Plaignant
Mme Francine
Laberge-Renaud et M. Michel Renaud
Mis en cause
CFCM-TV
(Télé-Capitale) [TVA, Québec] et le réseau TVA [Montréal]
Représentant du mis en cause
M. Claude Blain
(responsable de l’information, CFCM-TV (Télé-Capitale) [TVA, Québec]) et M. Bernard
Cleary (responsable de l’information, TVA [Montréal])
Résumé de la plainte
Le 16 février
1981, CFCM-TV et le réseau TVA ont manqué à leur devoir en diffusant, dans un
bulletin de nouvelles, les images d’une insupportable violence de l’accident
dont fut victime un participant au dynamitage des embâcles de la rivière
Sainte-Anne. Un montage sobre de quelques plans tirés des scènes en question
aurait eu l’avantage de respecter tant la victime et sa famille que l’ensemble
des télespectateurs, sans pour autant priver le public de son droit à
l’information.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a terminé l’étude de votre plainte contre la station CFCM-TV de Québec
et le réseau TVA pour la diffusion, au cours du bulletin de nouvelles du 16
février, «d’un reportage comportant des images déplacées sur l’accident dont
fut victime un ouvrier participant au dynamitage des embâcles de la rivière
Sainte-Anne».
Vous dénonciez «l’insupportable
spectacle de souffrance» et «la violence gratuite» de certaines des images de
la scène de l’explosion et de celle où l’on voit la victime gisant sur la
glace, diffusées à deux reprises et à quelques minutes d’intervalle, au cours
de ce reportage.
Un montage sobre
et rigoureux de quelques plans fixes tirés des deux scènes en question aurait
eu l’avantage de respecter tant la victime et sa famille que l’ensemble des
téléspectateurs sans comporter pour autant l’inconvénient de priver le public
de son droit à l’information tout en lui permettant quand même de «s’interroger
sur l’à-propos des techniques actuelles de libération des embâcles» et de
«réaliser le danger des techniques de dynamitage».
Votre
intervention n’était pas de voir «censurer toutes les images violentes de
l’information». Vous estimiez en effet que de telles images pouvaient très bien
se justifier lorsqu’elles servent à dénoncer les maux dont souffre la société
et les injustices, comme la guerre, la torture, la faim, la discrimination.
Cependant, dans ce cas, vous ne voyiez pas très bien quel genre de mal ou
d’injustice pouvait être dénoncé par le «fait divers» en question.
Enfin, vous
estimiez que le droit à l’information ne voulait pas nécessairement dire «droit
fondamental à toute violence gratuite, si extrême fut-elle». Ainsi, en
permettant la diffusion des deux scènes en question, CFCM-TV et TVA avaient
fait fi du «respect de la dignité humaine».
Commentaires du mis en cause
Les responsables
de l’information de CFCM-TV et du réseau TVA, messieurs Claude Blain et Bernard
Cleary, estimaient que le droit du public à l’information avait été respecté
dans ce cas et que Télé 4 et le réseau TVA s’étaient acquittés de leur tâche
avec professionnalisme et rigueur. L’objectif premier du reportage en question
était d’informer les téléspectateurs sur «les rudiments de l’art du dynamitage
d’embâcles». Malheureusement, la suite des événements l’a transformé en un
témoin d’une scène d’accident, lequel fut traité le plus sobrement possible et
avec toutes les précautions permettant aux téléspectateurs de s’interroger sur
les techniques actuelles de libération des embâcles.
Un organe
d’information dont le rôle est d’informer, ne peut étouffer certaines
informations sous prétexte qu’elles ressortent du fait divers. Il ne peut non
plus cacher certaines images à cause de leur caractère saisissant. «Censurer
toutes les images violentes de l’information signifierait sans aucun doute
éliminer tous les faits divers».
Analyse
Il est apparu, dans ce cas, au Conseil que CFCM-TV et le réseau TVA, par leur façon de traiter l’événement en question, se sont acquittés de leur fonction d’informateur public de façon responsable.
Le Conseil ne peut, en effet, faire reproche à CFCM-TV et TVA d’avoir cherché à retenir la curiosité du public sur les aspects morbides ou spectaculaires du drame en question plutôt que de l’informer sur les aspects d’intérêt public que pouvait contenir l’événement. Le Conseil n’est pas d’avis non plus que CFCM-TV et le réseau TVA ont accordé une importance démesurée à la nouvelle en question par rapport au degré d’intérêt public qu’elle contenait.
Le Conseil est sensible aux réticences et appréhensions que vous exprimez vis-à-vis de ce genre d’information. Cependant, il estime que la liberté de la presse et le droit du public à l’information seraient grandement compromis si, dans sa façon d’aborder les événements, la presse devait taire certaines informations d’intérêt public ou cacher certaines images qui sont partie intégrante de cette information même si parfois elles heurtent la sensibilité du public.
Analyse de la décision
- C14A Sensationnalisme/exagération/insistance indue