Plaignant
M. Timothy Clark
Mis en cause
Mme Constance Boudreault, présidente et éditrice et l’hebdomadaire The First Informer
Résumé de la plainte
M. Timothy Clark soutient que Mme Constance Boudreault serait en conflit d’intérêts car elle serait non seulement journaliste au First Informer, mais aussi présidente, éditrice et responsable des ventes. De plus, il reproche au journal de publier des informations inexactes et des lettres de lecteurs non signées. Il invoque que le journal s’acharne indûment sur sa personne en écrivant des articles le concernant sans jamais tenter d’obtenir sa version des faits.
Griefs du plaignant
M. Timothy Clark reproche à Mme Constance Boudreault, présidente et éditrice de l’hebdomadaire The First Informer, de publier des lettres de lecteurs anonymes et de l’information inexacte. De plus, il reproche au journal d’avoir écrit plusieurs articles sur lui sans jamais avoir tenté d’obtenir sa version des faits. Et finalement, M. Clark juge que Mme Boudreault serait en conflit d’intérêts puisqu’elle occuperait les postes de présidente, d’éditrice, de journaliste et de responsable des ventes.
Il affirme que les noms des administrateurs du conseil d’administration du First Informer apparaissant au Registraire des entreprises du Québec sont inexacts. Ces membres ne seraient pas ceux qui y siègeraient présentement.
Le plaignant fait une liste des griefs reprochés sur 15 articles.
1. L’article intitulé « Bang, Bang, Out Went the Borough, In With the New », publié dans l’édition du 21 octobre 2005 aurait été écrit hors contexte. Mme Boudreault aurait travesti l’information. Le plaignant affirme qu’il était présent lors de l’assemblée dont l’article fait état, il ajoute que Mme Boudreault n’aurait pas raconté ce qui se serait déroulé et aurait omis des informations vitales. M. Clark ajoute que d’autres personnes assistant à l’assemblée pourraient attester de sa version des faits. Ces personnes auraient d’ailleurs demandé au First Informer de réécrire l’article. à cette date, l’éditrice n’aurait pas répondu à leur demande.
2. Ce commentaire intitulé « The Bravado of the pack », publié dans l’édition du 21 octobre 2005 ferait référence à l’article du point 1 et ne serait pas signé. Le plaignant y voit un manque éthique. Un commentaire, selon lui, devrait être signé.
3. Cette lettre à l’éditeur publiée dans l’édition du 4 novembre 2005, ne comporte aucune signature. M. Clark juge que les lettres à l’éditeur devraient être signées et mentionner le lieu de résidence du signataire.
4. L’article « Community Table Faces Complaint », publié dans l’édition du 18 février 2006 représenterait un conflit d’intérêts car, selon le plaignant, Mme Boudreault, auteure de l’article, ainsi que Douglas Clark (membre du conseil d’administration du First Informer) seraient membres de l’organisme cité dans l’article.
5. L’article « CEDEC Chairman – Asserts Leadership », publié dans l’édition du 28 mars 2006 concerne l’organisme le CEDEC, ce qui placerait Mme Boudreault, auteure de l’article, en conflit d’intérêts étant donné que cette dernière y siègerait; ce qui amènerait un doute sur l’impartialité de l’information.
6. L’article « Kids Pay Price for « Priceless » Municipality », publié dans l’édition du 3 mars 2006 n’est pas signé. Selon le plaignant, la phrase suivante serait fausse : « Municipality of Grosse Isle will not give the customary eight hundred dollar donation for the spring garbage pick-up to the student council » (La municipalité de Grosse-île ne donnera pas le 800 $ habituel pour l’événement du ramassage de déchets au printemps organisé par le conseil étudiant). Le plaignant est conseiller municipal et affirme que la municipalité donnera les 800 $ pour cet événement. Il considère que l’auteur de l’article aurait dû contacter la Ville pour vérifier les faits.
7. L’article « Presidents Report – 2005 », publié dans l’édition du 7 avril 2006 contiendrait de fausses affirmations. L’article mentionnerait « In 2005, paid subscribers to the paper was six hundred. […] After several months of hard work, circulation was incrieased to 800 » (En 2005 les abonnés au journal était au nombre de 600. Après plusieurs mois de travail, le tirage est passé à 800 copies). Le plaignant souligne que cette information est fausse car le Canadian Community Newspaper Association – CCNA aurait enregistré 489 abonnés et 622 copies du journal en circulation. De plus, l’article rapportait de façon erronée le nombre des personnes qui auraient voté à cette assemblée.
Le plaignant relève la phrase suivante : « The financial situation still remains unstable, as it has for many years ». Cette information, dit-il, servira pour le grief soulevé au point 13, où le journal l’accuserait de l’instabilité financière du journal.
8. L’article « Marlene Boudreault Recalled To Work – Grosse Ile », publié dans l’édition du 5 mai 2006, représenterait un conflit d’intérêts, car selon le plaignant, Mme Constance Boudreault, l’auteure de l’article, serait la mère de Marlene Boudreault.
9. M. Clark déplore que la lettre à l’éditeur publiée dans l’édition du 5 mai 2006 ne soit pas signée, qu’elle soit diffamatoire envers certains dirigeants municipaux de la communauté en plus d’insinuer de la fraude électorale. Il s’insurge contre le fait que Mme Boudreault publie des lettres si calomnieuses.
10. Cet avis intitulé « To all readers and subscribers » inséré dans les pages de l’édition du 19 mai 2006 contenait l’adresse courriel du plaignant. De plus, Mme Boudreault qualifiait la rencontre du conseil d’administration du journal, de canular. Le plaignant souligne qu’il n’a jamais permis au journal de divulguer son adresse courriel et que la rencontre n’était pas un canular.
11. L’article intitulé « Mink Causes Stink in Chicken Coop » publié dans l’édition du 9 juin 2006 concerne la ferme d’élevage de visons appartenant au plaignant et à un associé. Mme Boudreault n’aurait pas contacté le plaignant, ni son associé et aurait ainsi publié de fausses informations. De plus, l’article ne mentionnerait pas plusieurs détails reliés à l’événement. Le plaignant souligne que Mme Boudreault aurait mal cité ses propos tenus au cours d’une entrevue accordée à une station radiophonique. Finalement, l’article donnerait beaucoup d’informations, sur les visons, qu’il juge non nécessaires pour l’intérêt public.
11.1 Dans la même édition, le journal avait publié une lettre du plaignant. Ce dernier n’aurait jamais demandé à ce qu’elle soit publiée. De plus, l’éditrice a reproduit intégralement sa signature au bas de la lettre, ce qui ne se serait, à sa connaissance, jamais produit auparavant. En réplique à sa lettre, Mme Boudreault indiquait que la liste des membres du conseil d’administration du journal n’était pas disponible pour consultation. Cependant, selon le plaignant, la Loi sur les compagnies du Québec et le Code civil assurent que ces listes devraient être disponibles au public. Le plaignant dit douter qu’il y ait une vérification comptable des livres du journal, il n’y aurait, selon lui, qu’un relevé financier même si la présidente lui aurait déjà signalé que le journal payait pour la vérification de ses livres.
12. Une lettre à l’éditeur, publiée dans l’édition du 23 juin 2006, concernant le plaignant et son projet de ferme d’élevage de visons était signée GH. Pour publier une telle lettre contenant des insinuations malveillantes, le plaignant estime que le journal devrait exiger la signature de l’auteur. L’éditrice semblerait faire du favoritisme dans son choix de lettres publiées. à cet effet, le plaignant souligne que M. Gerard Huggins pourrait être le signataire de la lettre. Ce même M. Huggins serait aussi un employé du CEDEC et travaillerait avec Mme Boudreault qui siègerait aussi sur le CEDEC. Il y voit donc un conflit d’intérêts.
13. L’éditorial intitulé « Timothy Clark : A Whole Inappropriate Choice », publié dans l’édition du 30 juin 2006 est, selon le plaignant, le plus malicieux de tous les articles publié dans le journal et n’était pas signée. M. Clark considère l’éditrice responsable de cet article et invoque qu’elle aurait publié son opinion en se basant sur de fausses informations. Le plaignant explique que depuis qu’il est membre du conseil municipal, il a toujours fait part de son intérêt pour une ferme d’élevage de visons. En réponse aux accusations selon lesquelles sa ferme serait dommageable pour la communauté, ils les réfutent en soulignant qu’il n’a jamais eu de traitement de faveur parce qu’il était membre du conseil municipal.
De plus, ajoute-t-il, Mme Boudreault l’accuserait de toutes les décisions prises par le Conseil, ainsi que de la situation financière instable du journal. Il dit être le seul conseiller municipal à être continuellement pointé du doigt. Il assure que les décisions du conseil ne sont pas prises à la légère; elles sont discutées et décidées par l’ensemble des élus. Afin de démontrer ses reproches, il relève la phrase suivante : « The financial situation still remains unstable, as it has for many years », où le journal, dans l’éditorial du 30 juin, l’accuserait de l’instabilité de ce dernier. Il se sent personnellement attaqué par cet éditorial. à la suite de ce dernier, il dit devoir se défendre devant les gens de sa communauté qui lui demandent de commenter.
14. Dans la même édition, une autre lettre à l’éditeur a été publiée sans signature et concernait la Community Table sur lequel le plaignant venait juste d’être nommé. C’est incroyable, ajoute-t-il, qu’à presque toutes les semaines, de telles « ordures » soient publiées; il demande à Mme Boudreault de justifier ses actions.
En conclusion, il demande à ce que des mesures soient prises pour empêcher et corriger le comportement journalistique contraire à l’éthique de la présidente, éditrice, journaliste et responsable des ventes, Mme Constance Boudreault. Il se dit victime d’une campagne de salissage.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de M. Gerard Huggins, représentant la présidente et le conseil d’administration :
En premier lieu, M. Huggins souligne que cela appartient au First Informer de décider de son contenu. Le journal publie des articles qui, croit-il, devraient intéresser les lecteurs. Selon lui, il est évident que les lecteurs ne sont pas toujours d’accord avec les textes du journal, et il considère que c’est normal. Si un sujet est d’intérêt public, le journal en suivra de près les développements. Dans ce cas-ci, l’installation d’une ferme d’élevage de visons est un sujet qui doit être rapporté et publié.
M. Huggins mentionne que dans ses politiques, le journal se réserve le droit de ne pas divulguer le nom des gens qui envoient des lettres à l’éditeur, pour les protéger de possible harcèlement étant donné la petite taille de la communauté dans laquelle ils vivent.
Selon lui, M. Timothy Clark a mentionné son rôle de conseiller municipal et de membre du conseil d’administration de la Community Table pour légitimer sa plainte. Le Conseil du First Informer aimerait voir les documents permettant à ce dernier de se servir de ces organismes pour porter plainte au Conseil de presse. Selon M. Huggins, M. Clark serait un imposteur, il se serait lui-même nommé « President of The First Informer » dans une assemblée non approuvée, le 11 juin 2006. Par la suite, M. Clark aurait téléphoné à la présidente et lui aurait demandé de démissionner rapidement de son poste. La présidente lui aurait alors demandé de mettre sa demande par écrit pour qu’elle puisse en faire part au conseil d’administration. à cette date, M. Clark n’a pas donné suite.
M. Huggins ajoute que M. Clark doit, sans doute, être motivé par le fait que sa femme, Wendy Clark qui aurait par le passé travaillé de manière saisonnière au First Informer, serait sous enquête, par la Sûreté du Québec, pour tentative de fraude, après qu’elle ait essayé d’avoir accès à des informations dans les ordinateurs du journal. Mme Clark ne travaillait pas au journal à ce moment.
En conclusion, le conseil d’administration du First Informer considère la plainte de M. Clark frivole et non fondée.
M. Huggins répondra point par point aux griefs avancés par le plaignant :
1. L’article relatait avec exactitude le déroulement de la réunion du conseil municipal, en rapportant qu’à la fin, un grand désordre y régnait à la suite des interventions de Christopher Clark (maire de Grosse île) et frère du plaignant, qui aurait interrompu les procédures. Cela aurait engendré une demande d’arrêt de la réunion, par Gerard Huggins, au président du conseil. Les discussions corsées qui s’ensuivirent obligèrent le président à mettre un terme à la séance.
M. Huggins ajoute que M. Clark a envoyé une lettre au journal leur demandant de refaire l’article. Le First Informer a offert de publier le verbatim enregistré lors de l’assemblée. L’offre aurait été rejetée.
2. Bien que le First Informer n’ait pas de politique concernant les commentaires des lecteurs, le journal connaît toujours l’identité des auteurs et parfois publie ses propres commentaires.
3. Le First Informer a une politique concernant les lettres adressées à l’éditeur qui est publiée dans chaque édition. Cependant, le journal décide souvent de ne pas inscrire le nom des auteurs, à leur demande, pour les protéger du harcèlement qu’ils pourraient subir vu la petite communauté dans laquelle ils vivent. Les lettres originales sont conservées.
4. Selon M. Huggins, si M. Clark parle au nom de la Community Table, il demande à voir l’autorisation.
5. Même réponse qu’au point 4.
6. Les auteurs des articles ne sont pas toujours identifiés. En ce qui a trait aux reproches formulés par le plaignant à l’effet que la municipalité n’octroierait pas le montant de 800 $ prévu annuellement pour le conseil étudiant, il réfère au budget municipal de 2006. Le First Informer soutient l’exactitude de l’information qu’il publie.
7. M. Huggins affirme que le nombre d’abonnés et le nombre de copies en circulation sont exacts. Il réfère au CCNA.
8. Le First Informer rapporte des histoires qui vont intéresser ses lecteurs.
9. Même réponse qu’au point 3.
10. Le conseil d’administration du First Informer n’a jamais autorisé une réunion le 11 juin 2006.
11. Le First Informer a rapporté un incident qui s’est produit à Grande-Entrée, le 29 mai 2006. Les faits sont exacts. Selon M. Huggins, il n’est pas du ressort de M. Clark de décider de l’information que le public doit recevoir.
11.1 Le First Informer a le droit de publier les correspondances des lettres adressées au journal si cela a de l’intérêt pour le lecteur.
12. Même réponse qu’au point 3.
13. Le First Informer maintient sa position éditoriale dans le texte intitulé « Timothy Clark : A Whole Inappropriate Choice ».
14. Selon M. Huggins, si M. Clark parle au nom de la Community Table, il demande à voir son mandat.
Réplique du plaignant
M. Timothy Clark soutient que la réunion des membres du journal a été convoquée conformément aux procédures. Les membres souhaitaient exprimer leur désaccord avec le contenu du journal et voulaient faire changer les façons de faire. Il affirme avoir été élu président du journal à l’unanimité.
Deuxièmement, M. Clark considère que les propos selon lesquels son épouse serait sous enquête pour fraude sont une tentative pour la discréditer. Les faits ont été portés à la connaissance des forces policières et ont été jugés futiles et aucune accusation n’aurait été portée. M. Huggins aurait tout de même publié cette histoire dans le journal. M. Clark réfère à la Sûreté du Québec pour toutes informations concernant cette affaire.
Le plaignant affirme que M. Huggins et Mme Boudreault essaient de le discréditer ainsi que son épouse et tout cela pourrait être motivé par le fait que M. Huggins aurait été mis à pied de la Community Table. Cependant, M. Clark précise que ce n’était pas sa décision, même si M. Huggins l’en blâme.
M. Clark répond aux points commentés par M. Huggins :
1. Il affirme que la réunion s’est déroulée telle qu’il l’a décrite dans sa plainte et que plusieurs témoins pourraient le certifier. Le plaignant doute que le verbatim proposé par M. Huggins soit complet, car au lendemain de la réunion, Mme Boudreault aurait demandé à Mme Wendy Clark ce qui s’était dit et par qui, car elle n’avait pu enregistrer toute la réunion.
2. M. Clark maintient que tous les commentaires devraient êtres signés par leurs auteurs.
3. M. Clark maintient que les lettres des lecteurs devraient aussi être signées. La secrétaire du conseil d’administration du journal, Mme Davies aurait demandé qui avait signé la lettre et Mme Boudreault aurait refusé de le lui dire, même si Mme Davies est membre du conseil d’administration.
4. et 5. M. Clark mentionne qu’il n’a jamais dit qu’il parlait au nom de la Community Table et n’a aucune justification à donner à ce sujet. Dans cet article, il soulevait un conflit d’intérêts.
6. Le plaignant demandait seulement si les propos de l’article du point 6 était exacts.
7. Le plaignant maintient que l’information, tirée du CCNA, concernant le nombre exact de copies en circulation et d’abonnés sont justes. Il se demande si Mme Boudreault n’augmenterait pas volontairement le nombre d’abonnés pour pouvoir augmenter le prix des publicités. Il affirme qu’elle refuse de remettre la liste des abonnés, non seulement aux membres du conseil d’administration, mais aussi au CCNA.
8. M. Clark croit qu’une mère qui écrit un article sur sa fille est directement en conflit d’intérêts et spécialement lorsque cet article attaque les employeurs de sa fille.
9. Il trouve inadmissible qu’une lettre si outrageante puisse être publiée sans signataire.
10. Il maintient sa position à l’effet que son adresse courriel n’aurait pas du se retrouver au bas de l’avis, sans sa permission.
11. M. Clark souligne que les faits rapportés dans l’article sont inexacts. Il aurait payé une compensation au propriétaire des poules et le journal ne l’aurait pas approché pour avoir sa version de l’histoire.
11.1 Il se demande pourquoi Mme Boudreault a reproduit et publié sa signature. Il juge qu’il est le seul à pouvoir utiliser sa signature et décider s’il veut qu’elle apparaisse ou non sur des lettres qui peuvent être publiées.
12. Le First Informer publie peut-être une politique concernant les lettres des lecteurs, mais celle-ci semble changer dépendamment de l’auteur. La politique voulant que le journal protège l’auteur d’une lettre semble nouvelle, car son épouse ayant travaillé au journal pendant 12 ans, affirme qu’elle n’en a jamais entendu parler.
13. M. Clark réitère ses commentaires et dit croire qu’un éditorialiste doit être impartial et qu’un éditeur doit écrire les faits et non son opinion.
14. M. Clark mentionne qu’il n’a jamais dit qu’il parlait au nom de la Community Table et n’a aucune justification à donner à ce sujet. Il soulevait un conflit d’intérêts.
Analyse
L’attention que décident de porter les journalistes et les médias à un sujet ou à un événement particulier relève de leur jugement rédactionnel. Le choix et l’importance du sujet ou de l’événement, de même que la façon de le traiter, sont des décisions qui leur appartiennent en propre.
Cependant, ces choix doivent être uniquement faits en fonction du degré d’intérêt public de la nouvelle, et ils ne sauraient être dictés par des considérations étrangères au droit du public à une information exacte, équilibrée et honnête. Dans ce contexte, les professionnels de l’information ne doivent pas se laisser influencer par des inimitiés, des préjugés ou un parti pris à l’égard de personnes, de groupes ou de mouvements susceptibles d’être impliqués dans des événements d’intérêt public.
M. Timothy Clark exprimait plusieurs reproches en regard de quinze textes publiés par l’hebdomadaire The First Informer, parus entre octobre 2005 et juin 2006. Pour fins d’analyse, ces griefs ont été regroupés en quatre groupes : le manque d’exactitude, d’équilibre et de l’exhaustivité de l’information; le conflit d’intérêts; la signature des textes et le respect de la réputation.
Au premier grief, M. Clark reproche au First Informer de donner à ses lecteurs une information inexacte, d’omettre des faits et de n’avoir pas tenté d’obtenir sa version des faits. Les mis-en-cause soutiennent que l’information publiée dans leur journal était exacte. Le Conseil constate que certains articles comportent des erreurs qui auraient pu être évitées par une simple vérification de la part des mis-en-cause.
En ce qui à trait à l’équilibre et à la rigueur de l’information, le Conseil rappelle que les journalistes doivent veiller à éviter les insinuations, surtout celles qui risquent de porter préjudice à une personne. Le Conseil a relevé que dans plusieurs textes la vision du plaignant n’est jamais exposée. Le Conseil tient à souligner que lorsque des insinuations ou accusations sont portées, il est nécessaire que le média s’assure de recueillir les commentaires des personnes visées par l’article, par souci de justice, d’équité et d’équilibre. Le grief est retenu.
Le Conseil a examiné l’éditorial, « Timothy Clark : A Wholly Inappropriate Choice ». Il considère que, bien que soit reconnue une grande latitude aux éditorialistes, il reste que ceux-ci ne sauraient se soustraire aux exigences de rigueur et d’exactitude. Ils doivent éviter de laisser planer des malentendus qui risquent de discréditer des personnes ou des groupes. Dans le présent dossier, le fait de critiquer le pouvoir en place est acceptable mais le fait de cibler à répétition une personne pour l’ensemble des décisions prises par l’ensemble des élus du conseil municipal, va au-delà de la latitude reconnue aux éditorialistes. Le grief est donc retenu.
M. Clark soutient que Mme Constance Boudreault serait en conflit d’intérêts, dû à son implication au sein de divers organismes, en plus, d’avoir écrit un article sur sa fille. Le Conseil considère qu’il s’agit d’une situation de conflit d’intérêts. Le grief est par conséquent retenu.
M. Clark ajoute qu’elle serait non seulement journaliste au First Informer, mais aussi présidente, éditrice et responsable des ventes; ce qui nuirait à l’impartialité de l’information. Sur ces points le représentant du journal, M. Gerard Huggins n’apporte aucun éclaircissement. Le grief est retenu.
Le Conseil, dans une décision rendue en décembre 2006, invitait le First Informer à clarifier sa structure organisationnelle (Réf. : D2006-05-068). Le Conseil réitère donc sa demande, en précisant qu’il serait nécessaire de procéder à des modifications pour éviter toute confusion, pour le lecteur, entre les activités commerciales et le traitement de l’information.
En ce qui a trait à l’implication de Mme Boudreault au sein d’autres organismes, le Conseil recommande aux entreprises de presse et aux journalistes, de ne pas se faire les publicistes ou les promoteurs des mouvements pour lesquels ils militent. Les entreprises de presse doivent veiller elles-mêmes, à ce que, par leurs affectations, leurs journalistes ne se retrouvent pas en situation de conflits d’intérêts.
Bien que le Conseil soit sensible au fait que les affectations sont difficiles pour les médias pourvus de petites équipes, il est impérieux de préserver la confiance du public envers les organes de presse et les journalistes, tout autant qu’envers l’information qu’ils transmettent au public. Ce grief est donc retenu.
Au troisième point relevé, M. Clark reproche au First Informer de publier des commentaires, des éditoriaux et des lettres de lecteurs non signés.
En ce qui concerne les éditoriaux ou commentaires, le Conseil mentionne que le fait de ne pas signer certains textes n’élude toutefois pas la responsabilité des médias face à ce qu’ils publient ou diffusent.
En ce qui a trait aux lettres adressées à l’éditeur, le Conseil est à même de remarquer que des cinq lettres soumises par M. Clark, quatre d’entre elles ne sont pas signées et la 5e provenait du plaignant lui-même qui n’avait pas demandé à la faire publier. La déontologie demande que les médias ne publient ou ne diffusent pas de lettres anonymes. Bien que le fait d’habiter dans une petite communauté puisse empêcher certaines personnes de s’exprimer, les lettres doivent être identifiées du nom de leur signataire et du lieu de résidence. Les seules exceptions à cette règle doivent tenir à des raisons impérieuses qui empêcheraient la transmission, autrement, des informations ou des opinions d’intérêt public.
De plus, les médias doivent éviter que ces espaces rédactionnels ne deviennent des tribunes pamphlétaires qui n’auraient d’autre effet que de porter préjudice à certaines personnes. Cette situation pourrait porter le lecteur à douter du bien-fondé des informations publiées dans l’ensemble de l’hebdomadaire. Le grief est retenu.
Finalement, M. Clark invoque l’atteinte à sa réputation causée par la publication de différents articles, éditorial et lettres à l’éditeur. Le rôle du Conseil n’est pas de déterminer le degré d’atteinte à la vie privée du plaignant; cela relève des tribunaux. La décision du Conseil est prononcée dans un contexte d’éthique journalistique seulement et ne porte donc que sur le travail journalistique du First Informer.
Des quinze textes (articles, éditorial, commentaire et lettres de lecteur) soumis par M. Clark, onze le touchent de près ou de loin. à la lecture des documents fournis par les parties, le Conseil se doit ici de constater que des inimitiés profondes semblent s’être installées entre le plaignant et Mme Constance Boudreault et regrette que celles-ci se traduisent par un recours devant lui. Il apparaît à l’étude du dossier que Mme Boudreault ne s’est pas prévalu de toute la rigueur intellectuelle et professionnelle que lui impose sa profession.
Au vu de l’analyse qui précède, la présidente, éditrice et journaliste n’ayant pas accordé un traitement équilibré aux éléments et aux partis en opposition, il est apparu vraisemblable que le plaignant ait reçu un traitement inéquitable par le First Informer.
Décision
En raison des motifs relevés plus haut, le Conseil retient donc la plainte sur les manquements en regard de l’exactitude, l’équilibre et l’exhaustivité de l’information; le conflit d’intérêts; la signature des textes et le respect de la réputation et blâme la présidente, éditrice et journaliste, Mme Constance Boudreault ainsi que l’hebdomadaire The First Informer.
Analyse de la décision
- C03A Angle de traitement
- C03C Sélection des faits rapportés
- C04A Article non signé
- C11D Propos/texte mal cités/attribués
- C12B Information incomplète
- C12C Absence d’une version des faits
- C13A Partialité
- C14A Sensationnalisme/exagération/insistance indue
- C15H Insinuations
- C16D Publication d’informations privées
- C17A Diffamation
- C17E Attaques personnelles
- C20A Identification/confusion des genres
- C22D Engagement social