Plaignant
M. Jon Armano
Mis en cause
Mme Maryse Mathieu, journaliste, M. Ghislain Allard, directeur de l’information et l’hebdomadaire Le Journal de Magog
Résumé de la plainte
M. Jon Armano dépose une plainte le 13 février 2014 contre la journaliste Maryse Mathieu et Le Journal de Magog concernant un article et une vidéo mis en ligne le 11 septembre 2013 sur le site Internet du journal, sous le titre « Rive Nord-Est du lac Bowker éventré ». Le plaignant dénonce des informations inexactes, l’absence de rectificatif et une atteinte à sa réputation.
Analyse
Grief 1 : informations inexactes
M. Armano déplore deux inexactitudes dans un texte rapportant les interventions de citoyens auprès du conseil municipal, le 3 septembre 2013, concernant le bruit provoqué par des travaux réalisés dans une zone de conservation.
Premièrement, le plaignant estime que la journaliste l’a injustement associé au terrain d’où provenait le bruit. Il affirme que les travaux à l’origine du problème étaient réalisés sur un terrain voisin. Il fait remarquer que les citoyens s’étant plaints dénonçaient le bruit de travaux de dynamitage ayant eu lieu au cours de l’été, alors que ses travaux ont été entrepris le 4 septembre, soit le lendemain du conseil municipal. Il constate que cette inexactitude est présente dans l’article et la vidéo disponible sur le site du journal.
Dans un entretien avec la journaliste, cette dernière affirme que le but de l’article était de rapporter les interventions de citoyens auprès des élus du conseil municipal, concernant des problèmes de bruit au lac Bowker. Selon elle, les citoyens se sont plaints, lors de la séance du conseil municipal du 3 septembre 2014, de nuisances sonores occasionnées par l’aménagement d’un chemin forestier et par des travaux sur le terrain de M. Armano. Le 5 septembre, la journaliste s’est rendue chez des résidents du secteur afin de recueillir des éléments visuels pour accompagner son article. Ces résidents l’ont amenée, par bateau, devant le terrain de M. Armano.
Dans son guide de déontologie, Droits et responsabilités de la presse (DERP), le Conseil souligne que « les journalistes doivent transmettre une information qui reflète l’ensemble d’une situation et le faire avec honnêteté, exactitude et impartialité.» (DERP, p. 26)
Les recherches du Conseil ont permis de confirmer que les questions posées lors du conseil municipal par les citoyens concernaient autant les travaux reliés au chemin forestier que ceux effectués chez le plaignant. Ces recherches ont également permis de préciser que les passages de l’article sur les travaux de dynamitage et les propos d’une inspectrice en environnement concernent uniquement les travaux d’aménagement du chemin forestier.
Le Conseil considère que la journaliste n’a pas suffisamment distingué les récriminations des citoyens concernant les travaux réalisés sur le chemin forestier de celles qui concernaient les travaux effectués sur le terrain de M. Armano. L’imprécision et l’ambiguïté du texte amènent le public à amalgamer ces deux projets et déforment la réalité.
Dans le cas de la vidéo accompagnant l’article, deux citoyens décrivent les nuisances causées par le dynamitage. Le Conseil constate que la vidéo rapporte les critiques relativement aux travaux du chemin forestier tout en présentant des images de l’autre terrain, induisant ici aussi le public en erreur.
Le grief est retenu sur ce point.
Le plaignant prétend que l’article contient une deuxième information inexacte. Selon M. Armano, l’article évoque une lettre signée par Pascal Ellyson et Dominique Robert-Dubord l’autorisant à construire une maison. Le plaignant précise que la lettre est uniquement signée par M. Ellyson.
Le Conseil s’est fait confirmer par le signataire du document que la lettre ne comportait effectivement qu’une seule signature, contrairement à ce qui a été publié.
Le grief est retenu sur ce point.
Au vu de ce qui précède, le Conseil retient le grief pour informations inexactes.
Grief 2 : absence de rectificatif
Le plaignant a demandé au Journal de Magog de publier un correctif ayant la même visibilité que l’article en cause.
Dans un échange entre le plaignant et le directeur des affaires juridiques de Québecor Média, Bernard Pageau, ce dernier a répondu à cette demande en faisant valoir que l’article avait été « rédigé avec soin et prudence et conformément aux pratiques journalistiques couramment utilisées par les médias ». Il ajoute que la journaliste avait vérifié les faits et qu’elle avait réalisé une entrevue avec M. Armano, qui est cité dans l’article. « Dans ce contexte, nous voyons mal comment nous devrions retirer ou rétracter l’article en question », concluait-il.
Le DERP mentionne que « les rétractations et les rectifications devraient être faites de façon à remédier pleinement et avec diligence au tort causé. Les médias n’ont aucune excuse pour se soustraire à l’obligation de réparer leurs erreurs». (p. 46)
Constatant que l’article pouvait laisser croire que l’ensemble des travaux en cause dans l’article avait été réalisé sur le terrain du plaignant, le Journal de Magog avait l’obligation de publier un rectificatif.
Le Conseil retient le grief d’absence de rectificatif.
Grief 3 : atteinte à la réputation
Le plaignant estime que l’article entache sa réputation.
Le Conseil rappelle que l’atteinte à la réputation et la diffamation ne sont pas considérées comme du ressort de la déontologie journalistique et relèvent plutôt de la sphère judiciaire. Comme le Conseil de presse ne rend pas de décisions à ce titre, le grief pour atteinte à la réputation n’a pas été traité.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec retient la plainte de M. Jon Armano contre la journaliste Maryse Mathieu et le Journal de Magog pour les griefs d’informations inexactes et absence de rectificatif.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. Les entreprises de presse membre s’engagent pour leur part à respecter cette obligation, et à faire parvenir au secrétariat du Conseil une preuve de cette diffusion au maximum 30 jours suivant la date de la décision. » (Règlement No 3, article 8.2)
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Mme Micheline Bélanger
Mme Micheline Rondeau-Parent
M. Alain Tremblay
Représentants des journalistes :
M. Denis Guénette
M. Luc Tremblay
Représentants des entreprises de presse :
M. Éric Latour
Mme Micheline Pepin
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C17A Diffamation
- C19A Absence/refus de rectification
- C24A Manque de collaboration