Plaignant
Mme Pierrette St-Amour
Mis en cause
M. Serge Fortin, vice-président, Information; l’émission « TVA en direct.com » et le Groupe TVA
Résumé de la plainte
Mme Pierrette St-Amour dépose une plainte, le 31 janvier 2012, contre le réseau de télévision TVA et l’émission « TVA en direct.com » relativement à un reportage, diffusé le 16 janvier à 10 h 52. Mme St-Amour accuse TVA d’avoir porté atteinte à sa vie privée et dénonce le refus du réseau de télévision de s’expliquer et lui présenter des excuses.
Commentaires du mis en cause
Le Groupe TVA a refusé de répondre à la présente plainte.
Analyse
Grief 1 : manque de respect
La plaignante, Mme Pierrette St-Amour dénonce l’émission « TVA en direct.com » du réseau TVA pour avoir diffusé une nouvelle et des images au sujet d’un accident de voiture mortel impliquant son conjoint, et ce, avant que les policiers de la Sûreté du Québec aient pu rejoindre Mme St-Amour pour lui annoncer le décès de son époux. La plaignante dit avoir reconnu, à la télé, la voiture, la valise et des papiers éparpillés appartenant à son conjoint avant même d’avoir été rejointe par la SQ qui était à une heure de distance de sa résidence. Mme St-Amour estime que la diffusion de la nouvelle pouvait attendre une heure, le temps que les policiers lui aient parlé et annoncé le décès de son époux. Mme St-Amour, qui souffre d’hypertension, dit qu’à l’arrivée des policiers, elle était déjà sous le choc et ils ont même songé à faire venir une ambulance, vu son état.
Le guide de déontologie du Conseil énonce les principes suivants : « Lorsque des faits, des événements et des situations mettent en cause la vie privée de personnes, la presse doit bien soupeser et mettre en équilibre son devoir d’informer et le respect des droits de la personne […]. Que ce soit lors de la collecte, du traitement ou de la diffusion de l’information, les médias et les journalistes doivent faire preuve de prudence, de discernement et de circonspection […]. Les journalistes doivent manifester à l’endroit des victimes et de leurs proches tout le respect et la compassion qui leur sont dus en écartant les détails qui ne sont pas d’intérêt public […]. Ces détails […] peuvent être préjudiciables à la victime ou à ses proches en les exposant à des tracas ou à des peines inutiles. » (DERP, pp. 42-43)
Le Conseil constate, au visionnement du reportage de « TVA en direct.com », que la première diffusion de la nouvelle de l’accident d’automobile s’est faite à 10 h 52, montrant la voiture, une bonne partie de la plaque d’immatriculation, la valise de la victime ainsi que des papiers portant le logo de la compagnie pour laquelle travaillait la victime. La journaliste a aussi indiqué la marque de la voiture, la couleur et que la victime était un homme de 57 ans résidant à Saint-Jean-de-Matha. L’accident, selon les rapports de police, serait survenu à 10 h 21. Il est donc évident que les policiers n’avaient pas eu le temps de se rendre chez la plaignante qui habitait à une heure des lieux de l’accident. Les images de la voiture démolie ainsi que les détails sur le conducteur permettaient à Mme St-Amour de reconnaître qu’il s’agissait bien là de son conjoint.
Tout en considérant d’intérêt général la diffusion d’informations au sujet d’un tel accident, le Conseil considère que TVA a manqué de respect envers les membres de la famille de la personne accidentée en diffusant, avant que ces derniers en soient avisés, des détails permettant l’identification de la victime. Ni la journaliste, ni l’animateur ou TVA n’ont jugé bon de s’assurer que Mme St-Amour avait été avertie du décès de son conjoint par les autorités policières avant de diffuser la nouvelle. Même si la journaliste n’a pas dévoilé le nom de la victime, le Conseil croit qu’elle n’aurait pas dû dévoiler autant d’informations spécifiques comme la plaque d’immatriculation, l’âge, le lieu de résidence et l’image de certains biens personnels.
Le grief pour manque de respect est retenu. Cependant, un membre du Conseil a exprimé sa dissidence par rapport au jugement exprimé par la majorité, considérant que le journaliste n’avait pas à attendre que les proches de la victime aient été avisés avant de diffuser la nouvelle.
Grief 2 : refus d’explication et d’excuse
La plaignante dénonce le fait que personne, du réseau TVA n’ait donné suite à sa demande d’explication sur les raisons qui ont motivé la décision de diffuser la nouvelle de l’accident avant qu’elle n’en soit informée. Mme St-Amour réclame des excuses publiques de la part de TVA.
Le Conseil considère que bien que le mis en cause n’avait pas l’obligation déontologique de fournir à Mme St-Amour des explications et des excuses sur le fait qu’il ait diffusé des informations trop précises ou trop hâtivement, il aurait été éthiquement souhaitable que le réseau TVA réponde aux demandes de la plaignante sur ces deux points.
Le grief pour refus d’explication et refus d’excuse est rejeté.
Refus de collaborer
Le Groupe TVA inc. a refusé de répondre à la plainte.
Le Conseil reproche au Groupe TVA inc. son manque de collaboration pour avoir refusé de répondre, devant le Tribunal d’honneur, de la plainte le concernant.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec retient, à la majorité, la plainte de Mme Pierrette St-Amour contre l’émission « TVA en direct.com » et le Groupe TVA, pour le grief de manque de respect. Cependant le grief pour refus d’explication et d’excuse est rejeté, à l’unanimité, bien qu’il aurait préférable que les mis en cause acquiescent aux demandes de la plaignante.
Pour son manque de collaboration, en refusant de répondre à la présente plainte, le Conseil de presse blâme le Groupe TVA inc.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. » (Règlement No 3, article 8. 2)
Analyse de la décision
- C16G Manque d’égards envers les victimes/proches
- C19A Absence/refus de rectification
- C24A Manque de collaboration