Plaignant
Le Mouvement
raélien canadien
Représentant du plaignant
M. Victor Le
Gendre (président et guide national, Mouvement raélien canadien)
Mis en cause
CJMS-AM
[Radiomutuel, Montréal] et M. Proulx, Gilles
Résumé de la plainte
Le 23 avril
1992, dans le cadre de l’émission « Le Journal du Midi » de CJMS,
l’animateur Gilles Proulx mène une entrevue avec un porte-parole du Mouvement
raélien en recourant au sensationnalisme, en utilisant des méthodes de travail
incorrectes, en faisant preuve de partialité, en avançant de l’information non
conforme aux faits, en utilisant une attitude et un ton offensants, et en se
laissant guider par ses préjugés.
Faits
La plainte
concerne les propos et l’attitude adoptée par l’animateur Gilles Proulx lors
d’une entrevue diffusée dans le cadre de l’émission « Le Journal du
Midi » du 23 avril 1992. M. Proulx y interviewait alors M. Michel Beluet,
porte-parole du Mouvement raélien. Quelques jours auparavant, le Mouvement
raélien offrait, dans le cadre d’un kiosque tenu au Cégep Ahuntsic, des
informations aux étudiants sur la méditation sensorielle.
Griefs du plaignant
Le Mouvement raélien,
par la voix de M. Victor Le Gendre, alors président et guide national du
Canada, dénonce les propos et l’attitude de M. Proulx lors de cette entrevue
avec M. Beluet. Selon M. Le Gendre, M. Proulx a alors manqué à l’éthique
journalistique en recourant au sensationnalisme, en utilisant des méthodes de
travail incorrectes, en faisant preuve de partialité, en avançant de
l’information non conforme aux faits et aux événements, en utilisant une
attitude et un ton offensants et en se laissant guider par ses préjugés.
M. Le Gendre
accuse de plus M. Proulx de fourberie, en expliquant que les personnes de CJMS
qui les avaient contactées avaient laissé entendre qu’il s’agissait d’une autre
émission que celle de M. Proulx. On accuse aussi M. Proulx d’avoir fermé le
micro à quelques reprises pour induire M. Beluet en erreur et l’entraîner à
répondre de façon incorrecte à des questions que M. Beluet croyait complètes
mais qui, de fait, ne l’étaient pas.
Le Mouvement
raélien dit n’avoir eu, de la direction de CJMS, aucune réponse à sa demande de
bénéficier d’un nouveau temps d’antenne, avec un nouvel animateur, pour y
exprimer plus librement leur point de vue.
Commentaires du mis en cause
Dans une lettre
au Conseil de presse, M. Gilles Proulx déclare en faisant évidemment allusion
au fondateur du groupe « Comment puis-je ne pas me moquer d’un gars qui est
monté dans une soucoupe volante pour aller lever un toast avec Jésus-Christ,
Mahomet et Bouddha!!! ».
L’animateur dit
s’être limité à « inviter les gens à se servir de la dérision dans un
contexte où la libre circulation de la bêtise fait remplir des salles pour
mieux les exploiter… ».
La direction de
CJMS n’a pour sa part fourni aucune autre réponse.
Analyse
Les animateurs d’émissions d’affaires publiques jouissent d’une grande latitude dans la conduite de leur émission et dans l’expression de leurs opinions.
Cette liberté ne les soustrait toutefois pas aux devoirs qui incombent à tout professionnel de l’information. S’ils doivent évidemment éviter de faire preuve de complaisance, les professionnels de l’information doivent toutefois afficher un minimum de respect envers leurs interlocuteurs. Ils doivent ainsi éviter d’adopter des attitudes méprisantes et laisser s’exprimer les interlocuteurs suffisamment pour que le public soit bien éclairé et à même de se faire une opinion sur le sujet abordé et le point de vue exprimé par les personnes interviewées. Si le discours de l’un ou de l’autre des interlocuteurs présente des incohérences, le public sera en mesure de le détecter.
Dans le cas présent, le Conseil estime que M. Gilles Proulx a manqué à l’une et l’autre de ces règles fondamentales:
– par sa persistance à déformer le nom de son interlocuteur pour l’appeler M. Bleuet, M. De Bleuet, allant même jusqu’à le traiter de « tarte »;
– par ses interruptions constantes qui ont complètement empêché son interlocuteur de s’exprimer;
– par son appel au technicien à « passer les oiseaux » à son invité et les bruits incongrus (murmures, rires, bruit de chasse d’eau, clochettes, gargarisme, musique, etc…) qui ont accompagné l’entrevue.
Le Journal du Midi se qualifiant d’émission d’affaires publiques, l’étude du dossier nous amène à constater que M. Proulx a abusé de la latitude dont il disposait à titre d’animateur. L’attitude et les propos tenus lors de cette entrevue ne sont respectueuses ni envers l’invité ni envers le public, à qui on ne donne guère la chance de se faire lui-même une opinion. A ce titre, M. Proulx et la station CJMS méritent un blâme du Conseil de presse.
Par ailleurs, le Conseil ne peut se prononcer, faute de pouvoir vérifier le bien-fondé des reproches du Mouvement raélien, sur la façon dont M. Proulx a obtenu l’entrevue ni sur le supposé tripotage (ou manipulation) technique qui aurait accompagné celle-ci.
Enfin, en ce qui concerne le droit de réplique demandé par le plaignant, le Conseil rappelle que, malgré la piètre qualité du traitement fait par l’animateur, ceci ne lui donne pas droit automatiquement à un droit d’antenne égal à celui pour lequel il se sent lésé.
Analyse de la décision
- C09A Refus d’un droit de réponse
- C13B Manipulation de l’information
- C15J Abus de la fonction d’animateur
- C23D Tromper sur ses intentions