Le 16 juillet, le député français Jean-François Mancel a déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant la création d’un conseil national de déontologie journalistique et un code de déontologie.
Il s’agit d’une deuxième tentative pour le député d’opposition. En juillet 2011, ce représentant UMP avait soumis une proposition semblable qui n’avait pas connu de suite. En réponse à une question du Magazine du CPQ, le député défend sa démarche en soulignant que les propositions de loi qui n’ont pas été adoptées avant la fin d’une législature doivent être redéposées, si l’on désire qu’elles soient examinées.
La nouvelle mouture précise la façon de sélectionner les membres du public siégeant sur l’instance et leur offre un poste d’observateur au sein du comité de rédaction du code, mais pour le reste, la nouvelle proposition est semblable à la première.
Dans le préambule de la proposition de loi, Jean-François Mancel note que « l’actualité récente a mis au jour des atteintes inacceptables aux droits les plus essentiels de la personne tels que le secret de l’instruction, le secret défense, la présomption d’innocence, le droit à la dignité ou encore le droit d’avoir une vie privée. »
Interrogé par le quotidien Le Figaro, le député a assuré qu’il ne s’agissait pas d’un règlement de compte avec la presse.
Critiques
En 2011, le journaliste Olivier Da Lage avait critiqué sur son blogue la première proposition de loi déposée par M. Mancel. Il jugeait que le processus de nomination des membres du public et la présence d’un représentant du ministère de la Culture et de la Communication au sein du comité exécutif mineraient l’indépendance du conseil national de déontologie journalistique.
« Les deux propositions sont identiques à la virgule près, sauf en ce qui concerne la rédaction du code de déontologie pour laquelle il a légèrement assoupli sa proposition initiale. Pour le reste, c’est la proposition de 2011, note M. Da Lage au Magazine du CPQ. Essentiellement, quoi qu’il en dise, il s’agit de placer “l’autocontrôle” de la profession sous le contrôle du monde politique. »
« Les membres du Conseil sont tous élus, c’est leur nom qui est publié par décret », réplique M. Mancel. Quant à la présence d’un représentant du Ministère, il souligne que celui-ci n’aurait qu’une voix consultative.
Dans un article paru le 5 août 2011, L’Express rapportait que la proposition était « presque passée inaperçue » et avait reçu peu de soutien même au sein de l’UMP. De plus, on précisait qu’aucun parlementaire n’avait cosigné le texte.
À l’époque, le Syndicat national des journalistes y avait vu « un réflexe d’autoprotection de la classe politique après les affaires Woerth et Lagarde ».
Dans le bulletin de novembre 2011 de l’Association de préfiguration d’un conseil de presse (APCP) en France, Patrick Eveno analysait : « Si la proposition Mancel s’inspire en grande partie du projet de l’APCP et du Conseil de déontologie journalistique de la Belgique francophone, la présentation dans l’exposé des motifs des “excès” constatés et certaines dispositions du texte (représentants de la société civile désignés après un appel de candidature par une commission nommée par décret…) sont plus que discutables. »
Rappelons qu’il n’existe pas de conseil de presse en France. L’automne dernier, la ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filipetti avait mandaté la juge Marie Sirinelli pour qu’elle analyse le fonctionnement des conseils de presse européens et propose des pistes de solution. Cette dernière a rendu son rapport le 13 février 2014.
Une autre initiative, la création d’un conseil de presse d’initiative citoyenne, mise en branle par Les Indignés du PAF, pourrait se concrétiser d’ici décembre.