À la fois conscience et chien de garde de la presse québécoise, le Conseil de presse du Québec veille, à titre d’ombudsman, à la défense et la promotion de la liberté de presse et du droit du public à une information pluraliste et de qualité.
Considérant que la présence d’une presse libre stimule la vie démocratique de toute société, le Conseil encourage les médias et les professionnels de l’information à favoriser non seulement la couverture événementielle des grandeurs et misères de la société, mai également la pratique d’un journalisme plus fouillé, voué à la recherche et à la collecter d’éléments de preuves et de témoignages, lorsque l’importance ds évéenemnts le commande.
Cette pratique journalistique, communément appelée « journalisme d’enquête » et mise régulièrement à profit par plusieurs médias québécois, permet de donner au grand public un éclairage supérieur, tantôt sur des enjeux politiques ou sociaux majeurs, tantôt sur des questions d’intérêt hautement public, laissées dans l’ombre.
L’éthique journalistique a ses règles d’or. Ainsi, dans l’exercice de leur profession, les journalistes doivent-ils s’identifier claire ment et recueillir l’information à visage découvert, par le biais de recherches, d’entrevues, de contacts et de consultation de dossiers.
Les exigences et les difficultés du journalisme d’enquête justifient parfois l’usage de procédés clandestins, lors de la collecte d’informations : micros et caméras cachés, dissimulation d’identité, infiltrations, filatures, etc. L’utilisation de pareils procédés doit toujours demeurer exceptionnelle, trouvant alors sa légitimité dans le haut degré d’intérêt public de la nouvelle, et dans le fait qu’il n’existe aucun autre moyen d’obtenir les informations recherchées.
Dans le même esprit, la Fédération professionnelle des journalistes du Québgec recommande, dans son guide de déontologie, que le public soit informé lorsque médias et journalistes ont recours à tout procédé clandestin ; le Cosneil de presse abonde aussi dans ce sens.
Au cours de la dernière année, le Conseil a été saisi de plaintes faisant état du recours à des méthodes de travail discutables par des journalistes spécialisés en journalisme d’enquête. Ces plaintes mettaient en doute la valeur des procédés utilisés par certains médias dans leur collecte d’informations, ainsi que le comportement des journalistes à l’égard des acteurs de l’événement.
Les journalistes en cause avaient pris l’habitude de débarquer à l’improviste dans des bureaux de professionnels et d’entreprises, en braquant un micro ou une caméra au visage du personnage visé, et en lui posant des questions tendancieuses.
Aux yeux du Conseil, pareil procédé est synonyme de journalisme d’embuscade, où l’objectif apparaît davantage de piéger l’interviewé que d’informer le public.
L’emploi d’un tel procédé non seulement fait fi du principe de présomption d’innocence, mais vient banaliser une pratique journalistique qui devrait rester exceptionnelle. La tactique qui consiste à débarquer sans préavis, muni d’un appareil photo, de micro ou de caméra, peut être utilisée par les médias quand certaines conditions sont réunies. Par exemple, lorsqu’un journaliste fait face à des refus répétés de la part de personnes qui visent clairement à se dérober ou à gagner du temps. Ou encore, lorsque le fait de demander une entrevue à une personne risque de l’inciter à disparaître dans laisser de trace. L’usage de procédés clandestins pourra aussi être légitime dans le contexte de la couverture d’affaires criminelles, lorsque la santé ou la sécurité des journalistes serait menacée.
Si le Conseil est, d’une part, nettement favorable à la pratique d’un sain journalisme d’enquête, propre à rehausser le calibre et la qualité de l’information au Québec, il invite, d’autre part, les médias et les professionnels de l’information à faire preuve de prudence et de discernement dans le recours à des procédés clandestins qui, rappelons-le, devrait en définitive rester exceptionnel.