Plaignant
Front de
libération contre les abus du gouvernement [FLAG]
Représentant du plaignant
M. Alain Comtois
(membre, Front de libération contre les abus du gouvernement [FLAG])
Mis en cause
La Voix de l’Est
[Granby] et M. Richard Gosselin (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Jean-Guy
Dubuc (président et éditeur, La Voix de l’Est [Granby])
Résumé de la plainte
Dans l’article
«Accusés d’enlèvement : Deux Granbyens sous les verrous», paru le 20 mai 1988
dans La Voix de l’Est, le journaliste Richard Gosselin traite d’accusations
portées contre M. Sylvain Lessard en rapportant que celui-ci est le fondateur
du Front de libération contre les abus du gouvernement (FLAG), alors qu’il
n’existe aucun lien entre le FLAG et les agissements reprochés à l’inculpé. Le
journaliste mentionne l’implication de M. Lessard dans le FLAG dans un second
article paru le 9 juin sous le titre «La prison pour deux Granbyens accusés de
séquestration et d’extorsion», malgré la publication le 21 mai d’une mise au
point dans laquelle le FLAG se dissocie des gestes posés par M. Lessard.
Griefs du plaignant
Le Conseil a terminé
l’étude de la plainte de monsieur Alain Comtois, membre du groupe de pression
Front de libération contre les abus du gouvernement [FLAG], contre le
journaliste Richard Gosselin et le quotidien La Voix de l’Est concernant un
article publié le 20 mai 1988 rapportant que monsieur Sylvain Lessard avait été
incarcéré à la suite de son inculpation pour une affaire d’enlèvement.
Monsieur Comtois
reprochait au journaliste d’avoir mentionné que monsieur Lessard était le
fondateur du FLAG, alors qu’il n’y avait aucune relation entre les faits et
gestes pour lesquels ce dernier était accusé et le groupe de pression.
Considérant
cette mention injuste, monsieur Comtois décidait d’exprimer son mécontentement
au journal, qui publiait, le lendemain, une rectification à l’effet que le FLAG
se dissociait «entièrement de tout acte, parole ou geste» posé par l’accusé
dans l’affaire pour laquelle il était incarcéré.
Monsieur Comtois
s’en prenait également au journaliste pour avoir à nouveau fait cette mention
dans un article publié le 9 juin 1988 et ce, malgré la rectification du 21 mai.
Cet article rapportait que monsieur Lessard avait été condamné à une peine de
quatre ans de prison pour une affaire de séquestration et d’extorsion.
Commentaires du mis en cause
M. Richard
Gosselin, journaliste, La Voix de l’Est
En réponse à
cette plainte, le journaliste Richard Gosselin faisait d’abord remarquer que
monsieur Lessard avait acquis la notoriété publique, en septembre 1987, lors
d’une conférence de presse du FLAG où il s’était identifié comme le fondateur
du groupe de pression.
Ayant ainsi
accédé au rang de «personnage public», monsieur Lessard devait par conséquent,
selon le journaliste, «s’attendre à voir sa vie et son passé scrutés à la
loupe». Il ajoutait qu’en s’affichant ainsi, monsieur Lessard se rendait, lui
et son organisme, vulnérable. Concernant l’article rapportant l’incident ayant
mené monsieur Lessard devant les tribunaux, le journaliste Richard Gosselin
soutenait qu’il était essentiel de situer l’accusé «dans la société et que les
lecteurs sachent» qu’il était la même personne que le fondateur du FLAG.
Monsieur
Gosselin disait enfin qu’il ne pouvait déceler «aucune malice à l’égard du FLAG
ou de ses membres» dans les articles qu’il avait signés et que ceux-ci
rapportaient fidèlement et honnêtement les faits.
M. Jean-Guy
Dubuc, président et éditeur, La Voix de l’Est
Commentant cette
plainte, monsieur Jean-Guy Dubuc ne voyait aucun manque d’éthique
professionnelle de la part du journaliste. Il considérait que ce dernier n’avait
fait que «répondre à une attente normale du lecteur face au nom d’un personnage
public» et qu’il avait «même évité de faire un parallèle entre l’accusation
devant les tribunaux et l’activité sociale de l’accusé».
Monsieur Dubuc
faisait par ailleurs remarquer que La Voix de l’Est avait publié un entrefilet
précisant que le FLAG se dissociait entièrement des gestes posés par monsieur
Lessard, dans l’éventualité où un «doute pouvait subsister dans l’esprit d’un
lecteur». Il estimait enfin que le FLAG et son initiateur avaient été
correctement traités par La voix de l’Est.
Analyse
Le traitement d’une nouvelle relève du jugement rédactionnel des médias et des journalistes qui doivent livrer une information conforme aux faits et aux événements.
Les choix qu’ils exercent lors de ce traitement doivent toutefois se faire dans un esprit d’équité et de justice. La véracité des faits et leur degré d’intérêt public sont deux critères qui doivent guider les choix rédactionnels, à fortiori lorsque des informations publiées ou diffusées risquent de porter atteinte à la réputation de personnes ou de groupes.
Il relève de la responsabilité des médias de trouver les meilleurs moyens pour corriger leurs erreurs, procéder à des mises au point ou apporter des précisions nécessaires. Ils doivent également le faire de façon à remédier pleinement aux torts qui ont pu être causés lorsque cela est possible.
Dans le cas présent, le Conseil considère que le journaliste n’a pas outrepassé la latitude qui était sienne en mentionnant l’appartenance de monsieur Lessard au Front de libération contre les abus du gouvernement [FLAG]. L’article n’établit aucun lien entre ce groupe et les présumés faits et gestes de l’accusé dans l’affaire qui était rapportée.
Le Conseil estime par ailleurs que le journal a fait preuve de responsabilité en publiant, le lendemain, une précision spécifiant que le FLAG se dissociait entièrement de tout geste posé par l’accusé dans ladite affaire, afin que soient dissipés tout doute ou toute ambiguïté chez les lecteurs.
Le Conseil reproche toutefois au journal et au journaliste d’avoir mentionné à nouveau l’appartenance de monsieur Lessard au FLAG dans un article publié trois semaines plus tard, sans que soit précisée également la position du groupe de pression à l’endroit de ce dernier.
Analyse de la décision
- C12B Information incomplète
- C17D Discréditer/ridiculiser
- C19A Absence/refus de rectification