Plaignant
Le Conseil des
usagers des médias de la Sagamie [CUMS]
Représentant du plaignant
M. Robert
Paradis (coordonnateur, Conseil des usagers des médias de la Sagamie [CUMS])
Mis en cause
Le Quotidien
[Chicoutimi] et Le Journal Extra [Chicoutimi]
Représentant du mis en cause
M. Gaston Vachon
(ex-président-directeur général, Imprimerie Le Progrès du Saguenay
[Chicoutimi]) et M. Bertrand Genest (directeur de la rédaction, Le Journal
Extra [Chicoutimi])
Résumé de la plainte
Le Quotidien
fait paraître deux publi-reportages présentés comme des articles d’information
et insuffisamment identifiés, le 17 novembre 1988 sous le titre «Lunetteries
New Look Inc. se porte acquéreur de Guy Rouleau Opticien : Retour de Andy
Dépatie sur la scène locale», et le 1er mai 1989 sous le titre «Une étoile du
design chez Mobilier Jeannois». Le Journal Extra n’identifie pas le
publi-reportage «Comment je me suis assuré un revenu de 8 000 $ par mois en 2
jours…», paru dans son édition du 14 février 1989.
Griefs du plaignant
Le Conseil a
terminé l’étude de trois plaintes du Conseil des usagers des médias de la Sagamie
[CUMS] contre Le Quotidien, Le Journal Extra et leur éditeur, l’Imprimerie Le
Progrès du Saguenay, concernant des publi-reportages publiés les 17 novembre
1988, 14 février et 1er mai 1989.
1. Première
plainte: Publi-reportage publié le 17 novembre 1988 dans Le Quotidien
Dans le premier
cas, le CUMS, par l’entremise de son coordonnateur, monsieur Robert Paradis,
reprochait au Quotidien et à son éditeur d’avoir insuffisamment identifié une
publicité titrée «Lunetteries New Look Inc. se porte acquéreur de Guy Rouleau
Opticien: Retour de Andy Dépatie sur la scène locale».
Monsieur Paradis
qualifiait de «dérisoire» la petite mention «Publi-reportage» inscrite sous la
photo accompagnant le texte publicitaire. Il s’en prenait également au fait que
cette publicité était présentée comme un article d’information. Il considérait
que les défendeurs «tentaient» d’induire les lecteurs en erreur en «déguisant
ainsi une publicité en texte d’information».
2. Deuxième
plainte: Publi-reportage publié le 14 février 1989 dans Le Journal Extra
Dans le deuxième
cas, le CUMS reprochait au Journal Extra d’avoir publié un publi-reportage
titré «Comment je me suis assuré un revenu de 8 000 $ par mois en 2 jours… »
sans avoir signalé aux lecteurs qu’il s’agissait d’une publicité. Monsieur
Paradis faisait remarquer que le journal risquait, en omettant d’identifier
cette annonce, d’induire le public en erreur sur la nature de l’inforamtion qui
lui était présentée.
3. Troisième
plainte: Publi-reportage publié le 1er mai 1989 dans Le Quotidien
Dans le
troisième cas, le CUMS estimait que la présentation du publi-reportage titré
«Une étoile du design chez Mobilier Jeannois» pouvait laisser croire aux
lecteurs qu’ils étaient en présence d’un article d’information.
Monsieur Paradis
disait qu’il y avait une ressemblance «pour le moins frappante» entre la
présentation de ce publi-reportage et celle de l’article d’information publié
dans la même page. Il faisait remarquer que les deux textes étaient encadrés,
qu’ils étaient placés sur trois colonnes et que leurs titres étaient sur deux
lignes.
Monsieur Paradis
était également d’avis que la publicité attirait davantage l’attention des
lecteurs que l’article d’information. Il signalait à cet effet que le caractère
typographique de celui-ci et du titre qui le coiffait était plus petit que
celui des textes publicitaires, et qu’il ne bénéficiait pas de la présence
d’une photographie comme c’était le cas pour l’annonce.
Après
considération de ces aspects, monsieur Paradis croyait que la mention
«publi-reportage» placée à la toute fin du texte publicitaire ne suffisait pas
à «informer convenablement» les lecteurs qu’ils se trouvaient en présence d’une
annonce publicitaire.
Commentaires du mis en cause
1. Première plainte:
Publi-reportage publié le 17 novembre 1988 dans Le Quotidien
M. Gaston
Vachon, ex-président-directeur général, Imprimerie Le Progrès du Saguenay
En réponse à
cette plainte, monsieur Vachon soumettait d’abord une lettre que monsieur
Bertrand Genest, directeur de la rédaction du Quotidien, du Progrès-Dimanche et
du Journal Extra, lui adressait le 16 décembre 1988. Monsieur Genest disait
dans cette lettre qu’une erreur technique s’était glissée dans l’édition du 17
novembre 1988 concernant cette annonce.
Indiquant que la
mention «Publi-reportage» «était si petite que seuls les lecteurs avertis ont
pu la voir», monsieur Genest expliquait que cette publicité n’avait pas été
conçue par les graphistes du Progrès du Saguenay qui eux «identifient clairement
et adéquatement» les publi-reportages et que l’erreur avait échappé à
l’attention du contremaître de la production.
Monsieur Genest
faisait cependant remarquer que le directeur des ventes avait apporté une précision
dans l’édition du 18 novembre 1988, et que l’annonce avait de nouveau été
publiée, le 20 novembre 1988, dans le journal Progrès-Dimanche avec, cette
fois, les corrections appropriées.
Note: Les
lecteurs étaient priés, dans cette précision, de prendre note que le texte en
question était un publi-reportage et non une nouvelle du Service de la
rédaction.
Monsieur Vachon
précisait ensuite que le publi-reportage était de la publicité payée, et non de
la publicité déguisée comme le mentionnait le CUMS dans sa plainte.
Il tenait par
ailleurs à certifier que les personnes en autorité au Quotidien étaient des
gens compétents et conscients de leur responsabilité envers leurs lecteurs et
leurs annonceurs. Il ajoutait que l’éthique professionnelle était respectée
dans les journaux du Progrès du Saguenay et que ceux-ci n’avaient pas besoin
«d’anges gardiens» pour leur rappeler.
2. Deuxième
plainte: Publi-reportage publié le 14 février 1989 dans Le Journal Extra
M. Bertrand
Genest, directeur de la rédaction, Le Journal Extra
En réponse à
cette plainte, monsieur Genest disait que le journal avait pris bonne note de
la plainte du CUMS sur l’omission d’identifier cette publicité, «même si le
caractère d’imprimerie était différent de celui utilisé par le Service de la
rédaction».
Monsieur Genest
indiquait que la direction de l’entreprise Le Progrès du Saguenay n’avait pas
l’intention d’induire ses lecteurs en erreur. Il signalait que l’atelier et les
services de la publicité avaient été informés à plusieurs reprises de
l’importance de distinguer les matières publicitaires des matières
rédactionnelles, mais que des erreurs pouvaient «se glisser occasionnellement,
surtout lorsque les annonces [leur] sont soumises par les agences nationales».
Réplique du plaignant
1. Première
plainte: Publi-reportage publié le 17 novembre 1988 dans Le Quotidien
Monsieur Paradis
répliquait d’abord à l’explication qu’une erreur technique s’était glissée dans
cette publicité lors de sa publication le 17 novembre 1988. Il considérait
«inacceptable qu’une telle erreur ait pu déjouer toutes les vérifications et
tous les contrôles qu’implique la publication d’un journal».
Monsieur Paradis
se disait ensuite d’avis que la précision du Service de la publicité, publiée
dans l’édition du 18 novembre 1988, n’avait pas été placée dans un endroit
adéquat, puisqu’il était reconnu qu’un tel correctif devait se retrouver dans
un espace aussi «avantageux» que le texte litigieux.
Il estimait que
le publi-reportage du 17 novembre avait bénéficié d’un endroit privilégié dans
le journal, soit la page neuf qui «suit immédiatement la page réservée aux
commentaires», aux lettres des lecteurs et aux dossiers, alors que la précision
avait été publiée à la page trente-cinq dans laquelle se trouvaient les
sommaires des parties de hockey de la veille.
Il faisait
remarquer, reprenant l’expression des défendeurs, que «seuls les lecteurs
avertis du Quotidien» avaient pu prendre connaissance du correctif, puisque
celui-ci était «perdu à travers les résultats sportifs».
Monsieur Paradis
s’en prenait également au fait que la précision n’avait pas été identifiée
comme telle, comme le veut «généralement [l’]usage», et que les lecteurs
n’avaient eu «droit qu’à un bref rappel du titre du publi-reportage de la
veille».
Quant à l’explication
que le publi-reportage en cause n’avait pas été conçu par les graphistes du
Progrès du Saguenay, monsieur Paradis répliquait: «depuis quand au juste un
journal n’est plus responsable du matériel publicitaire qu’il publie parce
qu’il recourt à des « prêts-à-photographier »».
Enfin, à la
remarque des défendeurs que le publi-reportage en cause était de la publicité
payée, et non de la publicité déguisée en information, monsieur Paradis se
demandait si un publi-reportage insuffisamment identifié ne constituait pas une
«tentation de déguisement d’une publicité en texte d’information».
2. Deuxième
plainte: Publi-reportage publié le 14 février 1989 dans Le Journal Extra
Répliquant à ces
commentaires, monsieur Paradis soutenait que l’utilisation d’un caractère
d’imprimerie différent de celui du Service de la rédaction ne suffisait pas à
«informer convenablement» le lecteur qu’il se trouvait en présence d’un texte
publicitaire et non d’un article d’information.
Monsieur Paradis
considérait que les responsables du journal n’avaient pas respecté le principe
selon lequel les médias doivent identifier clairement les textes publicitaires.
Analyse
Il est contraire à l’éthique de publier du matériel publicitaire de façon telle qu’il puisse être confondu avec le contenu journalistique des médias. Il est par conséquent nécessaire d’identifier clairement les publi-reportages, afin que soient respectées les distinctions qui s’imposent entre publicité et information. Un manquement à cet égard a pour effet d’induire le public en erreur et de compromettre la crédibilité des journalistes et des médias concernés auprès du public.
Le Conseil blâme les journaux concernés et leur éditeur pour avoir publié des publi-reportages sans avoir établi, dans le premier et le troisième cas, une distinction claire entre ceux-ci et le contenu rédactionnel du journal et, dans le deuxième cas, sans avoir identifié le publi-reportage comme étant une publicité.
Le Conseil note cependant que Le Quotidien et son éditeur ont agi, dans le premier cas, avec diligence pour informer les lecteurs que le publi-reportage du 17 novembre 1988 était une publicité et non un article d’information en publiant, le lendemain, un rectificatif à cet effet.
Le Conseil note également, dans le deuxième cas, que l’atelier et le Service de publicité du Journal Extra ont été informés à plusieurs reprises sur l’importance de distinguer les textes publicitaires des articles d’information. Le Conseil ne peut qu’encourager les défendeurs à faire de tels rappels aux services concernés, afin de réduire le plus possible les erreurs en la matière.
Etant donné qu’il a reçu plus d’une plainte de cette nature, le Conseil invite l’éditeur et ses journaux à mettre en place une procédure de contrôle serrée afin que de telles erreurs ne se répètent plus.
Enfin, le Conseil estime qu’à l’avenir, les journaux devraient identifier les publi-reportages par la mention «publicité» plutôt que par l’expression «publi-reportage», et que cette mention devrait être mise en évidence, afin de s’assurer que les lecteurs sachent qu’il ne s’agit pas d’un reportage.
Analyse de la décision
- C19A Absence/refus de rectification
- C21A Publicité déguisée en information