Le Conseil de presse réagit au projet de loi 65 (extrait du Rapport annuel 1981-82)

Le 06 juin 1982.  Le Conseil de presse est d’avis que les articles 28 et 146 du projet de loi 65 sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels sont susceptibles de restreindre ou d’empêcher la diffusion d’informations d’intérêt public et ainsi d’invalider le principe de l’accessibilité.

Dans une lette qu’il vient de faire tenir au Ministre des Communications du Québec, le Conseil de presse se demande en effet si l’article 28, portant sur les renseignements ayant des incidences sur l’administration de la justice et la sécurité publique « n’empêchera pas, dans sa formulation actuelle, la Commission d’accès de porter un jugement sur le caractère d’intérêt public ou encore sur la pertinence de divulguer l’un ou l’autre des renseignements dont traite cet article ». Le Conseil suggère donc au Ministre de voir s’il n’y aurait pas lieu, au jugement judiciaire en élargissant la juridiction du tribunal prévu dans le projet de loi.

Selon le Conseil, l’article 146 invalide également les intentions d’une politique d’ouverture. Cet article qui confère, en effet, au gouvernement le droit d’ordonner par décret à un organisme public de surseoir à l’exécution d’une décision de la Commission d’accès à l’information remet en question l’indépendance et les pouvoirs de cette Commission. « Cet article semble conférer au gouvernement un pouvoir exclusif en ce qui a trait à la définition de la notion « d’intérêt public », comportant ainsi le risque que soit défini le droit du public à l’information en fonction de la conception que pourra s’en faire le gouvernement. »

Par ailleurs, le Conseil se dit déçu du fait que le ministère des Communications n’ait pas jugé utile de donner suite à sa suggestion de déposer, en même temps que le projet de loi, les règlements qui doivent l’accompagner. Cette façon de faire aurait mieux rassuré le Conseil « en ce qu’elle aurait offert des garanties supplémentaires contre le risque qu’une réglementation peut comporter pour invalider l’esprit d’une loi. »

Le Conseil se demande enfin si l’article 148, qui semble devoir s’appliquer tout aussi bien aux documents publics qu’aux renseignements personnels, n’empêchera pas les journalistes d’aller jusqu’au bout de leur recherches pour informer le public, puisque cet article semble limiter à la « personne directement intéressée » le pouvoir d’interjeter appel d’une décision de la Commission d’accès.

Enfin, le Conseil se réjouit que le Gouvernement du Québec ait consacré dans un texte de loi le principe d’accès du citoyen à l’information gouvernementale et par conséquent, celui de la transparence de l’Administration publique. Il se réjouit aussi du fait que cette loi aura prépondérance sur les autres lois et qu’elle fera de temps à autres l’objet d’une révision par l’Assemblée nationale.