Plaignant
Michel Brûlé, éditeur
Mis en cause
Jean Barbe, chroniqueur et ici
(Anne-Marie Cadieux, rédactrice en chef)
Résumé de la plainte
Michel Brûlé, éditeur, porte
plainte contre Jean Barbe suite à son article intitulé » Une petite merde
« , paru dans l’édition du magazine ici du 11 février 1999.
L’auteur de la chronique y dénonce
vertement la supercherie de l’écrivain Maxime Roussy. Celui-ci avait réussi à
attirer son attention en se faisant passer pour une jeune écrivaine suicidaire
qui prétendait qu’elle ferait parvenir ses manuscrits à des éditeurs avant sa
mort imminente. L’auteur envoyait des lettres accompagnées d’un bulletin, l’Acouphène,
à différents journalistes sous le pseudonyme de M. St-A.
Jean Barbe mettait en cause
conjointement Maxime Roussy et Michel Brûlé, son éditeur, à propos duquel il
écrivit : » il n’est pas à sa première merde « .
Griefs du plaignant
M. Brûlé considère que M. Barbe
» s’est livré […] à du règlement de comptes » (les deux hommes se
connaissant depuis le cégep).
Il affirme avoir été calomnié :
Jean Barbe laisserait sous-entendre que l’éditeur était à l’origine de
l’opération ; celui-ci prétend pour sa part n’avoir connu l’identité de
l’auteur qu’en décembre 1998.
M. Brûlé réagit également aux
critiques faites contre son auteur, critiques qu’il juge particulièrement
» mesquines » : interpellant Maxime Roussy, le chroniqueur se
demandait d’où provenait le sang tachant sa dernière lettre et affirmait que
l’auteur était parvenu à se rendre » détestable » en » un seul
livre « . Selon l’éditeur, Maxime Roussy a voulu se faire remarquer par les
médias en profitant de leur » attrait pour le sensationnalisme « .
De plus, M. Brûlé accuse le journal
ici par le biais de sa rédactrice en chef, Mme Anne-Marie Cadieux, de
l’avoir censuré lors de son droit de réponse : celle-ci lui avait promis, au
téléphone, de ne couper qu’un seul paragraphe de son texte et trois d’entre eux
furent enlevés en fin de compte : il s’agissait de la partie répondant
« aux attaques personnelles » à son endroit.
Enfin, M. Brûlé regrette que M.
Barbe ait taxé cette affaire de » fraude intellectuelle et morale «
dans une réponse qu’il lui a adressée.
Commentaires du mis en cause
Anne-Marie Cadieux, rédactrice en
chef du journal ici, tient pour évident que Michel Brûlé a usé d’un
« subterfuge pour attirer l’attention des médias sur sa publication
» et que par conséquent il ne devrait pas protester contre les mauvaises
réactions faisant suite à cette » méchante blague « .
Quant au droit de réponse de M.
Brûlé, elle estime qu’il a été » similaire à celui alloué à tous les
auteurs de lettres ouvertes » et que si une partie a été enlevée, c’est
qu’elle était hors propos.
Réplique du plaignant
L’éditeur Michel Brûlé réaffirme ne
pas avoir connu l’identité de son auteur avant décembre 1998. Cependant, il
avoue approuver l’initiative de celui-ci.
Selon lui, les lettres de M. St-A.
étaient » délirantes » et » pratiquement impossible(s) » à
croire. Il accuse Jean Barbe » d’avoir manqué au code d’éthique
journalistique à deux égards « : il aurait fait preuve de démagogie
en décrivant M. Roussy comme un » manipulateur » et aurait porté
contre lui des » attaques […] blasphématoires et indignes d’un journaliste
« .
Enfin, il attire à nouveau
l’attention sur le fait qu’Anne-Marie Cadieux ait supprimé son droit de réponse
de façon plus importante que prévu.
Analyse
La chronique et la critique sont des genres journalistiques qui laissent à leurs auteurs une grande latitude dans l’expression de leurs points de vue et de leurs jugements. La chronique vise à permettre l’expression d’opinions et elle tient autant de l’éditorial et du commentaire que du reportage d’information.
Dans le cas présent, l’éditeur Michel Brûlé adresse plusieurs reproches à l’encontre de Jean Barbe, suite à son article intitulé » Une petite merde » paru dans le magazine ici. Il lui reproche d’avoir porté contre lui une accusation erronée : être à l’origine de la supercherie de Maxime Roussy. Malheureusement, ni le plaignant, ni le mis-en-cause ne joignent de preuve à leurs affirmations. Le Conseil de presse ne pourrait donc se prononcer à ce sujet sans risque de tomber dans le procès d’intention.
Il en va de même pour le reproche de partialité à l’endroit du chroniqueur. Rien ne permet d’affirmer assurément que le chroniqueur a cherché à régler des comptes personnels, malgré la virulence de ses propos. Le chroniqueur s’est permis de critiquer Michel Brûlé sur l’ensemble de son travail. Cependant, ce dernier a largement pu se défendre. En effet, le magazine ici a fait preuve de largesse d’esprit en permettant à l’éditeur non seulement de donner son point de vue dans ses pages, mais aussi de critiquer vivement le travail d’un de ses chroniqueurs. La seule censure effectuée dans le texte de Michel Brûlé était légitime car elle a consisté à ôter les passages contenant des attaques personnelles déplacées contre Jean Barbe.
Aussi, au regard de ces considérations, le Conseil de presse rejette-t-il sur le fond la présente plainte.
Analyse de la décision
- C09B Droit de réponse insatisfaisant
- C11B Information inexacte
- C13A Partialité
- C17D Discréditer/ridiculiser