Plaignant
La Fédération
des Infirmières et Infirmiers du Québec [FIIQ]
Représentant du plaignant
M. Jacques Larivière
(avocat, Larivière 1/4 Brault)
Mis en cause
La Presse
[Montréal] et M. Roger Lemelin (éditeur)
Résumé de la plainte
Le titre et le contenu
de l’éditorial «Les hôpitaux : Un climat criminel», paru dans l’édition du 21
juillet 1976 de La Presse sous la signature de son éditeur, M. Roger Lemelin,
présentent un caractère injuste, méprisant et biaisé. En plus de manquer de
rigueur, ce texte est dépourvu des informations nécessaires à une bonne
compréhension du sujet abordé. La publication de la réplique de la plaignante,
le 28 juillet, ne suffit pas à rétablir les faits.
Griefs du plaignant
La plainte
concerne un article paru, sous la signature de M. Roger Lemelin, éditeur, dans
les pages du journal La Presse du 21 juillet 1976; article intitulé: «Les
hôpitaux: un climat criminel».
La Fédération
des Infirmières et Infirmiers du Québec dénonçait, comme une atteinte au droit
du public à l’information, le caractère injuste, méprisant et biaisé tant du
titre que du contenu de cet article, selon elle dépourvu de toute rigueur
intellectuelle, de même que de quelque élément d’information propre à permettre
au public de se faire une idée juste du débat en question.
La Fédération
invoquait aussi qu’en égard à l’importance donnée par le journal La Presse à
cet article (publié à la Une, sur quatre colonnes, en première page d’un cahier
spécial), la publication de la réplique de sa présidente (en page cinq du
premier cahier de l’édition du 28 juillet) n’était pas, malgré le caractère
qu’on lui a donné, suffisante à apporter un correctif adéquat aux propos du
premier article.
Commentaires du mis en cause
C’est en
l’absence, toutefois, du témoignage de l’éditeur de La Presse, qu’il avait
également convié et qui a décliné son invitation, que le Conseil en arrive aux
conclusions suivantes.
Analyse
Le Conseil de Presse du Québec, en examinant l’objet des griefs, en est arrivé à la conclusion de rejeter cette plainte, basant son avis sur les motifs suivants:
ll ne relève pas d’une part, de la compétence du Conseil de se prononcer sur le contenu des commentaires éditoriaux publiés par les organes d’information, chacun étant libre de sa politique en cette matière.
A cet égard, les membres du Comité permanent des cas du Conseil ont été unanimes à voir dans le texte en question un éditorial plutôt qu’un article d’information.
Ils sont d’avis qu’étant donné la fonction de l’éditeur (ou de celui qui en tient lieu) au sein des organes d’information, il relève de la prérogative et du droit de se réserver l’espace qu’il juge à propos dans les pages de son journal pour exprimer sa position, exposer son opinion, prendre les parties qu’il juge à propos et formuler les jugements qu’il croit devoir porter sur une idée, une personne ou un groupe.
Le Conseil, à cet égard, ne pourrait intervenir sans s’exposer à porter atteinte à la liberté d’opinion de l’éditeur, encore qu’il considère de toute première importance pour celui-ci de mesurer, à l’intérieur d’une prise de position éditoriale, la portée des jugements qu’il formule aux exigences de rigueur, d’intégrité et de connaissance du sujet dont il traite. Ce devoir que lui impose sa responsabilité professionnelle constitue une condition essentielle de sa crédibilité et de celle d’une presse responsable envers le public.
Le Conseil considère, d’autre part, qu’en publiant dans la rubrique des «lettres des lecteurs» la réplique de la présidente de la Fédération, compte tenu du traitement qu’il a accordé à la publication de cette mise-au-point, et qu’il a fait également état dans ses pages d’information des réactions de la Fédération, que le journal La Presse a permis au public de prendre connaissance du point de vue de cette dernière. Le Conseil, d’autre part, réserve son jugement quant a savoir si la pratique usuelle dans la presse de publier dans la tribune des «lettres des lecteurs» les répliques à des commentaires éditoriaux, réussit à rétablir les équilibres qu’on croit rompus.
Analyse de la décision
- C01A Expression d’opinion
- C09B Droit de réponse insatisfaisant
- C20A Identification/confusion des genres
Date de l’appel
11 November 1977
Appelant
La Fédération
des Infirmières et Infirmiers du Québec [FIIQ]
Décision en appel
Contrairement à
la prétention de l’appelante, les membres du banc d’audition, à l’instar des membres
du Comité permanent des cas qui ont étudié la plainte en première instance,
demeurent unanimes à voir dans le texte en question un éditorial plutôt qu’un
article d’information.
Le Conseil
réitère qu’il ne relève pas de sa compétence de se prononcer sur le contenu des
commentaires éditoriaux publiés par les organes d’information, chacun étant
libre de sa politique en cette matière. Le Conseil est en effet d’avis qu’étant
donné la fonction de l’éditeur ou de celui qui en tient lieu au sein des organes
d’information, il relève de la prérogative de ce dernier et de son droit, de se
réserver l’espace qu’il juge à propos dans les pages de son journal pour
exprimer sa position, exposer son opinion, prendre les partis qu’il juge
pertinents et formuler les jugements qu’il croit devoir porter sur une idée,
une personne ou un groupe.
Le Conseil
répète qu’il ne pourrait intervenir à cet égard sans porter atteinte à la
liberté d’opinion de l’éditeur ou de ceux qui, par fonction, au sein d’un
organe d’information, sont chargés de transmettre au public les prises de
position de l’organe d’information ou des commentaires de nature éditoriale.
Le Conseil ne
saurait trop insister toutefois sur l’importance pour un éditeur ou ceux qui,
au sein des organes d’information, sont chargés de livrer à la population des
prises de position ou des commentaires de nature éditoriale, de mesurer leur
jugement aux exigences d’honnêteté, de rigueur, d’intégrité et de connaissance
du sujet dont ils traitent, qu’imposent, à tous les artisans de l’information,
le respect du droit du public à l’information et le sens de responsabilité
professionnelle d’une presse soucieuse de s’acquitter adéquatement, auprès du
public, de sa fonction d’informer.
Le Conseil ne
saurait non plus assez souligner l’importance pour un éditeur ou ceux qui, de
par la nature de leurs fonctions dans les organes d’information, ont la
responsabilité d’exprimer des points de vue ou des commentaires de nature
éditoriale, de bien identifier comme tels leurs textes et cela en vue d’éviter
toute confusion dans l’esprit du lecteur quant à la nature de tels articles.
Le Conseil est
d’avis que cette absence de précaution, dans le présent cas, a pu avoir comme
effet de semer la confusion dans l’esprit du public-lecteur qui, non averti des
coutumes journalistiques, a pu facilement se méprendre sur le caractère de
l’article en question, le confondant avec un article d’information et, partant,
être induit en erreur sur la nature de l’information qu’il croyait recevoir.
Le Conseil
considère en effet que, telle que présentée – à la Une, en première page du
cahier spécial de l’édition du 21 juillet 1976 du journal La Presse, lequel
comprenait, par ailleurs, l’éditorial coutumier à la page habituelle –
l’opinion de l’éditeur, en raison du titre qui la coiffait, et, en dépit du ton
et du fait qu’elle fut signée à la fin par «L’éditeur, Roger Lemelin» (comme le
sont les éditoriaux contrairement aux articles d’information où la signature de
l’auteur apparaît au début du texte) pouvait être assimilée à un article
d’information.
Le Conseil
considère enfin que, compte tenu du traitement qu’il a accordé dans la tribune
des «Lettres du lecteur» à la publication de la mise au point formulée par la
présidente de la Fédération des Infirmières et Infirmiers du Quebec, le journal
La Presse a satisfait aux exigences du droit de réplique. D’autre part, en
faisant également état, dans ses pages d’information, de l’objet du conflit en
question de même que des réactions de la Fédération, le journal a adéquatement
informé le public.
Analyse de la décision en appel
- C20A Identification/confusion des genres
Griefs pour l’appel
La Fédération
des Infirmières et Infirmiers du Québec logeait appel de la décision rendue par
le Conseil de Presse du Québec le 21 mars 1977 à la suite de la plainte qu’elle
portait
Le Conseil de
Presse du Québec, après examen des motifs quant au fond de l’appel logé par
l’appelante, a entendu son témoignage ainsi que les personnes qu’elle avait
exprimé le désir de faire entendre.