Plaignant
M. A.G. Racicot
Mis en cause
The Gazette
[Montréal] et M. Ted Blackman (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Mark Harrison
(rédacteur en chef, The Gazette [Montréal])
Résumé de la plainte
L’article
«Premier lets slip why Leger went», publié le 7 octobre 1982 par The Gazette,
rapporte des propos non destinés à la diffusion tenus par le Premier ministre
du Québec lors de l’enregistrement d’une émission radiophonique. Les
journalistes présents ont entendu ces propos par accident et ont respecté le
désir du Premier ministre de ne pas les voir publiés. Le journaliste Ted
Blackman, qui a pris connaissance de ces propos par ouï-dire, a décidé pour sa
part de les étaler publiquement.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a terminé l’étude de votre plainte reprochant à monsieur Ted Blackman
d’avoir rapporté, dans son article paru dans The Gazette du 7 octobre 1982 sous
le titre: «Premier lets slip why Leger went», les propos peu élogieux que le
premier ministre du Québec avait tenus à l’endroit de son collègue, monsieur
Marcel Léger, lors de l’enregistrement d’une émission à la station CKAC de
Montréal.
Ces propos, selon
vous, n’étaient pas destinés à la publication, puisque si les journalistes
présents à l’enregistrement en question, dans une salle attenante, les ont
entendus, ce fut à cause d’une erreur technique; les micros étant restés
ouverts au cours d’une pause où le premier ministre du Québec se confiait à
l’interviewer Pierre Pascau en précisant que ses propos n’étaient pas pour
diffusion. D’ailleurs tous les journalistes présents se sont imposés la
discrétion sauf un qui a fait part des propos du premier ministre à monsieur
Blackman et que ce dernier s’est senti libre d’étaler publiquement.
Vous considériez
qu’en agissant comme monsieur Blackman l’a fait, il a transgressé une tradition
du métier et fait une entorse grave à une règle non écrite que respectent les
journalistes «honnêtes».
Commentaires du mis en cause
Selon le
rédacteur en chef de The Gazette, monsieur Mark Harrison, monsieur Blackman
n’avait effectivement pas à respecter la confidentialité exigée par le premier
ministre puisqu’il n’était pas lui-même présent à l’entrevue en question. Si
son collègue avait, lui, transgressé une règle d’éthique en lui révélant les
propos du premier ministre, il ne pouvait lui_même être lié par cette demande
puisqu’il ne s’était pas engagé personnellement à la respecter.
Analyse
Le Conseil en peut reprocher à monsieur Ted Blackman d’avoir manqué à l’éthique journalistique dans le présent cas. Le journaliste n’était lui-même aucunement lié, par quelque engagement que ce soit, à taire les propos du premier ministre que, par ailleurs, il a rapportés fidèlement en prenant le soin de situer le contexte où ils furent proférés et entendus à cause d’une erreur technique dont ni la source d’information ni les journalistes ne sont responsables.
Le respect d’une entente – si entente il y a, ce qui n’est manifestement pas le cas ici – passée entre une source d’information et un journaliste à l’effet de ne pas divulguer certains propos [off the record], met en balance l’intérêt du public à recevoir l’information et la force de l’engagement qu’a pu prendre le journaliste avec sa source. Un tel engagement met à l’épreuve la confiance que la source d’information peut avoir envers le journaliste et qui fera que celle-ci se développe ou se détériore.
Analyse de la décision
- C23B Violation d’un « off the record »