Plaignant
M. Jacques
Brûlé, M. Roger Carbonneau et M. Réal Mireault (membres, Office de la
construction du Québec)
Mis en cause
Le Devoir
[Montréal] et M. Louis-Gilles Francoeur (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Philippe
Gélinas (avocat)
Résumé de la plainte
La série
d’articles concernant l’administration de l’Office de la construction du
Québec, publiée sous la signature du journaliste Louis-Gilles Francoeur entre
juin 1976 et juin 1978, constitue une véritable campagne de dénigrement à
l’endroit des plaignants. Le ton tendancieux, les imprécisions, les omissions
et les accusations mal fondées du journaliste portent atteinte à la réputation
des plaignants. Le Devoir, en accordant une telle place aux articles en
question, ne traite pas ce dossier dans sa juste perspective.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a terminé l’étude de la plainte de messieurs Réal Mireault, Jacques
Brûlé et Roger Carbonneau, anciens membres de l’Office de la construction du
Québec, qui dénonçaient la série d’articles que vous consacriez à cet organisme
dans Le Devoir entre juin 1976 et juin 1978.
Estimant avoir
été l’objet d’une campagne systématique de dénigrement de votre part, les
plaignants vous reprochaient votre manque de rigueur et d’objectivité. Par
votre ton tendancieux et sensationaliste, certaines imprécisions et omissions,
vos accusations mal fondées et votre manque de prudence sur la légalité de
certains gestes posés par l’administration de l’OCQ, vous aviez sérieusement
porté atteinte à leur réputation et à leur crédibilité.
Messieurs
Mireault, Brûlé et Carbonneau dénonçaient enfin l’importance exagérée qu’avait
accordé Le Devoir à vos écrits, ce qui avait donné à cette affaire un caractère
de scandale qu’elle n’avait pas.
Commentaires du mis en cause
Votre
représentant dans ce dossier, maître Philippe Gélinas, soutenait pour sa part
que les plaignants n’avaient pas réussi à prouver quelque «mensonge ou témérité
irresponsable» de votre part non plus que quelqu’erreur «un peu substantielle»
dans votre façon de rapporter les faits. Au contraire, il affirmait que vous
aviez bien étayé vos propos. Loin de les démentir, les plaignants, ou encore le
Vérificateur général, les avaient même confirmés. Par exemple, les plaignants
n’avaient aucunement nié l’existence des conflits d’intérêts dont vous aviez parlé,
ces derniers ayant même fait l’objet d’une réglementation de l’Office, après la
parution de vos articles. De même en fut-il des irrégularités que vous aviez
dévoilées concernant la gestion des finances, du matériel et du système
informatique de l’Office, les conclusions du Vérificateur général et les
mesures prises par l’Office par la suite vous donnant raison.
Maître Gélinas
attirait aussi l’attention du Conseil sur le fait que Le Devoir avait publié
les communiqués de l’Office de la construction chaque fois qu’il en avait
reçus.
Enfin, selon
lui, Le Devoir n’avait accordé qu’une juste place à l’affaire qui, parce
qu’elle mettait en cause l’administration d’un organisme public, était du plus
haut intérêt pour la population.
Analyse
Le Conseil considère que les articles que vous avez consacrés à l’Office de la construction du Québec témoignent d’une démarche journalistique conforme au rôle d’une presse vigilante et soucieuse d’informer ses lecteurs sur les questions d’intérêt public. Le Conseil estime aussi que Le Devoir leur a accordé une juste place.
Le Conseil ne croit pas que cette série d’articles visait à dénigrer l’Office ou ses dirigeants. Cependant, certains d’entre eux manquaient de rigueur et de précision.
Bien que n’étant pas en mesure de juger au bien-fondé des prétentions de chacune des parties sur plusieurs points où se confondent des versions contradictoires, le Conseil relève effectivement certaines imprécisions et omissions sur lesquelles les plaignants ont attiré son attention et que vous n’avez pas infirmées. Par exemple, dans votre article du 6 juin 1978, vous souteniez que le président de l’OCQ avait bénéficié de deux régimes de sécurité sociale, alors qu’il n’était protégé, à cause d’erreurs administratives, par aucune assurance. Un autre exemple: vous déclariez illégaux, dans votre article du 31 mai 1978, certains paiements faits aux cadres de l’OCQ alors qu’aucun tribunal ne s’était encore prononcé sur la légalité d’un tel geste. Selon le Conseil, de tels écarts risquaient effectivement d’entacher indûment la réputation de l’OCQ et de ses administrateurs et de jeter un doute sur la véracité de l’ensemble des faits rapportés.
Le Conseil doit enfin reprocher au Devoir le titre dont il a coiffé votre article du 31 mai: «Les véhicules des cadres: l’OCQ paye illégalement l’essence», lui appliquant la même observation qu’il vous fait plus haut.
Le titre, «10 cadres de l’OCQ sont membres du 144» de votre article du 1er juin 1978 lui apparaît aussi inadéquat parce qu’il déforme la réalité exposée dans votre texte; dans celui-ci, vous précisez bien que dix fonctionnaires de l’Office, dont seulement deux responsables de la direction générale (soit les cadres) étaient membres du local 144.
Cette plainte fut adressée au Conseil le 16 novembre 1978. Ce dernier a dû cependant, conformément à ses règlements, en suspendre l’étude vu que l’Office de la construction faisait à ce moment-là l’objet d’une enquête par le Vérificateur général du Québec et ce n’est qu’au cours de l’été 1983 que le Conseil a pu, quant à lui, compléter son dossier.
Analyse de la décision
- C02A Choix et importance de la couverture
- C11F Titre/présentation de l’information
- C12B Information incomplète
- C17C Injure
- C24C Règles de procédure
Décision en appel
Les plaignants
ont demandé une révision de la décision rendue le 25 novembre 1983. Après avoir
évalué leurs motifs, les membres du Conseil ont décidé de maintenir en tout
point ladite décision, les délais prescrits étant, d’une part, depuis longtemps
épuisés et leur demande, d’autre part, ne présentant aucun élément nouveau ou
aspect les incitant à modifier la décision de première instance.