constante en matière d’information incomplète : « La jurisprudence du Conseil n’impose pas aux journalistes de couvrir tous les angles d’une nouvelle, mais plutôt de s’assurer d’en présenter les éléments essentiels à la compréhension des faits par le lecteur (D2016-07-013). »
Le grief est rejeté sur ce point.
2.2 Intimidation des enfants du maire par la victime dans la cour de l’école
La plaignante affirme que la journaliste a rapporté une information incomplète en ne dévoilant pas que l’un des enfants du maire aurait été intimidé par la victime d’agression sexuelle et que cette dernière aurait même été bannie de la cour d’école à la suite de cet incident.
Encore ici, le Conseil n’est pas en mesure d’évaluer les allégations de la plaignante concernant de possibles gestes d’intimidation envers un enfant, la plaignante n’ayant pu en faire la démonstration.
Le grief est rejeté sur ce point.
Le grief d’informations incomplètes est rejeté.
Grief 3 : omission de vérifier l’information transmise par une source
La plaignante reproche à la journaliste d’avoir omis de vérifier les propos de sa source, la victime d’agression sexuelle, concernant l’intimidation dont ses enfants auraient été victimes.
En matière d’obligation de vérifier l’information transmise par une source, le Guide de déontologie journalistique prévoit à l’article 11 que : « Les journalistes prennent les moyens raisonnables pour évaluer la fiabilité des informations transmises par leurs sources, afin de garantir au public une information de qualité. »
Dans sa décision D2016-06-170, le Conseil rejetait le grief de manque de vérification de la fiabilité des informations transmises par une source. Le Conseil écrit : « Dans la présente plainte, aucune preuve n’a été déposée par le plaignant pour suggérer ou soutenir que des éléments ou des faits pourraient permettre de mettre en doute la fiabilité des informations présentées par [la source]. Du reste, le journal La Nouvelle Union assure avoir pris des moyens raisonnables pour garantir la fiabilité des informations qui lui ont été transmises. Comme le fardeau de la preuve incombe à la partie plaignante, le Conseil ne peut retenir le grief. »
Dans le présent cas, la plaignante n’ayant pas fait la démonstration du manque de fiabilité de la source, la victime d’agression sexuelle, le Conseil considère qu’il n’y avait aucune raison pour la journaliste de croire que les informations transmises par sa source n’étaient pas fiables.
Le grief d’omission de vérification de l’information transmise par une source est rejeté.
Grief 4 : refus de publier un rectificatif
La plaignante déplore le refus des mis en cause de publier un rectificatif rétablissant les faits et la vérité sur ces événements. Le 5 mai 2017, elle a écrit au mis en cause en joignant à sa demande, un document qu’elle désigne comme une « lettre relatant le déroulement des événements ». Le mis en cause n’a pas publié de rectificatif.
En matière de rectificatif, le Guide de déontologie journalistique prévoit, à son article 27.1 que : « Les journalistes et les médias d’information corrigent avec diligence leurs manquements et erreurs, que ce soit par rectification, rétractation ou en accordant un droit de réplique aux personnes ou groupes concernés, de manière à les réparer pleinement et rapidement. »
Le Conseil, n’ayant pas constaté d’inexactitude, d’incomplétude ou un manque de fiabilité dans les informations transmises par la source de la journaliste, juge que les mis en cause n’ont commis aucun manquement en refusant de publier un rectificatif.
Le grief de refus de publier un rectificatif est rejeté.
Refus de collaborer
Le Conseil déplore le refus de collaborer du Journal de Montréal et du Journal de Québec, qui ne sont pas membres du Conseil de presse, en ne répondant pas à la présente plainte.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de Mme Karen Hamilton contre la journaliste Mme Emy-Jane Déry, ainsi que les quotidiens Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec concernant les griefs d’information inexacte, d’informations incomplètes, d’omission de vérifier l’information transmise par une source et de refus de publier un rectificatif.
Jacques Gauthier
Président du comité des plaintes
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentant du public :
- M. Jacques Gauthier
Représentants des journalistes :
- M. Simon Chabot
- Mme Lisa-Marie Gervais
Représentants des entreprises de presse :
- M. Pierre-Paul Noreau
- Mme Nicole Tardif