Plaignant
Le Service
d’information sur le désarmement (Association chrétienne des étudiants)
Représentant du plaignant
Mme Phyllis
Aronoff et M. Philippe Elharrar (représentants, Service d’information sur le
désarmement (Association chrétienne des étudiants))
Mis en cause
Hors d’Ordre
[Montréal]
Représentant du mis en cause
M. Mario Beaulac
(rédacteur en chef, Hors d’Ordre [Montréal])
Résumé de la plainte
Le numéro de
mai-juin 1984 de la revue Hors d’Ordre présente un caractère raciste et
antisémite. Certains passages traitent, avec un humour douteux, de l’holocauste
et du prétendu mercantilisme des Juifs.
Griefs du plaignant
Le Conseil de presse
a terminé l’étude de la plainte de madame Phillis Aronoff et de monsieur
Philippe Elharrar, du Service d’information sur le désarmement, qui dénonçaient
le caractère «raciste et antisémite» du numéro mai-juin 1984 d’Hors d’Ordre.
Appuyant leur
plainte sur certains exemples qu’ils jugeaient scandaleux sur le prétendu
mercantilisme des juifs et sur l’holocauste, les plaignants exprimaient leur
déception de retrouver de tels propos dans une publication qui prétend vouloir
«briser les catégories d’âge et prendre contact avec les autres communautés
culturelles» et refléter le point de vue des jeunes du Québec dont pourtant un
certain nombre sont juifs.
Commentaires du mis en cause
Selon vous, qui
en étiez alors le rédacteur en chef, les propos des plaignants déformaient les
intentions de la publication. Celle-ci, d’une part, n’avait jamais prétendu
refléter le point de vue des jeunes du Québec, mais bien l’opinion de certains
d’entre eux. En faisait foi l’indication qui y apparaissait à l’effet que «les
opinions exprimées dans Hors d’Ordre ne reflètent pas nécessairement le point
de vue de l’équipe de rédaction et n’engagent que leurs auteur(e)s».
Quant aux
passages dénoncés, leur intention satirique et parodique vous semblait
évidente. L’humour est un outil particulièrement aiguisé de critique sociale,
permettant à la fois d’exposer et de dénoncer la cruauté, disiez-vous. Et les
«gags» à l’origine de la plainte, loin de se complaire dans le racisme,
dénonçaient en fait la xénophobie latente des Québécois.
Vous souteniez
aussi que votre publication s’appuyait sur une philosophie progressiste et vous
en illustriez les intentions humanistes par la publication d’un article,
illustré par la photo d’un jeune noir, saluant le 25e anniversaire d’un
mouvement d’éducation chrétienne à la solidarité internationale ainsi que d’un
autre fourni par le Service d’information sur le désarmement pour lequel
travaillaient les plaignants.
Réplique du plaignant
Dans leur
réplique, les plaignants considéraient que l’indication à l’effet que les opinions
exprimées dans Hors d’Ordre n’engageaient que leurs auteurs, n’excluait en rien
la responsabilité d’un journal face à ce qu’il publie. Par ailleurs, ils se
disaient en mesure de reconnaître un bon gag d’une plaisanterie antisémite,
raciste ou tout simplement xénophobe. «Un bon gag peut avoir un effet éducatif
et peut permettre d’atteindre un but recherché, mais dans le cas qui nous
occupe, nous n’avons rien trouvé qui pouvait être assimilé à pareille
recherche», ajoutaient-ils. Ils soutenaient n’avoir rien trouvé non plus dans
Hors d’Ordre qui fut une preuve de progressisme ou d’ouverture d’esprit. Au
contraire! Par la publication de la photo d’un jeune noir pour illustrer un
article, les plaignants se demandaient si, tout étant relatif, l’éventuelle
publication de la photo d’un juif religieux pour illustrer un article dirigé
contre les noirs, constituerait un autre signe de «la grande ouverture d’esprit
du journal».
Analyse
Le Conseil de presse est d’avis que les passages dénoncés par les plaignants étaient déplacés et méprisants. Même livrés sous le sceau de l’humour, ils étaient susceptibles d’alimenter les préjugés qu’au contraire une presse responsable se doit de dissiper.
Une presse responsable doit en effet faire preuve de discernement et de rigueur surtout lorsque les thèmes qu’elle aborde, telles les questions de race et d’ethnie, sont délicats.
Analyse de la décision
- C18C Préjugés/stéréotypes