Plaignant
Mme Nathalie
Tremblay
Représentant du plaignant
M. Pierre Fortin
(avocat, Doyon, Fortin 1/4 Associé)
Mis en cause
CHRC-AM
[NTR/Télémédia, Québec], Mme Myriam Ségal et M. André Arthur (animateurs)
Représentant du mis en cause
M. André Fleury
(directeur général, CHRC-AM [NTR/Télémédia, Québec])
Résumé de la plainte
Le 7 juillet
1993, les animateurs André Arthur et Myriam Ségal tiennent des propos
insultants à l’égard de la plaignante sur les ondes de CHRC. M. Arthur lit
intégralement sa lettre de démission et donne son adresse, ce qui lui cause
d’importants désagréments. La plaignante, qui vit de l’aide sociale, a
auparavant participé à une émission au cours de laquelle un homme d’affaires
lui a proposé un travail. Elle s’est attirée les foudres des animateurs en
quittant cet emploi, alors qu’elle s’était plainte de ne pas réussir à en
trouver un.
Faits
La plainte
concerne des propos tenus en ondes par M. André Arthur et Mme Myriam Ségal au
sujet de Mme Nathalie Tremblay, la plaignante dans le présent dossier, lors de
l’émission matinale André Arthur du 7 juillet 1993.
Griefs du plaignant
M. Pierre
Fortin, avocat, pour le compte de Mme Nathalie Tremblay, reproche le traitement
fait à sa cliente lors de l’émission du 7 juillet 1993. Il relate d’abord que:
– préalablement
à l’émission du 7 juillet 1993, M. André Arthur «a, au cours de ses émissions
matinales pris à partie toute la classe des assistés sociaux, les traitant de
tous les noms, exerçant une désinformation systématique et démagogique à
l’endroit de cette partie de la population»;
– qu’avant le 6
juillet 1993, Mme Nathalie Tremblay «a communiqué avec M. André Arthur sur les
ondes pour défendre les assistés sociaux, étant elle-même une jeune assistée
sociale»; et a fait valoir que malgré ses recherches pour trouver un emploi,
ses efforts étaient demeurés vains;
– que lors de
cette émission, un homme d’affaires a téléphoné à CHRC et a offert sur les
ondes un emploi à Mme Tremblay, mais que cette dernière a dû démissionner peu
de temps après pour des raisons de santé et sur recommandation de son médecin;
– que le 7
juillet 1993, l’employeur s’est plaint sur les ondes et a exposé sa «version
tronquée des faits».
M. Fortin
indique que c’est alors que M. Arthur «a entrepris le salissage public de (sa)
cliente, sans respect ni retenue». Il reproche particulièrement le fait que la
lettre de démission de Mme Tremblay a été lue intégralement sur les ondes et
que son adresse a été mentionnée. Avec pour conséquence que celle-ci «a reçu
quantité d’appels anonymes et de lettres menaçantes et insultantes lui ayant
causé d’importants préjudices».
M. Fortin
reproche donc le traitement fait à sa cliente lors de cette émission, et fait
valoir «que la tribune téléphonique ne doit pas servir à susciter la vindicte
populaire contre une part importante de la population».
Commentaires du mis en cause
En réponse à
cette plainte, M. André Fleury, directeur général de CHRC, indique que, après discussion
avec M. André Arthur et Mme Myriam Ségal, «nous en sommes venus à la conclusion
que l’autorité qui nous sanctionne est le CRTC. Nous n’estimons pas devoir
rendre des comptes à d’autres organismes».
M. Fleury
signale par ailleurs que la plaignante, dans la plainte qu’elle a déposée au
Conseil de presse, «escamote plusieurs éléments» et que «Elle nous (CHRC) a
d’ailleurs menti et a abusé de nos auditeurs au moment où, de bonne foi, nous
tentions de contrer les préjugés envers les assistés sociaux».
M. Fleury
remarque enfin que: «Nous déplorerions que (le Conseil de presse prenne) dans
cette affaire une décision qui nous porterait préjudice, et que nous devrions
contester devant les instances appropriées».
Analyse
Les chroniqueurs et les commentateurs de la radio jouissent d’une grande latitude dans la conduite de leur émission et dans l’expression de leurs opinions et points de vue sur les sujets et les événements de leur choix.
Ils doivent exercer cette latitude dans le respect des personnes et des groupes et éviter à leur endroit des propos offensants, discriminatoires et propres à les discréditer indûment auprès de l’opinion publique. Ils doivent également être fidèles aux faits et faire preuve de rigueur dans l’évaluation des situations qu’ils commentent; et respecter leurs interlocuteurs et leurs opinions.
Après examen de la transcription de l’extrait de l’émission du 7 juillet 1993, versée au dossier public de CHRC au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, le Conseil conclut ce qui suit:
Considérant que la plaignante, Mme Nathalie Tremblay, a utilisé la tribune téléphonique de l’émission de M. André Arthur (au début du mois de juin 1993) pour faire valoir son point de vue sur les assistés sociaux et manifester sa volonté de trouver un emploi; qu’un travail lui a été offert sur les ondes de CHRC et qu’elle a accepté celui-ci, M. Arthur, Mme Myriam Ségal et CHRC étaient en droit, par la suite, d’accorder un suivi à cette affaire et de tenter de faire la lumière sur les raisons de l’échec de leur intervention relativement à l’emploi qu’elle avait obtenu.
Le Conseil ne retient par ailleurs pas les griefs de la plaignante concernant la lecture en ondes de sa lettre de démission, puisque celle-ci a été fournie à la station CHRC par son ex-employeur.
Le Conseil blâme toutefois M. Arthur d’avoir divulgué en ondes l’adresse de Mme Tremblay. En plus de n’être d’aucun intérêt public et de n’ajouter rien à la question discutée lors de cette émission, la plaignante risquait d’être inquiétée. Les lettres de menaces versées au dossier témoignent d’ailleurs des conséquences négatives qui ont découlé de cette diffusion.
La teneur de la présente décision s’adresse également à la station CHRC. Le Conseil déplore par ailleurs le manque de collaboration des défendeurs dans le présent dossier, lequel est contraire à l’ouverture à la critique dont les médias devraient faire preuve.
Analyse de la décision
- C02C Accorder un suivi à une affaire
- C16C Publication de l’adresse/téléphone
- C16D Publication d’informations privées
- C24A Manque de collaboration