Plaignant
Mme Mireille Goyer, présidente et fondatrice
Institut des femmes de l’air du monde (Institute for Women Of Aviation Worldwide (iWOAW))
Mis en cause
Mme Saroja Coelho, journaliste
Mme Elysha Enos, journaliste
M. Peter Johnson, producteur exécutif
Le site web cbc.ca
Le site web ici.radio-canada.ca
Résumé de la plainte
NOTE : La décision de la commission d’appel se trouve à la suite de la décision de première instance.
Mme Mireille Goyer dépose une plainte, le 14 mars 2017 contre deux journalistes de CBC, Saroja Coelho et Elysha Enos, le producteur exécutif de CBC, Peter Johnson, et les sites web de Radio-Canada et de CBC pour trois articles publiés les 8 et 9 mars 2017. Elle reproche des inexactitudes, des informations incomplètes, de la partialité, du sensationnalisme et un refus de publier un rectificatif.
Dans le premier article, « Women’s aviation organization defends decision to honour Nazi pilot », publié sur CBC le 8 mars, Journée internationale des femmes, on rapporte le fait qu’une présumée sympathisante nazie, qui est la première femme pilote d’hélicoptère, Hanna Reitsch, soit mise à l’honneur lors de la Semaine mondiale des femmes de l’air. Il est fait état dans l’article que certains, dont l’organisme B’nai Brith, qui représente les intérêts de la communauté juive, ont appelé à l’annulation de l’événement organisé à Lachute par l’Institut des femmes de l’air du monde. La première version de cet article avait pour titre « B’nai Brith seeks apology from organizers of women’s aviation event for honouring Nazi pilot ».
Une version plus courte de cet article, dans laquelle on mentionne que les organisateurs défendent leur choix d’honorer Hanna Reitsch, a été publiée le même jour sur le site web de Radio-Canada avec comme titre « L’hommage rendu à une pionnière de l’aviation contesté en raison de son passé nazi ».
Le lendemain, CBC publie un autre article, « Nazi pilot won’t be honoured at Quebec event celebrating women in aviation », annonçant que Hanna Reitsch ne serait pas célébrée lors de l’événement à venir en fin de semaine sur le terrain de l’aéroport. L’article relate que le maire de Lachute a prévenu les organisateurs que la Ville ne permettrait pas que l’événement ait lieu s’il glorifiait une personne au passé nazi.
Grief non traité : atteinte à la réputation
« La plainte ne peut constituer une plainte de diffamation, viser le contenu d’une publicité ou exprimer une divergence d’opinions avec l’auteur d’une publication ou d’une décision. » (Règlement No 2, article 13.04)
L’atteinte à la réputation n’est pas du ressort de la déontologie journalistique, mais relève plutôt de la sphère judiciaire.
Analyse
Grief 1 : inexactitudes
Principes déontologiques applicables
« Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : a) exactitude : fidélité à la réalité. » (article 9 alinéa a du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)
« Le choix et le traitement des éléments accompagnant ou habillant une information, tels que les photographies, vidéos, illustrations, manchettes, titres et légendes, doivent refléter l’information à laquelle ces informations se rattachent. » (article 14.3 du Guide)
Décision
Le Conseil de presse du Québec juge que les informations visées par la plainte sont fidèles à la réalité tel que l’énonce l’article 9 a) du Guide.
Le Conseil rejette donc le grief d’inexactitudes.
Analyse
Bien que la plaignante souligne qu’il est inexact d’écrire que la Semaine mondiale des femmes de l’air est programmée pour coïncider avec la Journée internationale des femmes (Women Of Aviation Worldwide Week is timed to coincide with International Women’s day), mais plutôt programmée pour coïncider avec l’anniversaire de la première femme pilote (timed to coincide with the anniversary of the first female pilot license), le Conseil constate que le site Internet de l’événement mentionne clairement « qu’elle se déroule tous les ans pendant la semaine du 8 mars, date anniversaire du premier brevet de pilote féminin depuis 1910 et la Journée internationale des femmes depuis 1914 ».
Le Conseil note par ailleurs que l’information publiée à ce sujet concorde avec les propos tenus par la plaignante en entrevue avec la journaliste Saroja Coelho, le 7 mars 2017 : « I am a pilot. A female pilot. And when I was getting excited about celebrating the centennial of the world’s first female pilot license at the end of the 2009, I realised I was the only one excited – despite the fact that it falls on March 8th. So that led to a lot of observation which I had missed in the past. » « Je suis une pilote. Une femme pilote. Et lorsque je m’emballais à propos des célébrations du centième anniversaire de la première femme pilote au monde fin 2009, je me suis rendue compte que j’étais la seule à être enthousiaste – malgré que cela tombe le 8 mars. Cela a mené à de nombreuses observations que j’avais ratées dans le passé ».
Le Conseil ne considère pas que la journaliste a produit de l’information inexacte en écrivant que Hanna Reitsch allait être honorée (honour Hanna Reitsch et to be feted), comme le soutient la plaignante.
Cette dernière estime qu’il était clairement annoncé que le thème de cette année-là était de célébrer les femmes pilotes d’hélicoptère et pas Hanna Reitsch en particulier (not Hanna Reitsch specifically. As the first female helicopter pilot, she cannot be separated from helicopter aviation history).
Le Conseil constate qu’il ressort clairement de la communication de l’organisme qu’il voulait souligner les accomplissements de Mme Reitsch, notamment dans la publication sur le site Internet de la Semaine mondiale des femmes de l’air, datée du 5 novembre 2016 dans laquelle on peut lire : « En 1937, Hanna Reitsch pris les commandes d’un hélicoptère Focke-Achgelis 61 et devint la première femme pilote d’hélicoptère au monde. L’Institut des femmes de l’air du monde est fier de célébrer cet exploit durant la 7e Semaine mondiale des femmes […] ».
Selon la plaignante, il est inexact d’affirmer qu’elle a choisi Mme Reitsch comme pilote à être honorée cette année-là dans des vidéos et des affiches (Goyer chose Reitsch as this year’s pilot to be feted in videos and on posters).
Même si la journaliste n’a pas mentionné expressément qu’il y aurait des vidéos d’autres pionnières de l’aviation, le Conseil estime qu’il n’était pas inexact d’écrire qu’il y aurait des vidéos d’Hanna Reitsch pilotant un hélicoptère pour la première fois en 1937.
Dans une entrevue accordée à CBC, l’organisatrice de l’événement à Lachute, Marguerite Varin, décrit la vidéo qui devait être présentée et qui a été publiée sur la page Facebook de l’organisation.
Le Conseil a pu constater notamment que la publication et la vidéo apparaissent bien sur la page Facebook de l’Institut des femmes de l’air du monde.
Selon la plaignante, il est inexact d’écrire que Hanna Reitsch était la seule femme à avoir reçu la Croix de fer première classe, une distinction militaire (awarded the Luftwaffe test pilot with the Iron cross, first class – the only woman to receive that military distinction), car, selon elle, deux femmes avaient reçu cette distinction.
Elle avance, sans en fournir la preuve, que le livre The Iron Time : A History of the Iron Cross recense deux femmes récipiendaires de cette Croix sous le régime d’Hitler (lists two female recipients during the Hitler regime).
Le Conseil a pu constater que les experts ne s’entendent pas sur cette question. L’historienne Jean Allman a confirmé à CBC qu’Hanna Reitsch était la seule femme à s’être vue décerner la distinction de première classe. La biographe Clare Mulley, auteur du livre The Women Who Flew for Hitler indique que Melitta Schilla-Stauffenberg a également reçu cette distinction, alors que pour le journaliste et auteur Ernst Probst, cette dernière était seulement en lice, mais n’a pas été récompensée de cette Croix de fer première classe. Selon l’historienne Karen Priestman, spécialisée en histoire moderne de l’Allemagne, il y avait au moins une autre femme qui a reçu la Croix de fer première classe, Elsa Grossmann, qui l’a obtenue en janvier 1945. Elle ajoute que ce n’est pas clair si elles sont les deux seules femmes à avoir reçu cet honneur (It’s unclear whether these were the only two women awarded this distinction).
Étant donné que des historiens et spécialistes de cette époque ne sont pas en mesure de s’entendre, le Conseil ne peut reprocher à la journaliste d’avoir produit de l’information inexacte et il estime par ailleurs que cette information n’était pas d’importance majeure et n’avait pas de conséquence sur la compréhension de l’histoire.
Même si la plaignante soutient qu’il est faux d’écrire que Mme Reitsch n’a rien fait pour défendre les droits des filles (Reitsch did nothing to champion the rights of girls), le Conseil constate que ce fait ne peut être reproché à la journaliste puisqu’il s’agit d’une citation, clairement identifiée comme telle, de l’historienne Jean Allman, qui explique que Mme Reitsch n’a rien fait pour défendre les droits des filles et des femmes au Ghana, refusant de les former à l’école (But Allman said Reitsch did nothing to champion the rights of girls and women in Ghana, refusing to train women at the school).
La plaignante soutient que le terme « pilote nazie » (Nazi pilot) en référence à Hanna Reitsch dans les articles en question est inexact. Elle avance que Mme Reitsch était une pilote de la Luftwaffe et qu’elle était nazie, mais, selon elle, cela ne fait pas de Mme Reitsch une « pilote nazie » (Hanna Reitsch was a « Luftwaffe pilot and Nazi but not a Nazi pilot »).
Le Conseil ne voit pas d’inexactitude dans l’emploi du terme pilote nazie. La Luftwaffe était l’armée de l’air du Troisième Reich, l’État allemand nazi que dirigea Adolf Hitler de 1933 à 1945. Il n’est donc pas incorrect de décrire Mme Reitsch comme étant nazie.
Le Conseil a également pu constater qu’il existait un certain nombre de preuves de l’allégeance nazie de Mme Reitsch. Notamment, l’historien Bernhard Rieger écrit dans un chapitre consacré à la pilote allemande, Hanna Reitsch (1912-1979) : The Global Career of a Nazi Celebrity, dans German History, vol. 26, publié par les Presses universitaires d’Oxford, qu’il ne fait aucun doute qu’Hanna Reitsch a compté parmi les nombreux apologistes du Troisième Reich dans l’Allemagne d’après-guerre (counted among the numerous public apologists of the Third Reich in postwar Germany).
Il écrit également que contrairement à beaucoup de chefs militaires et officiels du parti, qui, après la guerre, ont déclaré avoir été forcés à obéir à des ordres compromettants, Mme Reitsch a affirmé qu’elle avait servi Hitler volontairement.
Enfin, la plaignante affirme que, dans le second article, la journaliste a rapporté de l’information inexacte en écrivant que l’association avait changé le thème de l’événement dans son article de suivi sur le fait que la pilote nazie ne serait pas honorée lors de l’événement qui célèbre les femmes en aviation (Nazi pilot won’t be honoured at Quebec event celebrating women in aviation).
Le Conseil constate que nulle part dans l’article la journaliste n’écrit que le thème de l’événement a changé. Il ne peut donc lui être fait de reproches pour une inexactitude qui n’existe pas.
Grief 2 : informations incomplètes
Principe déontologique applicable
« Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : e) complétude : dans le traitement d’un sujet, présentation des éléments essentiels à sa bonne compréhension, tout en respectant la liberté éditoriale du média. » (article 9 alinéa e du Guide)
Décision
Le Conseil rejette le grief d’informations incomplètes, car il juge que l’information produite par la journaliste n’a pas contrevenu à l’article 9, alinéa e du Guide.
Analyse
La plaignante reproche à la journaliste de ne pas avoir mentionné que le site où figurait une courte biographie d’Hanna Reitsch, dans laquelle elle est qualifiée de star de la propagande du parti nazi (star of Nazi party propaganda), appartient à l’Institut des femmes de l’air du monde.
Le Conseil estime que mentionner ce fait n’était pas essentiel à la bonne compréhension de l’article et que ce choix relevait de la liberté éditoriale du média.
Le Conseil est parvenu à la même conclusion en analysant le reproche de la plaignante voulant que la journaliste ait produit de l’information incomplète en ne mentionnant pas les raisons pour lesquelles Hanna Reitsch avait reçu la distinction de la Croix de fer, première classe.
C’est pour les mêmes raisons que le Conseil est d’avis que la journaliste n’avait pas à mentionner que Mme Reitsch avait été invitée d’honneur à la Maison-Blanche lors de la présidence de M. John F. Kennedy, ce qu’aurait souhaité la plaignante. Il estime que cette information n’est pas pertinente et n’ajoute rien à la compréhension de l’article.
La plaignante estime également que la journaliste a produit de l’information incomplète en omettant de mentionner que Mme Reitsch avait été emprisonnée, mais qu’elle n’aurait jamais été reconnue coupable.
Le Conseil statue que cet élément était non essentiel à la bonne compréhension et constate qu’il n’est pas indiqué dans les articles que Mme Reitsch avait été emprisonnée. Il n’était dès lors pas nécessaire de préciser qu’elle n’avait jamais été reconnue coupable.
Bien que la plaignante estime qu’il était insuffisant d’écrire que des vidéos d’Hanna Reitsch pilotant un hélicoptère seraient diffusées lors de l’événement (as part of the event, there will be videos of Hanna Reitsch flying a helicopter for the first time in 1937) sans mentionner que d’autres vidéos de pionnières seraient également montrées (videos of helicopter pioneers like Valerie Andre of France were also going to be shown at Lachute), le Conseil estime que cette information n’était pas nécessaire pour bien comprendre l’article et que l’inclure ou non relevait d’un choix éditorial.
Par ailleurs, le Conseil constate que les articles ne laissent pas entendre que seule Hanna Reitsch devait être honorée lors de l’événement.
Bien que la plaignante soutienne que la journaliste ne fasse jamais mention que le thème de l’événement était « 80 ans de femmes pilotes d’hélicoptère » (although a graphic was added […] that [their] theme was actually “80 years of female helicopter pilots), le Conseil relève que cette information se trouvait dans l’article. Dans une capture d’écran de promotion de l’événement, qui se trouve dans le premier tiers de l’article, on peut lire clairement : « Let’s Swirl. 80 Years of Female Helicopter Pilots. Hanna Reitsch, first woman to pilot a helicopter, 1937 ». « Tourbillonez ! 80 ans de femmes pilotes d’hélicoptère. Hanna Reitsch, première femme pilote d’hélicoptère, 1937 ».
Grief 3 : partialité
Principe déontologique applicable
« Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : c) impartialité : absence d’un parti pris en faveur d’un point de vue particulier ». (article 9 alinéa c du Guide)
Décision
Le Conseil rejette le grief de partialité, car il estime que la journaliste n’a pas contrevenu à l’article 9 c) du Guide.
Analyse
La plaignante allègue que les mis en cause ont fait preuve de partialité dans la couverture de l’événement et que certaines citations ont été prises hors contexte, telle que celle-ci : « If you’re aiming to talk about her maybe controversial part in political history, to me, that’s not relevant. » « Si vous avez l’intention de parler de son rôle peut-être controversé dans l’histoire politique, pour moi, ce n’est pas pertinent. »
Elle estime que dans le cas de Mme Reitsch, ils (les organisateurs) ont omis une part substantielle de son histoire de l’aviation pour se concentrer essentiellement sur son vol en hélicoptère (we in fact omitted a substantial part of her aviation history to focus mostly on her helicopter flight) et que ce qu’elle estimait non pertinent avait trait à l’histoire de l’aviation (The « not relevant » was in relationship to aviation history).
Elle est également d’avis qu’utiliser le terme nazi représente l’expression d’une opinion toute faite, donc un parti pris (simply using the term « Nazi » represent the expression of a set opinion, thus bias).
Même s’il la plaignante estime qu’il n’y avait rien d’étrange à mentionner que Hanna Reitsch est la première femme à avoir piloté un hélicoptère lorsque l’on parle des femmes pilotes d’hélicoptère, le Conseil estime qu’il était d’intérêt pour les lecteurs de connaître les antécédents nazis de Mme Reitsch.
Le Conseil ne voit aucun parti pris dans la couverture de l’événement. Les articles en question sont factuels et aucunement partiaux, conclut-il. Il souligne que l’angle de traitement d’un sujet relève de la liberté éditoriale du média.
La plaignante allègue par ailleurs que lors d’une conversation téléphonique avec le producteur exécutif Peter Johnson, il lui aurait dit que l’un des objectifs était de nuire à l’image de l’association (… damaging association’s public image were goals), ce que dément formellement le mis en cause. La plaignante n’ayant fourni aucune preuve de ces propos, le Conseil ne peut se prononcer sur cette question.
Grief 4 : sensationnalisme
Principe déontologique applicable
« Les journalistes et les médias d’information ne déforment pas la réalité, en exagérant ou en interprétant abusivement la portée réelle des faits et des événements qu’ils rapportent. » (article 14.1 du Guide)
Décision antérieure de référence
Dans la décision D2015-07-013, le Conseil souligne que « les médias et les professionnels de l’information doivent traiter l’information recueillie sans déformer la réalité. Le recours au sensationnalisme et à “l’information-spectacle” risque de donner lieu à une exagération et une interprétation abusive des faits et des événements et d’induire le public en erreur quant à la valeur et à la portée réelles des informations qui lui sont transmises. »
Décision
Le Conseil rejette le grief de sensationnalisme.
Analyse
Selon la plaignante, la journaliste avait clairement pour objectif d’inventer une controverse (the clear goal was for this journalist who is proud of her fascination for division to fabricate a controversy).
La plaignante argue que le terme nazi, qu’elle juge incendiaire, est largement utilisé pour susciter une réaction émotionnelle maximale auprès du public (used extensively for maximum public emotional response) et que l’emploi de ce terme avait pour but d’attirer l’attention du lecteur. Elle estime également que le choix d’attendre la date du 8 mars pour diffuser le reportage est cohérent avec l’intention du média d’avoir une controverse pour la Journée internationale des femmes (the choice to hold the information for release on March 8 is consistent with the intention to have an International Women’s Day controversy).
Le Conseil juge que le média n’a pas exagéré la portée réelle des faits de l’histoire et que l’information présentée n’était pas déformée.
Il estime qu’il n’y avait rien de sensationnaliste à utiliser le terme nazi pour qualifier Hanna Reitsch, puisqu’il s’agit d’un fait établi, et que l’angle de l’article était Hanna Reitsch et le fait que l’organisme ait mis de l’avant cette femme en particulier lors des célébrations. Il ne voit rien de sensationnaliste non plus dans le choix de la date de publication de l’événement, qui relève de la liberté éditoriale du média.
Grief 5 : refus de publier un rectificatif
Principe déontologique applicable
« Les journalistes et les médias d’information corrigent avec diligence leurs manquements et erreurs, que ce soit par rectification, rétractation ou en accordant un droit de réplique aux personnes ou groupes concernés, de manière à les réparer pleinement et rapidement. » (article 27.1 du Guide)
Décision
Le Conseil n’ayant pas relevé de faute déontologique, il juge que les mis en cause n’avaient pas à apporter de correctif.
Décision
Le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de Mireille Goyer contre les journalistes Saroja Coelho et Elysha Enos, le producteur exécutif Peter Johnson et contre cbc.ca et ici.radio-canada.ca pour les griefs d’inexactitudes, d’informations incomplètes, de partialité, de sensationnalisme et de refus de publier un rectificatif.
Linda Taklit
Présidente du comité des plaintes
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Mme Linda Taklit
Mme Renée Lamontagne
M. Paul Chénard
M. Michel Loyer
Représentantes des journalistes :
Mme Lisa-Marie Gervais
Mme Johanna Pellus
Représentants des entreprises de presse :
M. Jed Kahane
M. Éric Trottier
Date de l’appel
19 November 2018
Appelant
Mireille Goyer, présidente et fondatrice
Institut des femmes de l’air du monde (Institute for Women Of Aviation Worldwide (iWOAW))
Décision en appel
RÔLE DE LA COMMISSION D’APPEL
Lors de la révision d’un dossier, les membres de la commission d’appel doivent s’assurer que les principes déontologiques ont été appliqués correctement en première instance.
CONTEXTE
Mireille Goyer dépose une plainte, le 14 mars 2017, contre deux journalistes de CBC, Saroja Coelho et Elysha Enos, le producteur exécutif de CBC, Peter Johnson, et les sites web de Radio-Canada et de CBC pour trois articles publiés les 8 et 9 mars 2017. Ces textes traitent du fait que Hanna Reitsch, sympathisante nazie, soit honorée lors de la Semaine mondiale des femmes de l’air.
En première instance, le Conseil n’a constaté aucun manquement déontologique.
MOTIFS DE L’APPELANTE
L’appelante dénonce un vice procédural et conteste la décision de première instance relativement à l’un des sept griefs d’inexactitude.
Allégation de vice procédural : non-respect de la date limite pour la réplique des mis en cause
Règlement applicable
Observations des parties sur le mérite de la plainte : « Le secrétariat requiert du mis en cause ses observations sur la plainte, y inclus le cas échéant sur la recevabilité, si ce dernier n’est pas satisfait de la décision du comité de recevabilité; les observations doivent être reçues dans les 20 jours qui suivent. Ce délai peut être prolongé par le secrétariat jusqu’à un maximum de 40 jours. » ( article 25.01 du Règlement 2)
Les membres de la commission d’appel doivent déterminer si l’appelante apporte des éléments qui démontrent qu’il y a eu vice procédural lors du traitement de la plainte.
Décision
Les membres de la commission d’appel estiment qu’il n’y a pas eu de vice procédural.
Analyse
L’appelante indique que « CBC n’a pas offert de réponse à la plainte dans les délais clairement stipulés », en soutenant que le média a envoyé sa réplique « 8 jours après la date limite ».
La commission d’appel constate que CBC a demandé qu’on lui accorde un délai de 8 jours pour envoyer sa réplique, ce qui respecte la limite possible de 40 jours prévue au Règlement 2. Le Conseil lui a octroyé ce délai et le média a répondu dans les temps.
Grief 1 : inexactitude
Principe déontologique
Qualités de l’information – « Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : a) exactitude : fidélité à la réalité. » (article 9 du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)
Les membres de la commission d’appel doivent déterminer si l’appelante apporte des éléments qui démontrent que la première instance a mal appliqué le principe déontologique d’exactitude, relativement au nombre de récipiendaires de la Croix de fer première classe.
Décision
Les membres de la commission d’appel estiment que l’article 9 a) du Guide a été appliqué correctement en première instance.
La commission d’appel maintient la décision rendue en première instance.
Analyse
Selon l’appelante, deux femmes avaient reçu la Croix de fer première classe, alors que les articles identifient Hanna Reitsch comme étant la seule récipiendaire.
L’appelante déplore que le Conseil de presse ait « choisi de prendre en considération les tribulations des historiens cités dans la réponse de la CBC Québec plutôt que les copies d’archives nationales allemandes publiées dans le livre cité par l’Institut des Femmes de l’air du monde (avec un lien pour faciliter la consultation) […] » Elle affirme que « l’Institut des femmes de l’air du monde a apporté une preuve basée sur les archives nationales allemandes et disponible dans un livre visible en ligne ».
La commission d’appel estime que l’hyperlien soumis en preuve par la plaignante en première instance ne constituait pas une preuve, car il menait simplement à un site web où le livre est en vente. De plus, l’appelante n’a pas apporté de précision sur le passage qu’elle jugeait pertinent de consulter.
La commission souligne qu’en première instance, les mis en cause ont spécifié au Conseil que l’historienne Jean Allman, citée dans les articles, avait indiqué en entrevue que Hanna Reitsch était la seule pilote à avoir reçu la Croix de fer première classe. CBC pouvait utiliser les explications de cette experte, même si l’appelante aurait souhaité que le média ait recours à un expert différent.
Étant donné que les sources consultées par CBC ne s’entendaient pas sur cette question, comme souligné en première instance, la commission d’appel estime que le comité des plaintes a bien appliqué le principe déontologique en jugeant qu’il ne pouvait reprocher à la journaliste d’avoir produit de l’information inexacte. La commission est également d’avis, tout comme l’a conclu la première instance, que cette information n’était pas d’importance majeure et n’avait pas de conséquence sur la compréhension de l’histoire.
Élément non traité : inexactitude concernant l’organisation de l’événement
Règlement applicable
Inscription d’un appel : L’inscription doit contenir un exposé clair, précis et succinct de l’objet et des motifs d’appel. Cet exposé ne doit contenir aucun nouvel objet de plainte. (article 28.03 du Règlement 2)
Décision
La commission d’appel n’avait pas à se pencher sur ce grief.
Analyse
L’appelante soutient que l’Institut des Femmes de l’air du monde n’organise pas d’événement local, tel que cela est présenté dans les articles mis en cause.
Mme Goyer n’avait pas soulevé cette inexactitude alléguée dans sa plainte originale; elle ne peut donc être étudiée en appel.
CONCLUSION
Après examen, les membres de la commission d’appel concluent à l’unanimité de maintenir la décision rendue en première instance.
Par conséquent, conformément aux règles de procédure, le dossier est clos.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que les décisions de la commission d’appel sont finales.
Jacques Gauthier
Au nom de la commission d’appel
La composition de la commission d’appel lors de la prise de décision :
Représentant du public :
Jacques Gauthier
Représentant des journalistes :
Vincent Larouche
Représentant des entreprises de presse :
Gilber Paquette