Plaignant
M. Pierre
Beaudry (traducteur et chroniqueur de langue)
Mis en cause
La Presse
Canadienne [Montréal] et The Gazette [Montréal]
Représentant du mis en cause
M. Ronald Lebel
(adjoint au chef de bureau, Presse Canadienne [Montréal]) et M. Mark Harrison
(rédacteur en chef, The Gazette [Montréal])
Résumé de la plainte
Une dépêche de
la Presse Canadienne et le traitement qu’en fait The Gazette, qui la publie le
30 décembre 1982 sous le titre « »Student » gets an up grading by OLF»,
laissent croire à tort que l’Office de la langue française se mêle d’établir la
terminologie anglaise de certains mots tels que «student» et «graduate». Pour
éviter toute confusion, le titre et le texte auraient dû reproduire ces mots en
français, et non pas en anglais. La Presse Canadienne refuse de rectifier sa
dépêche. Finalement, The Gazette abrège la lettre ouverte du plaignant
concernant la réaction virulente de la station anglophone CJFM à la suite de
cette affaire.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a terminé l’étude de la plainte de monsieur Pierre Beaudry, traducteur
et chroniqueur de langue, qui critiquait une dépêche de La Presse canadienne et
le traitement que lui a accordé le journal The Gazette dans un article du 30
décembre 1982 paru sous le titre: «Student» gets an up grading by OLF».
Selon monsieur
Beaudry la dépêche et le titre sous lequel l’a rapportée The Gazette étaient tendancieux
en ce qu’ils laissaient croire, à tort, que l’Office de la langue française se
mêlait d’établir la terminologie de certains mots anglais tels que «student» et
«graduate», alors qu’il ne faisait qu’en préciser la définition française. Pour
éviter toute confusion, le titre et l’article auraient dû reproduire en
français, et non pas en anglais comme ce fut le cas, les mots que l’Office de
la langue française avait décidé de clarifier. Cela aurait permis d’éviter de
ridiculiser les efforts de l’Office et de «provoquer l’incompréhension et la
colère chez nos compatriotes anglophones non avertis». Aussi, pour corriger la
situation avait-il demandé à la Presse Canadienne de rectifier sa dépêche;
demande qui lui fut refusée.
Monsieur Beaudry
estimait aussi que The Gazette avait fait preuve de mauvaise foi en supprimant
le dernier paragraphe de la lettre ouverte qu’il lui faisait tenir et qu’elle
publiait le 6 janvier 1983. Cette dernière traitait de la réaction virulente
d’un animateur de la station anglophone CJFM dénonçant l’ingérence de l’Office
de la langue française dans la terminologie anglaise, ce qui démontrait très
bien que les craintes du plaignant concernant l’interprétation que les
anglophones pouvaient faire du titre et de la dépêche en question n’étaient pas
sans fondement.
Commentaires du mis en cause
L’adjoint au
chef de bureau de la Presse Canadienne, monsieur Ronald Lebel, expliquait au
Conseil que la dépêche en question reprenait l’essentiel d’un texte beaucoup
plus substantiel de la journaliste Mariane Favreau sur la publication d’un
lexique de l’Office de la langue française destiné au secteur de l’éducation
que La Presse publiait le 29 décembre 1982. Même s’il lui apparaissait évident
que l’intervention de l’Office de la langue française ne concernait que la
terminologie française, la dépêche en question aurait dû mentionner
explicitement ce fait. Cela aurait été plus précis et aurait évité toute
confusion, comme il l’avait d’ailleurs fait remarquer à l’auteur de la dépêche
ainsi qu’à son chef de pupitre. Effectivement, bien que cette dépêche
reproduisît en français plusieurs termes redéfinis par l’Office, faisaient
exceptions les termes «graduate» et «student» source de la confusion de
certains lecteurs amenés à conclure que l’Office s’était prononcé sur le
terminologie anglaise. Le mot «student» placé entre guillemets dans le titre de
The Gazette ne faisait que renforcer l’ambiguïté.
Enfin, selon
monsieur Lebel, il n’y avait pas lieu de rectifier une dépêche qui en soi ne
renfermait aucune information fausse. Il s’agissait plutôt d’un manque de
précision.
Le rédacteur en
chef de The Gazette, monsieur Mark Harisson, prétendait pour sa part que le
plaignant n’avait pas à s’offusquer qu’on avait retranché certains passages de
sa lettre ouverte. Il s’agissait là d’une pratique courante des journaux pour
favoriser la publication du plus grand nombre possible d’opinions des lecteurs.
En outre, selon lui, les remarques contenues dans cette lettre sur la réaction
d’un animateur de radio n’avaient pas de lien direct avec le point de vue que
voulait illustrer le plaignant et qui fut publié en évidence, en reflétant
l’essentiel de ses critiques.
Analyse
Le Conseil est d’avis que la dépêche de la Presse Canadienne et le titre utilisé par The Gazette pour coiffer son article pouvaient effectivement, à cause de leur imprécision, semer la confusion dans l’esprit des lecteurs qui ont pu avoir l’impression que l’Office de la langue française outrepassait son mandat en se mêlant de terminologie anglaise. Le Conseil estime que la Presse Canadienne aurait dû rectifier sa dépêche comme le lui demandait le plaignant puisqu’elle était elle-même consciente de son imprécision.
Le Conseil est d’avis, d’autre part, que les journaux peuvent apporter des modifications aux lettres qu’ils publient dans la rubrique réservée au courrier des lecteurs en autant qu’ils n’en changent pas le sens ou qu’ils ne trahissent pas la pensée de l’auteur. Dans le présent cas, le Conseil est d’avis qu’en retranchant le dernier paragraphe de la lettre de mise au point du plaignant, The Gazette en a diminué considérablement la portée.
Analyse de la décision
- C08B Modification des textes
- C11B Information inexacte
- C19A Absence/refus de rectification