La plainte, déposée par M. Gilles Rhéaume , s’articulait autour de deux griefs. Le premier grief, qui visait à la fois le texte de M. Martin Patriquin et la chronique de M. Andrew Coyne, de même que le titre du magazine et celui de l’article de M. Patriquin, dénonçait la teneur discriminatoire, francophobe et québécophobe de ces produits journalistiques. Dans un deuxième temps, le plaignant reprochait au magazine d’avoir porté atteinte à l’image d’un symbole national des Québécois – le bonhomme Carnaval –, en plaçant en page couverture une caricature peu flatteuse, qui dépeignait le bonhomme comme un « bandit de grand chemin ».
D’une voix unanime, le Comité des plaintes et de l’éthique de l’information (CPEI) du Conseil de presse a jugé que les titres de l’article et du magazine (The most corrupt province in Canada) étaient porteurs de préjugés discriminatoires, en ce sens que l’accusation qui était ainsi portée, lourde de signification, n’a jamais été démontrée dans les articles qu’ils coiffaient.
En ce qui concerne l’article de M. Patriquin, une majorité de membres du CPEI (6 sur 7) a estimé que le journaliste avait manqué de rigueur dans son analyse, qui n’était ni exhaustive ni comparative, et qu’en ce sens, l’affirmation selon laquelle le Québec serait la province la plus corrompue doit être vue comme relevant de préjugés, d’autant plus condamnables qu’ils portaient atteinte à la dignité de l’ensemble des Québécois.
Le Comité a également jugé, avec une majorité plus courte cette fois (4 sur 7), que le chroniqueur Andrew Coyne avait lui aussi péché par manque de rigueur journalistique, reprenant à son compte les préjugés véhiculés dans l’article de son collègue. S’il est vrai que les chroniqueurs jouissent d’une grande latitude dans l’expression de leurs opinions, il n’en demeure pas moins que les faits sur lesquels ils se fondent doivent être avérés. En affirmant que « dans aucune autre province la corruption ne paraît aussi… inévitable » et en laissant entendre que les scandales de corruption sont « plus probables si les politiciens évoluent dans un contexte où le public accepte de telles activités », ce qui serait le cas au Québec, le chroniqueur a, selon le Comité, manqué de rigueur et contredit la réalité. De ce fait, le chroniqueur s’est lui aussi rendu coupable d’avoir véhiculé des préjugés discriminatoires ayant porté atteinte à la dignité des Québécois.
Les trois autres membres du comité ont pour leur part jugé que le chroniqueur était demeuré dans les limites acceptables de la liberté d’expression reconnue aux journalistes d’opinion, estimant que les affirmations reprochées relevaient davantage d’hypothèses qu’ils émettaient.
Le second grief, quant à lui, a été rejeté, le Comité estimant que le magazine Maclean’s a exercé sa liberté rédactionnelle en caricaturant le bonhomme Carnaval pour illustrer le sujet principal de cette édition. Bien que l’on puisse remettre en question la justesse de ce choix, il reste qu’il est conforme aux règles déontologiques reconnues.
En dernier lieu, le Conseil blâme le magazine Maclean’s pour avoir refusé de collaborer et de répondre, devant le tribunal d’honneur, de la plainte les concernant.
La plainte de M. Rhéaume est ainsi partiellement retenue.
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Le texte intégral des décisions ainsi qu’un résumé des arguments des parties en cause peuvent être consultés au www.conseildepresse.qc.ca, à la section « Les décisions rendues par le Conseil ».
Ces décisions sont toutes susceptibles d’être portées en appel dans les 30 jours de leur réception par les parties.
Le Conseil rappelle que « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. » (Règlement No 3, article 8.2)
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SOURCE :
Julien Acosta, directeur des communications
Conseil de presse du Québec
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RENSEIGNEMENTS :
Guy Amyot, secrétaire général
Conseil de presse du Québec
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