Plaignant
L’Association du Falun Dafa du Canada et M. Félix-Antoine Plante, représentant
Mis en cause
Mme Solveig Miller, journaliste; M. Léon Laflamme, réalisateur; l’émission « Enquête » et la Société Radio-Canada
Résumé de la plainte
L’Association du Falun Dafa du Canada porte plainte contre Mme Solveig Miller, journaliste, et M. Léon Laflamme, réalisateur pour la Société Radio-Canada. Elle leur reproche d’être les auteurs d’un reportage intitulé « Malaise dans le Chinatown », diffusé le 30 octobre 2008 dans le cadre de l’émission « Enquête », qui aurait été clairement défavorable au Falun Gong et à ses pratiquants.
Griefs du plaignant
Le Conseil tient à souligner que l’Association du Falun Dafa a formulé, auprès de lui, une plainte contre les conclusions de la révision de l’Ombudsman de Radio-Canada. Or, le Conseil de presse n’est aucunement une instance d’appel des décisions de l’Ombudsman. C’est la raison pour laquelle le Conseil n’a pas étudié la plainte de l’Association du Falun Dafa telle qu’elle lui a été originellement soumise, mais a repris les griefs tels qu’ils avaient initialement été formulés auprès de la Société Radio-Canada comme base de la présente plainte.
L’Association du Falun Dafa du Canada s’est plainte du reportage intitulé « Malaise dans le Chinatown », diffusé à Radio-Canada. Ce reportage constituerait, selon les plaignants, une tentative de dénigrement du Falun Gong, un groupe minoritaire au Canada et victime de persécution en Chine.
Pour l’Association du Falun Dafa du Canada, le reportage diffusé sur les ondes de Radio-Canada ne respectait pas l’éthique journalistique et aurait, également, causé un tort important aux partisans du Falun Gong du Québec. Selon elle, Radio-Canada avait une approche biaisée qui ne respectait pas les faits, en présentant le Falun Gong comme une source de désharmonie et de désunion de la communauté chinoise du Canada. Le portrait du Falun Gong serait également accompagné, à certaines occasions, de musique inspirant la crainte ainsi que d’angles de caméras peu flatteurs.
L’Association du Falun Dafa précise que le Falun Gong, à titre de mouvement spirituel chinois, est pratiqué à Montréal depuis 1996. Jusqu’à ce que le régime communiste chinois mette à exécution sa politique d’élimination du Falun Gong, en 1999, ce dernier n’aurait été victime d’aucune controverse ni même de plainte.
Pour la partie plaignante, le biais de Radio-Canada en faveur du journal les Presses Chinoises est d’autant plus évident que, M. Chau serait décrit avec respect comme le propriétaire du plus vieil hebdomadaire dans le quartier chinois de Montréal, ainsi que comme résidant au Canada depuis 30 ans. Ce n’est qu’à la fin du reportage, qu’il est mentionné hâtivement que la Cour d’appel du Québec l’a condamné récemment pour diffamation.
Le reportage donne l’impression que le refus de la porte-parole du Falun Gong de parler à la caméra est la preuve que le groupe est secret et qu’il n’est pas digne de confiance. En réalité, ce serait la première entrevue qu’elle déclinait et ce, parce qu’il était, selon elle, clair que les producteurs désiraient davantage produire un reportage favorisant le gouvernement chinois qu’un reportage équilibré. D’ailleurs, le gouvernement chinois aurait, selon la plaignante, exercé des pressions auprès de CBC après la diffusion du documentaire intitulé « Beyond the Red Wall ».
La partie plaignante mentionne qu’elle a, à plusieurs reprises, expliqué son refus d’accorder des entrevues à la caméra. Ces explications n’étant jamais exposées dans le reportage, la plaignante est alors présentée comme évasive et non coopérative.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de Mme Geneviève Guay, directrice au traitement des plaintes et affaires générales :
Mme Guay précise que le but du reportage était d’explorer l’importance de l’organisation du Falun Dafa du Canada, à l’extérieur de la Chine, ainsi que ses impacts sur la communauté chinoise, tout spécialement celle vivant à Montréal.
Elle ajoute que le groupe ainsi que ses activités restent relativement peu connus. De son avis, il était justifié qu’un télédiffuseur explore les structures, croyances, actions ainsi que le financement d’un mouvement qui a acquis une influence certaine dans le monde en peu de temps.
Mme Guay insiste sur le fait que le reportage ne nie pas que les membres du Falun Gong vivant en Chine rencontrent certaines difficultés avec les autorités. Elle rappelle que l’objectif d’un télédiffuseur public est de présenter plusieurs points de vue sur une même question. C’est la raison pour laquelle la Société Radio-Canada aurait, cette fois-ci, cherché à parler du Falun Gong avec un autre point de vue que celui utilisé pour le reportage « Beyond the Red Wall ». Mme Guay précise que les nombreuses procédures légales impliquant le Falun Gong au Canada, ainsi que les nombreux appels reçus par la police, en lien avec leurs activités, pouvaient justifier que Radio-Canada choisisse un angle de traitement différent.
Elle ajoute que les recherches nécessaires à la production du reportage ont été conduites avec les plus grandes précautions. Tous les faits auraient été vérifiés à plusieurs reprises et l’information aurait été obtenue de sources hautement crédibles.
Enfin, Mme Guay précise que l’équipe de production est convaincue que le Falun Dafa aurait accordé une entrevue à la caméra uniquement si le reportage n’avait porté que sur les oppressions dont elle est victime en Chine.
Réplique du plaignant
La partie plaignante se dit, tout d’abord, peu satisfaite de la réponse de Mme Guay puisque celle-ci ne répondrait aucunement aux critiques formulées par l’Association. Elle formule les commentaires suivants :
– Dire que Mme Zhou refusait d’être interrogée sous couvert du fait que les questions du financement et des relations médiatiques allaient être abordées est inexact.
– Dès le début, la partialité du reportage saute aux yeux, alors qu’on entend que le Falun Gong « suscite beaucoup de méfiance », que sa « présence dans nos villes crée un certain malaise » et que c’est un « mouvement religieux peu connu et omniprésent qui dérange ».
– Le reportage a dépeint les allégations de prélèvement d’organes comme réfutées, voire concoctées en réponse à un échec devant le tribunal, bien qu’un certain nombre d’organisations internationales cherchent à attirer l’attention du public sur cette question.
– MM. Kilgour et Ownby se sont plaints à l’Association de ce que leur véritable opinion avait été déformée et que leur sympathie envers le Falun Gong ne serait pas reflétée.
– Le reportage ne mentionne ni le titre du rapport ni l’adresse Internet où le rapport de MM. Kilgour et Matas peut être consulté.
– L’équipe de production d’ « Enquête » a accordé une importance disproportionnée à M. Wu, ancien détenu du gouvernement chinois pour dissidence, en faisant référence à une enquête qu’il a effectuée auprès d’un hôpital chinois et dont il aurait déduit que les allégations de prélèvement d’organes sont un mensonge.
– On aperçoit, dans le reportage, une porte-parole d’Amnesty International affirmant qu’il n’existe pas de preuve venant confirmer les allégations de prélèvements d’organes et ce, bien que le régime chinois n’autorise pas Amnesty International à se rendre en Chine.
– Les croyances du Falun Gong seraient présentées avec sensationnalisme : « Li Hongzhi [le fondateur du Falun Gong] croit que la race humaine a été contaminée par des extraterrestres qui seraient à l’origine de la science moderne et de la médecine. Pour soigner ses adeptes, il leur installe une roue dans le ventre ».
– Le professeur Ownby affirmerait de façon erronée, dans le reportage, que M. Hongzhi « se considère comme un buddha » et « se compare aussi à Jésus-Christ ».
– Les journalistes ont visité un point de pratique où la coordinatrice leur a expliqué la pratique des mouvements et principes du Falun Gong et leur a remis beaucoup de documentation, mais rien de ceci n’a été mentionné dans le reportage.
– La journaliste déclare donc de façon inexacte que, malgré ses efforts, elle n’est pas parvenue à en apprendre plus sur le Falun Gong.
– Dans les séquences présentées aux téléspectateurs, les propos de Mme Zhou ne sont pas traduits en français, ce qui ne permettrait pas aux téléspectateurs de la comprendre.
– Mme Zhou est présentée de façon erronée comme l’organisatrice du rassemblement s’étant tenu sur la Colline parlementaire.
– Le reportage se clôt avec la mention que le Falun Gong « ne parle plus aux médias » ce qui serait également inexact.
– Une musique sinistre et des images déséquilibrées sont utilisées pour dépeindre négativement le Falun Gong.
– Mme Chiu, dont la crédibilité n’est pas démontrée, dépeint négativement le Falun Gong.
– Les citations d’Amnesty International et Human Rights Watch qui se trouvent dans le dépliant du Falun Gong condamnent la persécution de ses membres par le gouvernement chinois, bien que ce ne soit pas ce que rapporte la journaliste.
– Le reportage tente d’établir un lien qui n’existe pas entre une décision de la Cour, défavorable aux pratiquants du Falun Gong, et l’apparition des allégations de prélèvements d’organes sur des pratiquants du Falun Gong.
– Le reportage suggère que les liens entre le spectacle de célébration du Nouvel An chinois et le Falun Gong sont cachés, alors que le nom du Falun Gong est clairement imprimé sur les différents supports promotionnels.
– Contrairement à ce qui est dit dans le reportage, aucun politicien n’a accusé les organisateurs du spectacle de cacher les liens qu’ils avaient avec le Falun Gong.
– La journaliste, par sa question « Qu’est-ce qui vous fait dire que c’est le Falun Gong? », fabrique l’accusation selon laquelle le Falun Gong aurait envoyé une menace de mort à M. Chau.
Pour réparer ses erreurs, la partie plaignante souhaite que la Société Radio-Canada corrige les fausses perceptions et le mal qu’elle a causé, en publiant une rétractation et des excuses pour la diffusion du reportage, en plus de devoir, aux téléspectateurs, une clarification sur de nombreux points, notamment un juste examen des allégations relatives aux prélèvements d’organes.
Analyse
L’Association du Falun Dafa du Canada porte plainte contre la Société Radio-Canada, Mme Solveig Miller, journaliste et M. Léon Laflamme, réalisateur, pour avoir diffusé, le 30 octobre 2008, un reportage intitulé « Malaise dans le Chinatown », dans le cadre de l’émission « Enquête ».
Grief 1 : inexactitudes
Le premier grief pour inexactitudes comporte plusieurs dimensions :
– Introduction à la pratique du Falun Gong
Selon les plaignants, le reportage présente la pratique du Falun Gong comme bizarre, secrète et suspecte. Les croyances, sur lesquelles elle repose, seraient dépeintes de façon caricaturale, ce qui ne permettrait pas aux téléspectateurs de les comprendre. Les téléspectateurs ne comprendraient pas, non plus, les persécutions dont les pratiquants du Falun Gong sont victimes en Chine et les raisons pour lesquelles ils organisent des manifestations publiques au Canada. La journaliste ferait, de plus, une présentation sensationnaliste du Falun Gong, en disant que M. Honghzi, le maître à penser, « considère que la race humaine a été contaminée par des extraterrestres » et que « pour soigner ses adeptes, il leur installe une roue dans le ventre ». Interrogé dans le cadre de l’émission, M. Ownby, professeur à l’Université de Montréal, aurait, par ailleurs, commis une erreur en affirmant que M. Honghzi « se considère comme un buddha et se compare à Jésus-Christ ».
Après analyse du reportage, le Conseil constate que celui-ci a mis en scène plusieurs segments présentant la pratique du Falun Gong, ses origines ainsi que les défis qui sont les siens. Contrairement à l’avis de l’Association du Falun Dafa du Canada, le Conseil considère que cette mise en contexte était suffisante pour permettre aux téléspectateurs de comprendre ce qu’est le Falun Gong et les persécutions dont il est victime en Chine. De l’avis du Conseil, le téléspectateur comprend aussi que ce sont pour ces raisons qu’il organise un certain nombre de manifestations au Canada.
En ce qui a trait à l’idéologie même du Falun Gong, le Conseil soutient qu’il est exact d’avoir mentionné que ses pratiquants pensent que la race humaine a été contaminée par des extraterrestres et que les adeptes sont soignés par l’installation d’une roue dans leur ventre (1). L’équipe de production disposait, par ailleurs, d’une liberté rédactionnelle qui lui permettait de mettre en avant ces aspects. Enfin, en ce qui a trait aux déclarations de M. Ownby de l’Université de Montréal, les vérifications faites par le Conseil portent à croire qu’il s’agissait d’un expert crédible sur la question du Falun Gong dont les déclarations sont, selon toute vraisemblance, exactes.
– Relations du Falun Gong avec les médias
Selon l’Association du Falun Dafa du Canada, le reportage laisserait aux téléspectateurs l’impression trompeuse que le Falun Gong est un mouvement secret fuyant les médias. Malgré le fait que l’on peut voir Mme Zhou, porte-parole de l’Association, comme refusant à deux reprises d’être filmée et de s’exprimer face à la caméra, cette dernière affirme avoir largement collaboré avec l’équipe de production pendant la préparation du reportage. D’ailleurs, elle aurait fait mention des raisons pour lesquelles elle ne désirait pas apparaître dans le reportage, mais cette information n’a pas été présentée aux téléspectateurs. Elle aurait également été présentée de façon erronée comme l’organisatrice des rassemblements ayant eu lieu sur la Colline parlementaire à Ottawa. Enfin, le reportage se terminerait par la mention que le Falun Gong ne parle plus aux médias, ce qui serait inexact puisque de nombreux communiqués de presse seraient régulièrement émis à destination des journalistes.
Le Conseil est conscient du fait que Mme Zhou s’est entretenue avec l’équipe de production de l’émission et qu’elle a partagé avec eux un certain nombre d’informations concernant le Falun Gong. Déontologiquement parlant, rien n’obligeait toutefois l’équipe de rédaction à mentionner que ce partage d’information avait eu lieu. Pour améliorer le contenu de son reportage, la journaliste aurait pu néanmoins mentionner la collaboration de l’Association et ses motifs pour refuser une entrevue à la caméra.
Mme Zhou a, par ailleurs, bien été identifiée dans le reportage comme étant l’organisatrice du rassemblement se tenant sur la Colline parlementaire. Il est toutefois impossible, avec l’information dont le Conseil dispose, de déterminer avec certitude si elle était ou non à l’origine de cet événement (2). Il constate, par ailleurs, que la seule mention que comportait le reportage du fait que le Falun Gong ne communique plus avec les journalistes est celle faite par M. Ownby. Encore une fois, les vérifications effectuées par le Conseil le portent à croire que M. Ownby est un expert crédible dont les propos sont, selon toute vraisemblance, exacts.
– Prélèvements d’organes
L’Association du Falun Dafa du Canada se plaint également de l’utilisation trompeuse et sélective des faits et des entrevues dans le reportage d’« Enquête ». Cette technique serait particulièrement représentative du traitement journalistique réservé à la question du prélèvement d’organes sur les membres du Falun Gong en Chine, globalement décrite comme largement réfutée, bien que l’hypothèse contraire soit soutenue par de nombreux organismes et organisations. Aucune information issue du rapport signé par MM. Kilgour et Matas, concernant le prélèvement d’organes sur les pratiquants du Falun Gong en Chine n’aurait été proposée aux téléspectateurs. Par ailleurs, lorsque le témoignage de M. Wu, célèbre dissident chinois, est proposé en ondes, on comprendrait que ce dernier considère les allégations de prélèvements d’organes comme mensongères, laissant ainsi aux téléspectateurs l’impression que tous les membres du Falun Gong sont des menteurs. Enfin, les positions de deux experts qui apparaissent à l’antenne, MM. Kilgour et Ownby, auraient également été déformées pour que leur sympathie envers l’Association ne transparaisse pas.
Pour le Conseil, il importait que la position du Falun Gong, relativement à la question des prélèvements d’organes sur ses membres, soit présentée aux téléspectateurs dans le reportage, ce qui fut bien le cas. Il considère ainsi que les journalistes ont effectué correctement leur travail en rapportant la version officielle du mouvement. Il était, par ailleurs, de l’ordre de la liberté de presse, dont disposait l’équipe de production, de choisir de ne pas présenter d’extraits du rapport dont MM. Kilgour et Matas sont les auteurs.
En ce qui a trait à M. Wu, il est clairement exposé dans le reportage que ce dernier a envoyé des équipes dans plusieurs hôpitaux chinois afin de vérifier les allégations selon lesquelles des organes vivants seraient prélevés sur des pratiquants du Falun Gong. M. Wu n’en a trouvé aucune confirmation ce qui l’amène à conclure que la campagne à laquelle se livre le Falun Gong est mensongère, sans pour autant laisser entendre que tous les pratiquants sont des menteurs. En ce qui a trait aux propos de MM. Kilgour et Ownby, diffusées dans le reportage, dont les intentions auraient été déformées, le Conseil constate que la partie plaignante n’en a aucunement fait la preuve.
– Intentions malveillantes prêtées au Falun Gong
Selon les plaignants, des accusations infondées seraient formulées à deux reprises à leur égard dans le reportage. La première laisserait entendre que les persécutions que vit le Falun Gong en Chine auraient été élaborées en réponse à une défaite en justice du Falun Gong au Canada. La seconde correspondrait au moment où la journaliste aurait accusé sans preuve le Falun Gong en demandant à M. Chau, propriétaire du journal les Presses Chinoises, s’il croyait le Falun Gong responsable de la menace de mort qui lui a été adressée.
Après analyse, le Conseil constate que le reportage laisse comprendre que la question des prélèvements d’organes aurait été, au Canada, mise en avant par le Falun Gong après une défaite en Cour. Bien que la journaliste souligne la proximité chronologique de ces deux événements, elle n’établit aucune relation de cause à effet entre ceux-ci.
Concernant la question « Qu’est-ce qui vous fait dire que c’est le Falun Gong? », posée par la journaliste à M. Chau, dans la séquence relative à la menace de mort qu’il a reçue, la réponse de M. Chau est la suivante : « Je ne peux pas l’affirmer. Ce que je comprends de cette lettre, c’est qu’on veut que je cesse d’agir contre le Falun Gong ». Le Conseil remarque que M. Chau a, par sa réponse, confirmé à la journaliste qu’il pensait le Falun Gong responsable de la menace de mort qu’il a reçue, bien qu’il précise ne pas en être certain. Le Conseil conclut que cette question se justifiait dans le contexte et rejette cet aspect du grief.
– Parti pris d’Amnesty International et de Human Rights Watch
Selon les plaignants, le reportage affirmerait également de façon erronée que le Falun Gong a, dans le dépliant qui est présenté aux téléspectateurs, prétendu qu’Amnesty International et Human Rights Watch partageraient les conclusions du rapport de MM. Kilgour et Matas à l’effet que les partisans du Falun Gong résidant en Chine sont victimes de persécutions.
Après analyse, le Conseil relève que la journaliste a, dans le reportage, prononcé les mots suivants : « On pourrait croire, en regardant les dépliants du Falun Gong, que Human Rights Watch et Amnesty International appuient le rapport Kilgour, mais ce n’est pas ce que l’on apprend. » En prenant connaissance du dépliant en question, le Conseil remarque que sont disposés côte à côte des propos et des images reliés à Human Rights Watch, à Amnesty International ainsi qu’au rapport cosigné par MM. Kilgour et Matas. Cette disposition peut donner l’impression, comme le laissait entendre la journaliste, que les deux organismes soutiennent les conclusions du rapport de MM. Kilgour et Matas. L’information présentée, aux téléspectateurs, n’était ainsi nullement erronée.
– Spectacle du Nouvel An chinois
Le reportage aurait, selon les plaignants, présenté une description biaisée et erronée de l’implication du Falun Gong dans le spectacle de célébration du Nouvel An chinois qui s’est tenu à la Place des Arts de Montréal. La journaliste aurait, sans fondement, suggéré que les liens existants entre le Falun Gong et cet événement culturel ont été cachés au public, alors qu’ils étaient clairement mentionnés dans le fascicule de promotion de l’événement. Par ailleurs, seule l’opinion de Mme Chiu, ancienne candidate du Bloc Québécois en 2006, concernant le spectacle, aurait été proposée aux téléspectateurs. Ce faisant, l’opinion du public en général n’aurait nullement été reflétée.
Le Conseil constate, tout d’abord, qu’il a effectivement été mentionné dans le reportage qu’il existait un lien peu clair entre cette manifestation culturelle, le Falun Gong et les aspirations de ce dernier. Le Conseil remarque que la Société Radio-Canada a présenté aux téléspectateurs une liste d’autorités qui refusent désormais de cautionner l’événement pour cette raison. Ce faisant, le Conseil estime que l’équipe de production a suffisamment étayé son argument.
Le témoignage de Mme Chiu, présenté dans ce même segment de l’émission, venait renforcer l’impression selon laquelle le Falun Gong n’a pas été transparent quant au message politique que véhiculait le spectacle. En interrogeant Mme Chiu, l’équipe d’« Enquête » proposait aux téléspectateurs l’éclairage d’un personnage public, issu de cette communauté culturelle, sur la question du manque de transparence du Falun Gong.
Dans son ensemble, le Conseil rejette le grief pour inexactitudes qu’il vient d’analyser. Sur le plan éthique, il est par ailleurs d’avis que l’équipe de production aurait pu faire mention, dans le reportage, de la collaboration de l’Association durant la préparation de celui-ci ainsi que des motifs qui ont poussé l’Association à refuser une entrevue à la caméra.
Grief 2 : information biaisée
Les plaignants soutiennent que les angles de prises de vue ainsi que la musique utilisés dans le reportage alimentent l’image négative du Falun Gong que l’équipe de rédaction souhaitait transmettre aux téléspectateurs. Le Conseil pense néanmoins que le jugement exprimé par les plaignants, concernant la musique ou les angles de vue, est infondé.
L’Association du Falun Dafa du Canada évoquait également la possibilité que la Société Radio-Canada soit à la solde du gouvernement chinois; statut qui l’aurait conduit à diffuser un reportage à la nette défaveur du Falun Gong. Constatant l’absence de démonstration de la part des plaignants, le Conseil ne peut aucunement conclure que la Société Radio-Canada ait été privée de son indépendance éditoriale.
(1) Après recherches, nous avons établi que Li Honghzi, lui-même, a fait référence aux extraterrestres, anciennement maîtres de la Terre, dans une conférence prononcée à Washington le 21 juillet 2001 : « Vous le savez, je parle souvent des extraterrestres, pourquoi est-ce que je parle des extraterrestres? C’est parce que dans le passé c’étaient eux les vrais êtres humains dans l’environnement de la Terre, c’étaient eux les maîtres d’ici dans différentes périodes de l’histoire, même dans une histoire encore plus lointaine. » Relativement à la roue installée dans le ventre des pratiquants, il en est fait mention dans l’ouvrage même de Li Honghzi portant le titre : « La Grande Méthode de Plénitude Parfaite du Falun Fofa ».
(2) Le Conseil est également conscient du fait que, dans le reportage, il est à plusieurs reprises mentionné que, dans le cas de rassemblements de ce type, à Montréal ou à d’autres endroits, les policiers ont notamment beaucoup de difficulté à retracer qui sont les organisateurs, puisque lorsqu’ils interrogent les personnes présentes, jamais aucune n’est responsable de la tenue de l’événement.
Décision
Au vu de tout ce qui précède, le Conseil de presse rejette la plainte de l’Association du Falun Dafa du Canada contre la journaliste Mme Solveig Miller, le réalisateur M. Léon Laflamme et la Société Radio-Canada, à l’exception de la remarque concernant l’absence de mention des motifs qui ont poussé l’Association à refuser toute entrevue à la caméra.
Analyse de la décision
- C03A Angle de traitement
- C11B Information inexacte
Date de l’appel
21 May 2010
Appelant
L’Association du Falun Dafa du Canada et M. Félix-Antoine Plante, représentant
Décision en appel
Les membres de la commission en sont venus unanimement à la conclusion qu’il n’est pas du ressort du Conseil de presse de traiter une plainte formulée contre une décision de l’ombudsman de la Société Radio-Canada. La décision rendue en première instance est donc annulée et sans effet.