Plaignant
MM. Mikael Bolduc, Alexandre Gosselin et Martin Léger
Mis en cause
M. Dany Doucet, rédacteur en chef et le quotidien Le Journal de Montréal; M. Bernard Barbeau, chef de nouvelles et le site Internet Journal de Montréal
Résumé de la plainte
MM. Mikael Bolduc, Alexandre Gosselin et Martin Léger déposent une plainte le 12 octobre 2014, contre Le Journal de Montréal et le site Internet Journal de Montréal, concernant un texte, signé par Mme Nathalie Provost et publié dans la section « Opinions », le 12 octobre 2014, sous le titre « Utiliser une arme est un privilège, pas un droit ». Les plaignants dénoncent la publication d’informations inexactes.
Le Journal de Montréal et le site Internet Journal de Montréal n’ont fait parvenir aucune réplique en réponse à la plainte.
Le texte d’opinion de Mme Nathalie Provost dénonce le laxisme du Parti conservateur du Canada sur le contrôle des armes à feu.
Analyse
Grief 1 : informations inexactes
Les plaignants relèvent quatre inexactitudes dans le texte publié. Premièrement, il serait faux d’affirmer qu’en « 2012, le gouvernement Harper a aussi affaibli la valeur du permis d’acquisition et de possession. Lors de l’achat d’une arme, il n’est plus obligatoire de montrer son permis au vendeur. Aujourd’hui, on achète une arme comme on achète un frigo. » De l’avis des plaignants, le permis d’acquisition est la seule pièce d’identité valide pour acheter une arme à feu et le vendeur a l’obligation d’inscrire le numéro de permis de l’acheteur sur son registre d’entrée et de sortie de magasin. Ils ajoutent que de tenter de se procurer une arme à feu sans détenir les permis adéquats est une infraction au Code criminel.
Dans son guide de déontologie Droits et responsabilités de la presse, le Conseil mentionne au sujet du journalisme d’opinion : « [Ce genre] accorde en général une grande place à la personnalité de leurs auteurs. C’est leur lecture personnelle de l’actualité, des réalités et des questions qu’ils choisissent de traiter qui est surtout mise en perspective. » (p. 18) Cependant, « Les auteurs de chroniques, de billets et de critiques ne sauraient se soustraire aux exigences de rigueur et d’exactitude. » (p. 28)
Sur le site Internet de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC), il est précisé que : « Au sens de la Loi sur les armes à feu, le permis d’armes à feu est obligatoire quand on possède des armes à feu, quand on en manie dans le cadre de son travail, quand on veut en acheter ou quand on veut acheter des munitions. » Il est donc faux d’affirmer que lors de l’achat d’une arme, il n’est plus obligatoire de montrer son permis au vendeur, comme l’affirme Mme Provost.
Le grief d’informations inexactes est retenu sur ce point.
Deuxièmement, les plaignants prétendent qu’il serait également faux d’affirmer que « le gouvernement Harper propose d’assouplir les règles pour le transport d’armes restreintes. La nouvelle législation permettrait que celles-ci soient transportées librement, à tout moment, sans destination, ni usage préautorisés, en intégrant l’autorisation de transporter les armes dans les permis de possession. Demain, on transportera donc une arme de poing, comme on transporte un sac d’épicerie. » Les plaignants répliquent que dans le texte du projet de loi C-42, les armes sont assujetties à des conditions de transports.
Le Conseil a pu constater, à la lecture du projet de loi C-42, que les armes restreintes seraient assujetties à des conditions très strictes de transports. En effet, l’article 2.1 du projet de loi prévoit que « le titulaire d’un permis de possession d’armes à feu prohibées ou d’armes à feu à autorisation restreinte doit, si son permis est renouvelé, être autorisé, dans sa province de résidence, à les transporter : [cinq déplacements sont établis]. » (projet de loi C-42) Le Conseil juge donc inexacte cette partie de l’information publiée.
Le grief d’informations inexactes est retenu sur ce point.
Troisièmement, il serait également faux selon les plaignants d’affirmer que « nous sommes moins protégés aujourd’hui qu’au cours de la Seconde Guerre mondiale ». À leur avis, la Loi sur les armes à feu et l’instauration de critères sévères pour l’obtention d’un permis d’arme à feu datent de 1977. Les armes à autorisation restreintes sont enregistrées depuis 1934 et le projet de loi du ministre Blaney ne fait aucunement mention d’abolir ce registre, ni même les permis d’acquisition.
Le Conseil considère que l’évaluation du degré de sécurité d’une population par rapport à la circulation d’armes à feu constitue un exercice fort complexe dans lequel interviennent de multiples facteurs et des variables subjectives. Le Conseil considère qu’il s’agit davantage d’une expression d’opinion qui n’est pas soumise au critère d’exactitude.
Le grief d’informations inexactes est rejeté sur ce point.
Finalement, un des plaignants dénonce la publication des propos suivants : « Aujourd’hui une mitraillette est un jouet », considérant qu’il ne s’agit pas de faits.
De l’avis du Conseil, les propos de Mme Provost présentaient de façon imagée sa conception de la réduction du contrôle sur les armes par le gouvernement Harper en utilisant l’analogie de la libre circulation des jouets. Pour le Conseil, ces propos constituent une expression d’opinion qui n’est pas soumise, ici non plus, au critère d’exactitude.
Le grief d’informations inexactes est rejeté sur ce point.
Au vu de ce qui précède, le Conseil retient le grief d’informations inexactes sur deux points, soit l’obligation de détenir un permis pour l’achat d’une arme et l’assouplissement des règles pour le transport d’armes restreintes.
Refus de collaborer
Le Journal de Montréal et le site Internet Journal de Montréal n’ont pas souhaité répondre à la présente plainte.
Le Conseil reproche au Journal de Montréal et au site Internet Journal de Montréal leur manque de collaboration pour avoir refusé de répondre, devant le Tribunal d’honneur, de la plainte le concernant.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec retient la plainte de MM. Mikael Bolduc, Alexandre Gosselin et Martin Léger contre Le Journal de Montréal et le site Internet Journal de Montréal, pour le grief d’informations inexactes.
Pour son manque de collaboration, en refusant de répondre à la présente plainte, le Conseil de presse blâme Le Journal de Montréal et le site Internet Journal de Montréal.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. Les entreprises de presse membre s’engagent pour leur part à respecter cette obligation, et à faire parvenir au secrétariat du Conseil une preuve de cette diffusion au maximum 30 jours suivant la date de la décision. » (Règlement No 2, article 8. 2)
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Mme Micheline Bélanger
M. Adélard Guillemette
Représentants des journalistes :
Mme Katerine Belley-Murray
M. Denis Guénette
Représentant des entreprises de presse :
M. Raymond Tardif
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C24A Manque de collaboration