Plaignant
Le Syndicat
général des employés de CIVM-TV [Radio-Québec, Montréal] et Télé-Clé [Montréal]
Représentant du plaignant
M. Pierre Daigneault
(président, Syndicat général des employés de CIVM-TV [Radio-Québec, Montréal])
et M. Gilles Crevier (rédacteur en chef, Télé-Clé [Montréal])
Mis en cause
CIVM-TV
[Radio-Québec, Montréal]
Représentant du mis en cause
M. André
Loranger (avocat)
Résumé de la plainte
Radio-Québec
interdit de publier les textes devant constituer la matière du numéro 10 de la
revue Télé-Clé et résultant des discussions de quatre équipes de production.
Elle refuse deux articles portant sur le thème de substitution choisi pour le
même numéro en plus d’exiger la modification d’un troisième article. Ces
décisions constituent des attaques directes à la liberté de l’information.
Griefs du plaignant
Le Syndicat
général des employés de Radio-Québec et le rédacteur en chef de la revue Télé-Clé
dénonçaient, auprès du Conseil de presse du Québec, comme «des attaques
directes à l’information libre» et des «cas de censure», l’interdiction par la
direction de Radio-Québec de publier les textes résultant de discussions de
quatre équipes de production et qui devaient constituer la matière du numéro 10
de la revue Télé-Clé. Cette plainte faisait aussi grief aux autorités de
Radio-Québec d’avoir refusé deux articles et exigé la modification d’un
troisième portant sur le thème de substitution choisi pour le même numéro.
Commentaires du mis en cause
La direction de
Radio-Québec soutenait qu’il avait été, au départ, décidé et convenu entre elle
et le rédacteur en chef de Télé-Clé que ce numéro 10 de la revue devait
comporter des articles visant à faire comprendre au téléspectateur comment
après une expérience de production de 18 mois, se réalise une émission
éducative, quels problèmes cela pose et comment on les résout. Or, de l’avis de
la direction, les articles rapportant le contenu des discussions en équipes débordaient
le sujet convenu puisqu’ils portaient sur des problèmes de régie interne.
En ce qui a
trait au refus des deux articles et à la modification d’un troisième se
rapportant au thème de remplacement, Radio-Québec affirmait qu’il ne s’agissait
que de l’exercice de sa responsabilité rédactionnelle parce que les articles
lui apparaissaient inacceptables à cause de leur manque de rigueur.
Réplique du plaignant
Le Syndicat
général des employés de Radio-Québec et le rédacteur en chef de Télé-Clé
alléguaient d’autre part que la substance des discussions en équipes et,
partant, la teneur des articles qui en rendaient compte, respectaient le thème
initial convenu et que loin de constituer l’étalage public des difficultés
internes de Radio-Québec, ces articles répondaient aux exigences du rôle
assigné à la revue Télé-Clé soit d’être un instrument d’enrichissement des
émissions de Radio-Québec en même temps que d’en être le prolongement. Dès
lors, le refus d’en permettre la publication, de même que le contrôle exercé sur
le contenu des articles du thème de substitution devenaient, selon la plainte,
une entrave à la liberté d’expression et d’information.
Analyse
Le Conseil est d’avis que l’intervention de la direction de Radio-Québec ne constitue pas un geste de «censure» au sens que donnent à cette expression les requérants ou, en d’autres termes, n’est pas la manifestation d’un abus d’autorité ayant pour conséquence l’interdiction délibérée de fournir au public une information à laquelle il a droit ou qui l’intéresse.
Le Conseil estime que ce geste n’a pas eu comme effet de brimer le droit du public à l’information mais que la décision rédactionnelle prise par la direction découlait de l’exercice normal de la responsabilité de l’éditeur en tant que communicateur public chargé de la gestion d’un organisme public d’information à caractère éducatif.
Ces conclusions se fondent sur les considérations suivantes:
Le contenu des trois premiers articles (les seuls à avoir été rédigés) rapportant la substance des discussions d’une équipe et la confirmation donnée par le rédacteur en chef de la revue à son supérieur hiérarchique immédiat à l’effet que les discussions des autres équipes étaient de même nature rendaient légitime l’intervention de la direction de Radio-Québec, puisque ces discussions ne portaient pas effectivement sur le thème initial choisi d’un commun accord mais surtout sur des problèmes internes de fonctionnement de Radio-Québec.
Pour ce qui est du thème de substitution, le rejet par les autorités de Radio-Québec de deux articles et la modification exigée à un troisième étaient justifiés à cause de leur piètre qualité et de leur manque de rigueur.
Par ailleurs, les témoignages entendus ont mis en lumière que ce litige s’est situé dans le prolongement d’un conflit de travail récent à Radio-Québec et qu’il a été aussi, dans une bonne mesure, le fruit d’imprécisions et d’ambiguïtés dans les relations entre les parties, notamment en ce qui a trait à la définition du rôle et de la fonction du rédacteur en chef.
Aussi, le Conseil est d’avis qu’afin d’éviter la répétition de litiges de ce genre, il est souhaitable que, compte tenu des droits et devoirs de la rédaction, les décisions rédactionnelles appartiennent à l’autorité de la rédaction plutôt que de relever de l’éditeur, ceci, bien entendu, dans le respect des objectifs convenus.
Analyse de la décision
- C06G Ingérence de la direction du média