La déontologie, on le sait, devient intéressante lorsqu’elle entre dans les zones grises : celles qui n’admettent pas de consensus, qui divisent et qui forcent une réflexion plus approfondie, finalement, sur les principes fondamentaux en cause.
C’est le cas d’une décision rendue le mois derniers par le Press Complaints Commission, en apparence banale, blâmant un journal, le Northern Echo, pour avoir publié la photo d’un pilote de planeur, accoté sur celui-ci après son écrasement, et dont il était heureusement sorti indemne. Ici, pas d’effusions de sang, pas de pleurs, ni même de gros plan sur son visage.
Or, pour le PCC, le problème dans ce cas-ci réside dans le fait que la photo a en fait été fournie au Northern Echo par l’équipe de secouristes (un organisme de charité), et que celle-ci n’a jamais demandé au pilote s’ils pouvaient l’utiliser ou la transmettre à un média. Tout le contraire de la BBC, qui avait diffusé le soir même des images de la même scène, mais en ayant au préalable obtenu l’accord du pilote pour leur diffusion.
Est-ce à dire que les médias se doivent, peu importe la situation, de demander une autorisation pour publier des images de ceux qui se retrouvent au centre de l’actualité?
Dans le cas présent, le PCC a jugé que la règle prescrivant aux médias de faire preuve, à l’égard des personnes victimes de drames, de sensibilité et de compassion, avait été enfreinte. Pourtant, répond l’éditeur, ils s’étaient assurés que la vie du pilote n’était pas du tout menacée.
Où doit-on tracer la ligne? Est-ce que cette règle signifie, comme le souligne l’éditeur Peter Barron, qu’une photo comme celle de la jeune fille brûlée au napalm, lors de la guerre du Vietnam, et qui aura valu à son auteur un prix Pullitzer, n’aurait pas dû être publiée? Ou encore que les médias devraient censurer les photos, souvent horrifiantes, des scène des guerre?
Autrement dit, à partir de quand est-ce que l’intérêt public justifie une atteinte à la dignité des personnes victimes de drames?
Force est d’admettre, à l’instar du PCC, que l’équilibre est difficile à trouver…