Plaignant
M. Robert Jacob
(analyste en évaluation des programmes de santé, ministère de la Santé et des
Services sociaux)
Mis en cause
L’Actualité
médicale [Montréal] et Mme Aline Charest (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Jacques
Lafontaine (directeur, L’Actualité médicale [Montréal])
Résumé de la plainte
L’Actualité
médicale traite d’une étude réalisée par le plaignant par le biais d’une
entrevue avec le Dr Jean Léveillé, président de l’Association des médecins
spécialistes en médecine nucléaire du Québec. Ce procédé entretient une
confusion entre l’opinion du Dr Léveillé et les résultats de l’étude en
question. Les deux articles, parus le 10 septembre 1986 sous les titres «Pour
rattraper notre retard en technologie nucléaire : Intéresser le secteur privé à
la recherche» et «Technologie médicale : Des coûts moins élevés qu’on ne
croit», présentent des informations imprécises, voire inexactes. L’Actualité
médicale publie la mise au point du plaignant, mais en la modifiant de manière
substantielle.
Griefs du plaignant
Le Conseil a
terminé l’étude de la plainte de monsieur Robert Jacob, analyste en évaluation
des programmes de santé au ministère de la Santé et des Services sociaux [MSS],
contre le magazine L’Actualité médicale.
Auteur d’une
étude sur l’imagerie médicale réalisée dans le cadre de son travail au MSS, le
plaignant reprochait à L’Actualité médicale d’avoir traité des résultats de cette
étude via un interview du docteur Jean Léveillé, président de l’Association des
médecins spécialistes en médecine nucléaire du Québec, dans deux articles «très
imprécis et même quelques fois faux par rapport aux résultats de l’étude»
publiés le 10 septembre 1986. Le plaignant voyait la l’utilisation d’un procédé
douteux qui, plutôt que de faire un traitement direct de l’étude en question,
entretenait beaucoup de confusion sur ce qui relevait de l’opinion du docteur
Léveillé et sur ce qui était, d’autre part, un résultat de l’étude proprement
dite.
Monsieur Jacob
s’étant plaint de cette situation au directeur et rédacteur en chef de
L’Actualité médicale, celui-ci aurait reconnu «les lacunes de ce procédé» et
lui aurait alors ouvert les pages du courrier du lecteur pour faire une mise au
point. Une telle mise au point fut adressée à la revue, mais celle-ci en aurait
fait un traitement «totalement inacceptable», aux dires de monsieur Jacob, qui
considérait qu’elle avait été «abondamment retouchée» alors que seules quelques
coupures étaient signalées. Ainsi, certains qualificatifs, certaines précisions
de même que plusieurs phrases «très importantes pour la compréhension des
résultats de l’étude» avaient été tout simplement omis, sans aucune mention.
Selon le
plaignant, la mise au point serait ainsi devenue une simple précision et
l’ouverture que la revue avait faite à l’effet de corriger les inexactitudes
des premiers articles, une fumisterie. Il soutenait que, si les contraintes
d’espace imposaient de faire des modifications au texte original, l’honnêteté
et le respect des lecteurs demandaient à tout le moins d’obtenir son
assentiment avant de ce faire. Il aurait par ailleurs été préférable, selon
monsieur Jacob, que la direction de la revue lui fasse connaître au départ
l’espace exact disponible pour sa mise au point.
Commentaires du mis en cause
Pour sa part, le
directeur de L’Actualité médicale, monsieur Jacques Lafontaine, précisait
d’abord que sa revue s’adressait exclusivement aux médecins et que, s’il
acceptait de publier des commentaires sur un document n’émanant pas d’un
praticien, il était justifié de le faire par l’intermédiaire d’un médecin. Les
commentaires du docteur Jean Léveillé n’ayant pas eu l’heur de satisfaire
monsieur Jacob, celui-ci aurait adressé à la revue une mise au point «fort
développée» compte tenu des possibilités de publication. Quelques coupures
nécessaires avaient donc été pratiquées dans le texte de monsieur Jacob,
conformément aux prérogatives et aux devoirs de l’éditeur, lesdites coupures
n’apparaissant pas cruciales, par ailleurs, pour la bonne interprétation de la
mise au point de monsieur Jacob.
En outre,
concernant l’affirmation de monsieur Jacob à l’effet que le directeur de
L’Actualité médicale aurait reconnu les lacunes du procédé employé par sa
revue, monsieur Lafontaine la niait et expliquait avoir simplement suggéré au
plaignant de lui faire parvenir un texte qui serait publié dans le courrier des
lecteurs. Ce dernier n’aurait alors exigé aucun traitement spécial, lequel lui eût,
de toute façon, été refusé. La bonne foi des intimés ne saurait dont être mise
en cause, selon monsieur Lafontaine, puisque ceux-ci avaient publié volontiers
une longue mise au point sur l’article initial, ouvrant d’ailleurs à monsieur
Jacob la page éditoriale habituellement réservée aux médecins. Monsieur
Lafontaine concluait en disant regretter cet incident.
Analyse
Le choix et le traitement des informations relèvent du jugement rédactionnel des professionnels de l’information, lesquels doivent, en exerçant cette latitude, livrer une information équilibrée, conforme aux faits et aux événements, et respectueuse des personnes mises en cause.
En ce qui a trait au courrier des lecteurs, il est acceptable que les responsables des médias apportent des modifications aux lettres qu’ils publient (réduction, titrage, etc.) dans la mesure où ils ne changent pas le sens des propos de l’auteur et ne trahissent pas sa pensée.
La revue était libre de privilégier l’interview d’un médecin pour traiter du sujet abordé, d’autant plus que, ce faisant, les propos du praticien étaient distingués du rapport de recherche commenté par celui-ci.
En ce qui concerne la publication de la mise au point du plaignant, le Conseil déplore que la dernière coupure effectuée dans le texte n’ait pas été indiquée par la revue et que cette coupure ait modifié de façon significative le propos de l’auteur dont les conclusions sont ainsi amputées d’une nuance importante quant à l’effet de certains facteurs sur les coûts globaux de l’évolution de l’imagerie médicale.
Analyse de la décision
- C03A Angle de traitement
- C09C Modification du texte