Plaignant
M. Michel
Lachance (policier) et le Syndicat professionnel des policiers de Grand-Mère
Représentant du plaignant
M. Pierre St-Arnaud
(avocat, Fédération des policiers du Québec)
Mis en cause
CHEM-TV [TVA,
Trois-Rivières] et M. Gaston Langlois (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Glenn P.
O’Farrell (vice-président, affaires publiques, réseau Pathonic)
Résumé de la plainte
Dans un reportage
diffusé le 3 août 1988, le journaliste Gaston Langlois de CHEM s’acharne à
discréditer et à ridiculiser le policier Michel Lachance du Service de police
de Grand-Mère, en raison de l’équipement que celui-ci porte lors de
l’arrestation de deux évadés de prison.
Faits
Le 3 août 1988,
le journaliste Gaston Langlois de la station de télévision CHEM fait un
reportage sur l’équipement porté par le policier Michel Lachance, du Service de
police de Grand-Mère, lors de l’arrestation de deux évadés d’un pénitencier.
Le 24 août 1988,
le Syndicat professionnel des policiers de Grand-Mère formulait une plainte au
Conseil de presse contre CHEM et le journaliste pour avoir discrédité et
ridiculisé le travail du policier Lachance dans ledit reportage.
Griefs du plaignant
Monsieur Pierre
St-Arnaud, au nom du Syndicat et du policier Michel Lachance, rappelait d’abord
les faits. Il indiquait que deux individus «extrêmement dangereux», armés d’un
pistolet Colt 45, s’étaient évadés d’un pénitencier, que leur présence avait
été signalée à Grand-Mère, et que le sergent Lachance s’était alors rendu sur
les lieux «revêtu d’une veste pare-balle et armé d’un fusil mitrailleur,
équipement fourni par l’employeur, la ville de Grand-Mère».
Monsieur
Saint-Arnaud disait que le journaliste s’était «acharné tout au long de son
reportage» à discréditer et à ridiculiser le policier à cause de l’équipement
qu’il portait, alors qu’il ne faisait qu’effectuer son «travail normal de
policier dans les circonstances».
Rien ne
justifiait le journaliste, selon monsieur Saint-Arnaud, de faire des
commentaires comme le suivant: «le sergent Lachance, avec apparat du style
Rambo épate la galerie et encore plus les membres du groupe d’intervention
tactique de la Sûreté du Québec qui n’en font pas autant dans des situations
beaucoup plus dramatiques». Il estimait que le journaliste «aurait dû savoir
que les policiers utilisent, dans le cadre de leur fonction, des vestes
pare-balle et des armes de fort calibre».
Considérant ce
reportage «malicieux, partial et fait de mauvaise foi», monsieur Saint-Arnaud
disait que celui-ci avait eu pour conséquence de ternir la réputation du
sergent Lachance et de nuire à son travail.
Il indiquait que
de tels reportages «biaisés et incomplets» avaient des conséquences graves sur
le travail des policiers en général, et ajoutait: «Comment voulez-vous qu’ils
attirent le respect de la population lorsqu’on les ridiculise ainsi
ouvertement».
Il faisait
remarquer que les policiers se devaient de protéger le public avec tous les
moyens mis à leur disposition lorsqu’ils sont à la recherche de récidivistes
dangereux, d’évadés de prison, et de surcroît armés.
Commentaires du mis en cause
M. Glenn P.
O’Farrell Vice-président – Affaires publiques, Pathonic
En réponse à
cette plainte, monsieur O’Farrell rejetait «catégoriquement les prétentions» de
monsieur Saint-Arnaud car les commentaires du journaliste Gaston Langlois ne
faisaient que «traduire, en parole, l’information qu’évoquent et transmettent
les images enregistrées et présentées» au soutien du reportage.
Indiquant que
les événements faisant l’objet de celui-ci avaient été présentés tels qu’ils
s’étaient déroulés, monsieur O’Farrell disait que la présence du sergent Lachance,
dans le cadre du reportage, se faisait «plutôt remarquer» en raison de sa tenue
vestimentaire, de sa conduite et de son «état d’anxiété apparent».
Il précisait que
cette présence se démarquait de celle des autres policiers sur place, et que le
journaliste avait rapporté objectivement les événements en spécifiant en quoi
la présence du policier Lachance était distinctive.
Monsieur
O’Farrell ajoutait que les témoignages recueillis sur les lieux de l’événement
supportaient et corroboraient les commentaires du journaliste, confirmant ainsi
le «caractère juste, équitable et factuel du traitement de l’information».
Réplique du plaignant
Monsieur Pierre
Saint-Arnaud rejetait les affirmations de monsieur Glenn P. O’Farrell.
Analyse
Le choix du sujet d’un reportage relève de la liberté rédactionnelle des médias et des professionnels de l’information.
Dans le cas qui nous intéresse ici, la station de télévision CHEM-TV était libre de faire un reportage sur l’équipement porté par le policier Michel Lachance lors de l’arrestation de deux évadés de prison armés.
Le Conseil blâme cependant CHEM-TV et le journaliste Gaston Langlois pour avoir manqué de rigueur en confondant information et opinion. En effet, ces derniers ne se sont pas limités à rapporter les faits, mais les ont qualifiés de manière à discréditer et à ridiculiser le policier Michel Lachance en utilisant des commentaires tels que: «plus prêt que prêt et armé jusqu’aux dents», «arme redoutable portée fièrement», «le sergent Lachance, avec apparat du style Rambo», «s’adresse aux citoyens avec un ton qu’un général d’armée n’utiliserait même pas avec ses hommes». Ces commentaires informent davantage sur l’opinion du journaliste que sur les faits qu’il rapporte.
Analyse de la décision
- C03A Angle de traitement
- C20A Identification/confusion des genres