Lettre à M. Herbert Marx, ministre de la Justice du Québec, au sujet de la protection des sources journalistiques

Le Conseil de presse et la Fédération professionnelle des journalistes du Québec réclament l’adoption de mesures législatives afin que les journalistes jouissent d’une certaine immunité devant les tribunaux en matière de protection des sources et de saisie de matériel journalistique.

Une action rapide s’impose face à la multiplication des recours au témoignage de journalistes et à de telles saisies, le plus récent exemple en étant fourni par l’obligation faite, la semaine dernière, à certains journalistes et organes d’information de déposer leur matériel photographique à l’enquête du coroner qui se tient actuellement à La Malbaie à la suite du décès de M. Gaston Harvey.

C’est là le sens de la déclaration conjointe faite par les présidents de ces deux organismes, MM. Gérard Filion et Jean Pelletier, au cours d’une conférence de presse tenue aujourd’hui à Montréal.

MM. Pelletier et Filion rendaient alors public le contenu d’une lettre adressé au Ministre de la Justice du Québec, M. Herbert Marx, afin de l’exhorter à donner suite aux recommandations d’un groupe de travail chargé par son prédécesseur, en 1981, d’étudier les relations entre la presse et l’administration de la justice.

Dans son rapport publié en 1984 et entériné alors par le ministère de la Justice, ce groupe proposait de concilier le droit du public à l’information et le droit à une justice pleine et entière en accordant aux journalistes une protection relative de leurs informations et de leurs sources.

Ainsi, un journaliste ne pourrait être contraint de témoigner sur les faits dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions ni de divulguer la source de son information, et il ne pourrait être contraint de produire le matériel journalistique concernant de tels faits que si l’une des parties à un litige démontrait que la preuve de ces faits revêt une importance déterminante pour la solution du litige et qu’elle ne peut raisonnablement être obtenue autrement que par le témoignage du journaliste ou la production du matériel journalistique.

Le Conseil de presse et la FPJQ avaient pris acte avec satisfaction de ces recommandations et le ministère de la Justice les avaient entérinées. Un projet de modifications à la loi sur la presse était même rédigé en novembre 1984 pour que soient concrétisées les mesures proposées.

Aucune suite n’ayant été donnée à ce projet jusqu’ici, le Ministère est invité à faire diligence afin que cessent les recours de plus en plus fréquents à de telles pratiques par les autorités judiciaires et policières.

De souligner MM. Filion et Pelletier,  » il en va du respect du droit du public à l’information et de la liberté de la presse « . Selon eux en effet, ces pratiques ont inévitablement comme conséquence de priver la presse de sources d’information qui, rendues méfiantes, s’abstiendraient de communiquer des renseignements d’intérêts public. Outre d’être perçue comme une menace par les gens qui font l’événement, la presse pourrait également se refuser de couvrir certains événements de crainte que son travail ne serve à incriminer les personnes impliquées.