Plaignant
Sylvain Demers
Mis en cause
Guy Roy, journaliste, et Le
Journal de Montréal (Paule Beaugrand-Champagne, rédactrice en chef)
Résumé de la plainte
Me Martial Fillion porte plainte,
au nom de son client, Sylvain Demers, contre le journaliste Guy Roy du Journal
de Montréal, et sa rédactrice en chef, Paule Beaugrand-Champagne, suite à
l’article paru le vendredi 13 novembre 1998, intitulé : » Deux experts en
bombe à tuyau arrêtés « . Le plaignant accuse le journaliste d’avoir
produit » des allégations qui sont inexactes » sur son client, Sylvain
Demers. Il a d’abord mis en demeure le journal de se rétracter; la lettre
expédiée à cet effet au journal est utilisée à nouveau, pour la présente
plainte.
Griefs du plaignant
Selon Me Martial Fillion, le
journaliste semble » relier » M. Demers à deux attentats à la bombe;
il laisserait » planer des doutes considérables sur les incendies qui ont
eu lieu au restaurant Lanni « . Or, Me Fillion prétend, à ce sujet, que son
client » n’a jamais été accusé de ces délits « . Il rappelle que ce
dernier a été acquitté de l’accusation d’attentat contre une voiture, évoqué
également dans l’article. Me Fillion affirme ensuite que les effets découverts
par les policiers, lors d’une perquisition, n’appartenaient pas à M. Demers
mais au locataire du logement, à l’exception d’un fusil de calibre 12. Enfin,
le dernier point contesté concerne la possession ou le trafic de drogues : M.
Demers n’aurait jamais été accusé de ces délits dans ces dossiers.
L’avocat et son client demandent
aux mis-en-cause » de […] se rétracter « . Ils considèrent que le
journal aurait dû faire paraître les deux versions des faits. N’ayant pas
obtenu satisfaction en s’adressant directement au journal, il porte plainte
devant le Conseil de presse.
Commentaires du mis en cause
Les commentaires de la rédactrice
en chef indiquent les sources d’information qui ont permis au journaliste de
rédiger son article sur l’affaire en cause; il s’agit du commandant Douglas
Hurley, responsable des crimes contre la propriété du Service de police de la
communauté urbaine de Montréal (SPCUM) et du lieutenant-détective Michel
Bonneville, de la section des incendies criminels de la SPCUM. Les mis-en-cause
évoquent des propos tenus lors d’une conférence de presse donnée par la police
de la CUM et qui ont été rapportés par d’autres journaux. Pour étayer ces
propos, un article du journal La Presse, couvrant le même sujet et daté
du même jour, est joint aux commentaires.
Paule Beaugrand-Champagne revient
sur le détail des accusations réfutées par le plaignant. Elle rappelle que
Sylvain Demers a été » formellement inculpé le 12 novembre d’une kyrielle
d’accusations […] « . L’argument invoqué pour ne pas se rétracter est le
suivant : » Que la majorité de toutes ces accusations aient été retirées
[…] ne change rien au fait que ces accusations ont bel et bien été portées au
Palais de Justice de Montréal […] lors de la comparution des deux
suspects ». La rédactrice en chef précise que s’ils avaient «
été informés du retrait des accusations » ils auraient pu en parler
comme d’une nouvelle information.
Enfin, sur les » doutes «
concernant la participation de Sylvain Demers à des incendies criminels, Mme
Beaugrand-Champagne rapporte la formulation exacte de l’article : la «
section des incendies criminels de la police de la CUM croit que … « .
Pour ces raisons, la rédactrice en chef du Journal de Montréal conteste
toutes les accusations portées dans la présente plainte.
Réplique du plaignant
Les plaignants n’ont pas fait de
réplique aux commentaires.
Analyse
Le plaignant, Sylvain Demers, a fait l’objet d’un certain nombre d’accusations majeures au moment de son arrestation. Aux yeux du Conseil de presse, les médias d’information, dont LeJournal de Montréal, étaient alors justifiés d’en faire état, d’autant plus que les crimes dont on accusait M. Demers s’inscrivent dans le contexte de la violence exercée par les groupes de motards criminalisés.
Les informations publiées dans la présente affaire par Le Journal de Montréal et d’autres journaux provenaient de sources officielles et crédibles, soit deux membres de la direction du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, à l’occasion d’un point de presse. L’arrestation du plaignant et sa comparution en justice ne se prêtaient pas, comme évoqué avec pertinence par les mis-en-cause, au recueil de la version du plaignant.
En revanche, le Conseil considère que Le Journal de Montréal avait le devoir d’assurer un suivi rigoureux de l’information. Le Conseil rappelle que la presse doit accorder autant d’importance à l’acquittement d’un prévenu qu’à son inculpation ou à sa mise en accusation.
Aussi, en regard de tous ces éléments, le Conseil de presse rejette-t-il les griefs concernant l’exactitude de l’information, mais retient celui ayant trait au suivi inadéquat de la procédure judiciaire entourant le dossier.
Analyse de la décision
- C02C Accorder un suivi à une affaire
- C11B Information inexacte
- C12C Absence d’une version des faits