Plaignant
Guylaine Tremblay
Mis en cause
Marie-Anne Lapierre, journaliste
TVA Nouvelles
Résumé de la plainte
Guylaine Tremblay dépose une plainte le 12 mars 2020 au sujet du reportage « Visite de la 1re clinique pour la COVID-19 » de la journaliste Marie-Anne Lapierre diffusé le 10 mars 2020 sur le site Internet tvanouvelles.ca. La plaignante déplore un non-respect de la vie privée.
CONTEXTE
Dans ce reportage, la journaliste fait visiter la première clinique montréalaise de dépistage de la COVID-19. La journaliste et les intervenantes décrivent les installations et les règles sanitaires que les visiteurs de la clinique et les travailleurs de la santé devront respecter pour se protéger du virus. Le reportage présente également les réactions de personnes présentes pour passer un test de dépistage.
Analyse
Grief 1 : non-respect de la vie privée
Principe déontologique applicable
Protection de la vie privée et de la dignité : « (1) Les journalistes et les médias d’information respectent le droit fondamental de toute personne à sa vie privée et à sa dignité. (2) Les journalistes et les médias d’information peuvent privilégier le droit du public à l’information lorsque des éléments de la vie privée ou portant atteinte à la dignité d’une personne sont d’intérêt public. » (article 18) du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)
Le Conseil doit déterminer si les mis en cause ont respecté le droit à la vie privée du fils de la plaignante que l’on aperçoit dans le reportage.
Décision
Le Conseil de presse du Québec rejette le grief de non-respect de la vie privée.
Analyse
La plaignante déplore que son fils apparaisse dans le reportage. Elle indique qu’elle a « vu très bien le visage de [s]on fils qui met son masque ». Selon elle, « les gens l’ont vu et cela a un effet que les gens connaissent notre réalité. »
Avant de déterminer si les mis en cause ont manqué de respect au droit à la vie privée du jeune homme, il faut d’abord déterminer si le reportage permet de l’identifier, comme le rappelle la décision antérieure D2012-02-061 qui souligne que « pour qu’il y ait atteinte à la vie privée d’une personne, il faut que cette personne soit identifiée ou très facilement identifiable par le lecteur. »
Le fait qu’une personne se soit reconnue ou ait reconnu un proche dans un reportage ou sur une photo publiée par un média d’information ne signifie pas que cette personne est identifiable comme l’indique la décision D2019-04-059 qui explique, au sujet d’une photo sombre et granuleuse d’une femme assise au loin dans un bar qu’« il est possible qu’une personne se reconnaisse elle-même sur une photo, reconnaissant le lieu où elle se trouvait, ou que l’un de ses proches la reconnaisse. Cela n’est pas considéré comme une atteinte à sa vie privée au regard de la déontologie journalistique. » Cette décision conclut que « la plaignante, même si elle s’est reconnue dans cette photo, ne peut être identifiée par le grand public » notamment parce que la plaignante « n’est nommée ou citée, ni dans le texte ni dans la légende de la photo ».
Dans le dossier D2015-08-016, au contraire, le grand public était en mesure d’identifier le policier qui avait porté plainte au Conseil. En plus de mentionner son nom, son prénom et son âge, le reportage indiquait le corps policier pour lequel il travaillait, ainsi que le poste qu’il occupait. Le Conseil a ensuite analysé si des éléments de sa vie privée avaient été révélés et a jugé que c’était le cas, en l’occurrence les raisons médicales de son congé de maladie. Finalement, le Conseil a jugé que ces raisons médicales étaient « de peu d’intérêt public» et « pas nécessaire à la compréhension de l’histoire rapportée dans le reportage » et le grief de non-respect de la vie privée a donc été retenu.
Dans le cas présent, les images du jeune homme présentées dans le reportage ne permettent pas au grand public de l’identifier. Tout d’abord, le jeune homme apparaît à l’écran quelques secondes seulement. Ensuite, on le voit, vêtu d’un manteau et d’une tuque noirs, ajuster son masque de procédure qui cache tout le bas de son visage. Mais surtout, les éléments qui auraient pu permettre de l’identifier, comme son nom, son prénom, son âge, son lieu de résidence, sa voix, ou autres, ne sont pas présents dans le reportage. Les images du jeune homme qui ajuste son masque illustrent les mesures sanitaires (port du masque de procédure et lavage des mains) qui étaient nouvelles à l’époque.
Ainsi, le jeune homme ajustant son masque n’étant pas identifiable par le grand public, il ne peut y avoir de manquement au respect de sa vie privée.
Note
Le Conseil déplore le refus de collaborer du Groupe TVA qui n’est pas membre du Conseil de presse, et n’a pas répondu à la présente plainte.
Décision
Le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de Guylaine Tremblay visant le reportage « Visite de la 1re clinique pour la COVID-19 » de la journaliste Marie-Anne Lapierre et présenté sur le site Internet tvanouvelle.ca concernant le grief de non-respect de la vie privée.
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Suzanne Legault, présidente du comité des plaintes
François Aird
Représentants des journalistes :
Simon Chabot-Blain
Lisa-Marie Gervais
Représentants des entreprises de presse :
Jed Kahane
Yann Pineau