Plaignant
M. Louis-Claude
Meilleur
Mis en cause
Dimanche-Matin
[Montréal] et M. Roger Labonté (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Claude
LaVergne (chef de l’information, Dimanche-Matin [Montréal])
Résumé de la plainte
Dans son article
«Meurtre d’une vieille dame sans défense à Laval», paru dans l’édition du 4
décembre 1983 du Dimanche-Matin, le journaliste Roger Labonté utilise le mot
«apache» pour décrire la violence des meurtriers impliqués dans ce crime. Un
tel qualificatif porte préjudice aux tribus Apaches qui vivent en Amérique.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a terminé l’étude de votre plainte contre monsieur Roger Labonté,
journaliste à Dimanche-Matin, à qui vous reprochiez d’avoir utilisé, dans son
article du 4 décembre 1983, le mot «apaches» «dans son sens le plus péjoratif
pour décrire la violence d’un acte et de ses participants». Comme il y a des
tribus Apaches qui résident en Amérique, vous considériez que ce «qualificatif
des plus discriminatoires» leur portait grandement préjudice.
Commentaires du mis en cause
Monsieur Claude
LaVergne, chef de l’information, s’en remettait pour sa part à l’usage confirmé
par différents dictionnaires, selon lequel le nom «apache» avec un «a» minuscule
tel qu’utilisé dans son journal, signifiait «malfaiteur», «bandit», «voyou de
grande ville, prêt à tous les mauvais coups», etc.
Réplique du plaignant
Dans votre
réplique, vous prétendiez que le journal tentait de se réfugier derrière le
dictionnaire pour valider l’utilisation du terme que vous lui reprochiez. Selon
vous, même si le Petit Robert, qui prend d’ailleurs le soin d’indiquer que le
mot «apache» provient du nom d’une tribu du Texas réputée féroce, accrédite
«cette réputation mensongère», il faut néanmoins décrire une telle «erreur tant
historique qu’inutile». En France, ajoutiez-vous, «le terme peut sembler anodin
puisque ce pays n’a pas d’Amérindiens sur son territoire. Ici, pourtant, ce mot
prend une connotation nettement raciste et méchante. L’usage des mots doit
toujours tenir compte des réalités justes et faits».
Selon vous, en
effet, les dictionnaires ne font «que répertorier l’usage qu’on fait des mots,
indépendamment de leur caractère préjudiciable». Beaucoup de mots qu’on y
trouve aussi peuvent également être discriminatoire. «Ainsi, le Petit Robert
sanctionne l’usage péjoratif du mot « juif » comme étant une personne
avare et âpre au gain. Cela permettrait-il au journal Dimanche-Matin de titrer
quelque chose comme « Jacques Parizeau est subtil comme un juif ».
Certes non! Non seulement un tel titre serait-il abusif mais il maintiendrait
dans l’esprit des gens l’idée que le peuple juif est avare et âpre au gain. Les
journaux se doivent de respecter la vérité et cesser d’employer des mots que l’Histoire
a malheureusement glissé dans sa bouche».
Analyse
Le Conseil n’a pas à établir de lexique des termes que les médias et les professionnels de l’information doivent employer ou non, les décisions à cet égard relevant de leur autorité et de leur discrétion rédactionnelle. Encore ces derniers doivent-ils éviter d’utiliser, à l’endroit des personnes ou des groupes des termes méprisants, propres à les discréditer auprès de l’opinion publique ou à entretenir des préjugés à leur sujet.
Le Conseil considère, en l’instance, que le mot «apache» n’a pas porté préjudice à la réputation des amérindiens Apaches n’y voyant aucune connotation raciste ou méchante. Il ne saurait donc retenir de blâme contre Dimanche-Matin et son journaliste.
Analyse de la décision
- C18C Préjugés/stéréotypes