Plaignant
Me Réal Goulet
Mis en cause
Me Richard Morand,
animateur, et CKAC-AM / émission « En
toute justice » (Michel Vincent, directeur de l’information)
Résumé de la plainte
Me Réal Goulet porte plainte contre le radiodiffuseur
CKAC de Montréal ainsi que contre Me
Richard Morand, animateur de l’émission radiophonique « En toute justice »,
diffusée le 21 août 2000 entre 8 heures et 9 heures.
Afin de conserver son anonymat, une dame s’identifiant sous le nom de
Gisèle, téléphone à ladite émission pour demander conseil à Me Morand
concernant les services rendus par l’Aide juridique. Gisèle explique qu’elle
est représentée par un de ses avocats, Me Goulet. Elle se dit insatisfaite du
service et désire changer d’avocat.
Griefs du plaignant
Me Goulet estime que lors de l’appel, Me Morand a trop
insisté pour que Gisèle dévoile le nom de son avocat. Selon le plaignant, il y
a eu atteinte à la réputation en divulguant le nom de l’avocat. De plus, Me
Goulet allègue qu’il y a eu insouciance de la part de
CKAC d’un côté, dans la façon avec laquelle la station de radio a
présenté les services de l’aide juridique et d’autre part en mettant en doute
la compétence professionnelle de Me Goulet. Le plaignant ajoute que le recours
proposé par Me Morand à Gisèle lui apparaît tout à fait inapproprié étant donné
sa méconnaissance du dossier.
Commentaires du mis en cause
Me Perreault,
avocate de la station CKAC AM (Radiomédia), rappelle que lors de
l’émission, l’animateur reçoit plusieurs appels de citoyens ayant des problèmes
de tout genre liés au domaine juridique. Sa principale préoccupation est de
servir l’intérêt des citoyens en leur donnant des conseils. Concernant l’appel
de Gisèle, les mis-en-cause précisent qu’elle avait librement choisi d’exposer
son problème et de dévoiler le nom de son avocat puisqu’elle était mécontente
de ses services. Ils sont d’avis que les seuls détails personnels concernaient
la vie privée même de Gisèle. Me Perreault mentionne que pour Me Morand, le but
était d’obtenir des informations pour venir en aide à Gisèle et non pas de
soulever une question de débat. Selon Me Morand, il était prudent de demander
l’identification de l’avocat de Gisèle, notamment pour éviter que celle-ci se
rapporte à des situations hypothétiques et que l’entrevue ne dérape. Il
importait donc de l’inciter à mesurer ses propos pour qu’elle s’en tienne aux
faits afin que survienne un examen juridique ainsi que des recommandations
appropriées aux circonstances.
Réplique du plaignant
Me Goulet réitère que c’est suite aux pressions de Me Morand
que Gisèle a dévoilé l’identité de son avocat. Il lui apparaît que Me Morand a
conclu trop rapidement aux procédures d’injonctions. De plus, il soutient que
si le but de celui-ci était de donner de bons conseils, il n’aurait certes pas
conclu à une injonction. Le plaignant considère que l’entrevue s’est vite
transformée en critique de conduite de l’avocat et que les mis-en-cause n’ont
certes pas eu la préoccupation de servir l’intérêt des citoyens.
Analyse
L’émission «En toute justice» appartient au genre journalistique de la tribune téléphonique, est un genre assimilable à l’information. Cette émission comporte des difficultés particulières. Celles-ci découlent principalement du caractère de spontanéité de ces émissions et du fait que les animateurs sont souvent dépendants des interventions du public. Ce genre d’émission confère aux animateurs une grande latitude qui leur permet de faire appel à la polémique, les obligeant à d’autant plus de vigilance à l’égard de l’éthique journalistique.
Dans le présent cas, le Conseil estime que nul ne peut empêcher un citoyen d’aller sur la place publique pour y raconter sa vie intime ou ses problèmes. Cependant, l’auditrice se présentant sous le pseudonyme de Gisèle n’a finalement consenti à dévoiler l’identité de son avocat que sous l’insistance de l’animateur Richard Morand. Le Conseil voit là un paradoxe entre l’anonymat d’une auditrice cautionné par CKAC et l’insistance indue de son animateur pour connaître le nom de l’avocat de l’auditrice anonyme.
De l’avis du Conseil, pareille insistance était tout à fait déplacée de la part de Me Morand, à l’égard de son collègue juriste et risquait de porter atteinte à la réputation de ce dernier. Par surcroît, la teneur des propos de l’animateur a également eu pour effet de mettre en doute, de façon arbitraire, la compétence de Me Goulet.
Aussi, pour ces raisons, le Conseil de presse retient la plainte de Me Réal Goulet contre le radiodiffuseur CKAC de Montréal et Me Richard Morand, animateur de l’émission «En toute justice ».
Analyse de la décision
- C15D Manque de vérification
- C16B Divulgation de l’identité/photo
- C17G Atteinte à l’image