Plaignant
M. Gilles
Rhéaume
Mis en cause
La Société
Radio-Canada [Montréal] et RDI [Montréal]
Représentant du mis en cause
M. Claude
Saint-Laurent (directeur général des programmes (information TV), Société
Radio-Canada [Montréal])
Résumé de la plainte
La Société
Radio-Canada et RDI accordent une couverture partiale à la campagne
référendaire québécoise de 1995, comme en témoignent plusieurs exemples
d’émissions diffusées au début du mois d’octobre 1995. Le Conseil de presse du Québec
devrait se pencher sur la politique et les pratiques de ces chaînes, et faire
un bilan hebdomadaire de leur couverture de cette campagne.
Faits
Cette plainte
porte sur des événements médiatiques précis rapportés par la SRC et RDI; elle est
déposée par M. Gilles Rhéaume.
Griefs du plaignant
Le 12 octobre,
M. Rhéaume présente sa plainte au Conseil de presse en l’étayant de diverses
références tendant à prouver la partialité de la SRC et RDI dans le traitement
de la campagne référendaire.
Il reproche à la
Société Radio-Canada d’avoir rediffusé en l’espace d’une semaine (29 septembre
au 9 octobre) une même émission sur les conséquences de la partition de la
Tchécoslovaquie.
Selon le
plaignant, le 6 octobre, au cours de l’émission Capital Actions, l’animateur,
M. Claude Beauchamp aurait mentionné aux auditeurs que son émission serait
interrompue pour une bonne cause, le discours de M. Jean Chrétien aux tenants
du NON à Shawinigan.
RDI pour sa part
aurait diffusé au cours de l’émission L’Ontario en direct, du 11 octobre, une
interview avec M. Pommainville, préfet ontarien, qui prédisait «un exode de
plus d’un million de Québécois vers l’Ontario advenant un OUI, le 30 octobre».
Selon le plaignant, il s’agissait d’une thèse hystérique que Radio-Canada ne
pouvait estimer sérieuse.
M. Rhéaume
considère que RDI et la SRC ont diffusé presque sans arrêt depuis le début du
mois d’octobre 1995 d’innombrables images des événements d’octobre 1970. Selon
lui, il s’agit d’une décision arbitraire et discriminatoire, qu’il reproche à
Radio-Canada et à RDI.
Le plaignant
ajoute aussi qu’au cours de l’émission Référendum aujourd’hui (émission faisant
la revue des événements référendaires du 11 octobre 1995), le NON aurait été
prédominant et il reproche à la SRC de privilégier constamment le camp du NON.
Le plaignant
termine sa plainte en demandant au Conseil de presse du Québec de se pencher
sur l’état précité, sur la politique et les pratiques médiatiques référendaires
de ladite société depuis le début de la campagne. De même, il suggère au
Conseil de presse du Québec de procéder chaque semaine à un bilan de la
couverture médiatique de la campagne référendaire, et ce, à l’instar de la
France qui durant les campagnes électorales produit une grande émission d’information
durant laquelle deux chronomètres sont installés afin de minuter le temps
consacré à chaque groupe, publiquement comptabilisé.
Commentaires du mis en cause
La Société
Radio-Canada répond des griefs retenus par M. Rhéaume, le 20 octobre, en la
personne de son directeur général des programmes (Information Télévision), M.
Claude Saint-Laurent.
En ce qui
concerne la rediffusion de l’émission Le Point, c’est une pratique courante de
la SRC, relevant de sa «liberté éditoriale». M. Saint-Laurent note que face à
certains reportages il est normal que le téléspectateur l’interprète
différemment selon son option politique.
Quant à la
réflexion de M. Beauchamp, au cours de son émission du 6 octobre, elle ne
faisait que prévenir le téléspectateur de l’interruption de l’émission sans
mentionner M. Chrétien. A ce titre, il cite:
«Ce soir, notre
émission sera écourtée, mais ce sera pour une bonne cause: une émission
spéciale du Réseau de l’information dans le cadre de sa couverture de la
campagne référendaire.»
Pour ce qui est
de l’intervention de M. Pommainville dans l’émission L’Ontario en direct, il
est seul responsable de ses propos. RDI estime qu’il était légitime de
l’inviter. Il est à noter que l’animatrice n’a fait preuve d’aucune
complaisance face aux idées de M. Pommainville. Au contraire, l’animatrice
s’est efforcée de faire la part des choses, notamment en questionnant M.
Pommainville sur l’existence d’études sérieuses qui pourraient étayer son point
de vue.
M. Saint-Laurent
fait remarquer que si de nombreux reportages concernant les événements de 1970
ont été diffusés c’est parce que l’on fête cette année leur 25e anniversaire.
Il ajoute qu’actuellement est diffusée une série d’émissions intitulées
Canada-Québec: une histoire en question, abordant l’histoire générale du
Canada.
«Une analyse
rigoureuse» de l’émission Le Référendum aujourd’hui, diffusée le 11 octobre, a
montré que le OUI occupait 40,2% du temps d’antenne contre 35,6% pour le NON.
Parmi les participants à l’émission, 17 représentaient le camp du OUI (45% du
temps d’antenne) contre 11 pour le camp du NON (43,4% du temps d’antenne). M.
Saint-Laurent tient à faire remarquer que c’est sur l’ensemble de la série
d’émissions que la chaîne cherche à établir l’équilibre des points de vue. Il
ajoute que l’émission quotidienne Le Référendum aujourd’hui est analysée à tous
les jours pour que des correctifs immédiats soient apportés en cas de
déséquilibre ponctuel.
En conclusion,
la Société Radio-Canada estime que la perception de M. Rhéaume de son travail journalistique
est lourdement faussée par son option politique. Cette plainte est donc sans
fondement.
Réplique du plaignant
Le plaignant n’a
pas transmis au Conseil de presse de réplique aux commentaires des mis-en-cause
dans les délais impartis.
Analyse
Au visionnement des émissions mises en cause par le plaignant, il est apparu au Conseil de presse:
1) que la rediffusion, en période référendaire au Québec, d’une même émission sur les conséquences de la partition de la Tchécoslovaquie constituait une initiative intéressante, du fait notamment qu’on y trouvait les perspectives des Slovaques, des Tchèques et de personnes ou de groupes autant opposés que partisans de la partition, sans compter qu’on faisait des parallèles plus qu’intéressants avec le Québec, mettant en évidence ce qui se comparait bien et ce qui ne se comparait pas;
2) que le commentaire de M. Beauchamp, lors de l’émission Capital Actions du 6 octobre 1995, était anodin et sans conséquence réelle sur l’actualité référendaire, se référant à une intervention du premier ministre du Canada, à Shawinigan, se référant à une émission spéciale du réseau de l’information dans le cadre de la couverture de la campagne référendaire;
3) que la déclaration de M. Pommainville, à l’effet qu’un million de Québécois pourraient vouloir déménager, déclaration faite lors des émissions L’Ontario en direct et Le Référendum aujourd’hui, du 11 octobre, avait été mise en contexte par l’animatrice;
4) que la présentation d’images des événements d’octobre 1970 était à-propos, étant donné qu’il s’agissait de commémorer le 25e anniversaire des événements d’octobre 1970. On n’arrête pas l’histoire parce qu’il y a référendum.
Le Conseil de presse rejette donc l’ensemble de la plainte de M. Gilles Rhéaume et considère que Radio-Canada et RDI ont fait preuve d’éthique journalistique dans l’ensemble des reportages soumis à l’étude par le plaignant, au Conseil de presse du Québec.
Le Conseil de presse tient à répondre à M. Rhéaume à l’effet qu’il n’est pas dans son mandat de procéder pendant une campagne électorale à un bilan de la couverture médiatique et de suggérer des techniques favorisant l’équité.
Analyse de la décision
- C02A Choix et importance de la couverture
- C24D Hors mandat