Plaignant
Léo N. J. Maisonneuve
Mis en cause
Paul Carpentier, journaliste, et L’Écho de
Cantley (Steve Harris, président)
Résumé de la plainte
Monsieur Léo
N. J. Maisonneuve porte plainte contre le mensuel communautaire L’Écho de
Cantley, un journal mensuel communautaire, et le journaliste Paul
Carpentier, concernant l’une des rubriques publiées le 11 décembre 2002 dans la
page«Affaires municipales». Cette rubrique traite d’un projet
d’aménagement d’un réseau des eaux usées dans un secteur de la municipalité de
Cantley. Selon le plaignant, l’information rapportée manque de rigueur et
d’impartialité, lui prête de fausses intentions, porte atteinte à sa réputation
et à sa vie privée, et nécessite une rétractation de la part du journal.
Griefs du plaignant
La plainte de M.
Maisonneuve porte sur l’une des rubriques de monsieur Paul Carpentier, parues
le 11 décembre 2002 dans la page «Affaires municipales » du
mensuel communautaire L’Écho de Cantley.* Cette rubrique, titrée « Projet
Lafortune », se retrouve parmi celles couvrant la session du 3 décembre 2002 du
conseil municipal de Cantley. Les griefs du plaignant concernent plus
spécifiquement le passage suivant (en souligné) :
« […] le conseil a adopté une résolution mandatant maître Michel
Lafrenière pour contester une amende de $250.00 imposée au maire Michel
Charbonneau et au conseiller Richard Dompierre par le bureau du directeur des
élections suite à une plainte déposée par monsieur Léo Maisonneuve contre le
déroulement de la signature du registre lors de l’adoption du règlement
d’emprunt pour mettre en œuvre le projet de collecte des eaux usées dans le
secteur Lafortune. Monsieur Maisonneuve espérait, par sa plainte, faire annuler
le processus de signature du registre et le règlement d’emprunt, mais n’a
réussi qu’à drainer une partie des taxes des contribuables dans des frais
légaux. »
Le plaignant,
qui estime que le journaliste Paul Carpentier devrait «se limiter à
rapporter les nouvelles municipales », lui reproche de lui prêter de fausses
intentions et de porter atteinte à sa réputation et à sa vie privée. D’une
part, il fait valoir que les plaintes déposées auprès du Directeur général des
élections du Québec doivent demeurer confidentielles. D’autre part, il estime qu’il
a manqué de rigueur en laissant croire qu’il est le seul plaignant auprès de
cette instance relativement à cette affaire.
Il reproche
également à M.Carpentier d’avoir manqué d’impartialité et d’avoir publié
une information fausse en écrivant que son but était de faire annuler ce
règlement d’emprunt et de gaspiller les fonds publics en frais légaux.
Pour ces
raisons, le plaignant estime que L’Écho de Cantley devrait publier une
rétractation.
*
L’Écho de Cantley est un
journal communautaire publié par une corporation à but non lucratif. Ce journal
est membre de l’Association des médias écrits communautaires du Québec (AMECQ).
Tous leurs journalistes travaillent bénévolement pour fournir des nouvelles
politiques et communautaires aux résidents de Cantley.
Commentaires du mis en cause
Commentaires
du journaliste Paul Carpentier de l’Écho de Cantley:
En réponse à
cette plainte, M. Carpentier signale que M. Maisonneuve est un politicien qui
s’implique dans la communauté depuis ses débuts en politique municipale. Il
indique que M. Maisonneuve a récemment porté son attention sur le projet
Lafortune «en y introduisant la controverse comme il le fait
occasionnellement depuis qu’il a été défait lors des dernières élections ».
M. Carpentier
dit avoir été présent à la mairie lors de la dernière heure de la signature des
registres pour l’emprunt relativement à ce projet afin de pouvoir en publier
les résultats dans la parution du surlendemain. Il rapporte que le plaignant,
lorsque le directeur général a annoncé les résultats, a dit: « Ce n’est
pas fini. Nous passerons au plan B et
ce projet ne se fera pas. »
Le journaliste
signale que lors d’une autre réunion du conseil municipal, au cours de laquelle
le maire et un conseiller demandaient au conseil d’approuver le recours à un
avocat pour contester un avis d’amende qu’ils avaient reçu du Directeur général
des élections du Québec, il a demandé au maire quelle était la raison de cet
avis d’amende. Le maire lui aurait répondu que cette demande était le résultat
d’une plainte déposée auprès du Directeur général des élections du Québec par
M. Villeneuve, que ce dernier en avait déjà prévenu la presse électronique
régionale et qu’il (le maire) avait été bombardé par les médias le matin même
où il avait reçu cet avis d’amende. M. Carpentier joint à ses commentaires deux
courriels du plaignant qui témoigne du caractère politique de ses activités
relativement à ce dossier.
Commentaires
du président de l’Écho de Cantley, Steve Harris:
M. Steve Harris
estime que l’article du journaliste Carpentier contient des « commentaires
raisonnables » du fait que M. Maisonneuve participe à la politique municipale
depuis plus d’une décennie: il a
été conseiller municipal à la suite des élections de 1992 et de 1996, il a
perdu celles de 1989 et de 2000 et il est toujours très actif dans la politique
municipale quotidienne de Cantley.
M. Harris
signale que le plaignant milite depuis quelques mois dans un groupe qui
s’oppose au projet Lafortune, qu’il a participé à une campagne en vue de rallier
des gens pour signer le registre municipal contre ce projet, et qu’il était
présent lors de la collecte des signatures du registre.
Le président du
journal estime que les commentaires de M. Carpentier n’affectent aucunement la
réputation et la vie privée du plaignant. Il est d’avis que ce sont là des
commentaires auxquels tout politicien doit s’attendre lorsqu’il participe à des
campagnes politiques controversées, et que ceux-ci ne sont ni diffamatoires ni
excessifs. Il ajoute que M. Carpentier a simplement exprimé son interprétation
des faits et que cela semble déplaire au plaignant.
Quant au mérite d’une rétractation, M.
Harris fait remarquer que le plaignant n’a qu’à écrire une lettre ouverte au
journal s’il veut donner sa version des faits.
Réplique du plaignant
M. Maisonneuve répond aux commentaires de
M. Steve Harris en précisant qu’il n’est plus du tout actif en politique
municipale depuis le 5 novembre 2000. Il lui apparaît que le journal semble lui
imputer tout blâme relativement aux avis d’amende que le Directeur général des
élections du Québec a émis au maire et à l’un des conseillers municipaux. Il
ajoute que le journal n’a aucun droit de nuire à sa réputation en lui prêtant
de fausses intentions.
Analyse
L’information communiquée au public fait nécessairement l’objet de choix rédactionnels et subit un traitement journalistique suivant divers modes appelés genres journalistiques. Ces genres, de même que la façon de présenter l’information, relèvent du jugement et des prérogatives des médias et des professionnels de l’information, qui sont par ailleurs tenus de respecter les faits en tout temps.
La rubrique «Affaires municipales » tient à la fois du reportage et de la chronique. Le journal et le journaliste Paul Carpentier sont en droit de traiter l’information sous la forme de courts textes et de présenter dans une même page de brèves nouvelles événementielles, des comptes rendus succincts des décisions du conseil municipal et des projets de la municipalité, ainsi que des commentaires sur certains des sujets ou événements rapportés.
Dans le cas présent, le journaliste était en droit d’émettre un commentaire et de présenter son interprétation des faits quant à ce qui a pu motiver le plaignant à déposer une plainte auprès du Directeur général des élections du Québec (DGEQ) à propos du déroulement de la signature du registre municipal dans le cadre du projet Lafortune.
Concernant le commentaire du journaliste selon lequel « Monsieur Maisonneuve espérait, par sa plainte (auprès du DGEQ), faire annuler le processus de signature du registre et le règlement d’emprunt, mais n’a réussi qu’à drainer une partie des taxes des contribuables dans des frais légaux », il y a lieu de souligner que le plaignant s’est impliqué activement, voire assuré un certain leadership dans le mouvement d’opposition au projet Lafortune. De plus, si le plaignant a agi à titre de citoyen dans ce dossier, il est pertinent de mentionner que M. Maisonneuve s’implique dans la politique municipale depuis des années. Il a été candidat à quatre élections, dont la dernière en 2000, et il a siégé précédemment comme conseiller municipal durant deux mandats.
Considérant les activités politiques du plaignant, notamment dans le contexte controversé du projet Lafortune, le commentaire du journaliste Paul Carpentier ne s’avère ni excessif ni abusif. Le Conseil estime que ce commentaire ne peut être considéré comme étant une attaque à la réputation du plaignant ni un manque d’impartialité à son égard.
Toutefois, le plaignant n’étant pas la seule personne à avoir déposée la plainte auprès du Directeur général des élections du Québec, ni le seul citoyen à s’opposer audit projet, le journaliste aurait dû nuancer son propos afin d’éviter de personnaliser cette affaire.
Le Conseil rejette par ailleurs le grief selon lequel le journaliste aurait manqué de respect eu égard à la vie privée du plaignant. D’une part, aucune information de nature privée n’a été publiée au sujet du plaignant. D’autre part, en réponse à son argument selon lequel les plaintes déposées auprès du DGEQ doivent demeurer confidentielles, notons que cette plainte est devenue publique à partir du moment où le DGEQ a signifié un constat d’infraction et émis un avis d’amende au maire de Cantley et à l’un des conseiller municipaux en novembre 2002.
Enfin, le Conseil considère qu’il n’y a pas matière à rétractation de la part de L’Écho de Cantley tel que le soutient le plaignant.
Au-delà de la réserve susmentionnée concernant la personnalisation de cette affaire, le Conseil de presse ne peut accueillir les griefs du plaignant. Par conséquent, le Conseil rejette la plainte de monsieur Léo N. J. Maisonneuve contre le journaliste Paul Carpentier et L’Écho de Cantley.
Analyse de la décision
- C13A Partialité
- C15A Manque de rigueur
- C16D Publication d’informations privées
- C17A Diffamation
- C19A Absence/refus de rectification