Plaignant
M. Jean
Chouinard (candidat, élections municipales de Sherbrooke)
Mis en cause
La Tribune
[Sherbrooke] et M. Alain Guilbert (rédacteur en chef)
Résumé de la plainte
L’éditorial «Les
élections à Sherbrooke», publié par La Tribune le 6 novembre 1978 sous la
signature du rédacteur en chef Alain Guilbert, confirme malgré des démentis les
rumeurs identifiant le plaignant comme représentant du Parti québécois sur la
scène municipale. Le 9 novembre, en publiant la mise au point d’un membre de
l’organisation du plaignant, le journal gomme les noms des personnes concernées
par cet éditorial.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
Presse a complété l’examen de la plainte dont le saisissait M. Jean Chouinard à
la suite de la publication d’un éditorial portant votre signature le 6 novembre
dernier et intitulé «Les élections à Sherbrooke». Le plaignant s’en prenait au
passage suivant:
«A noter que les
trois candidats identifiés officieusement au Parti québécois et militants
reconnus de cette formation provinciale, […] Jean Chouinard et […], ont
tous trois subi la défaite.»
Monsieur
Chouinard vous reprochait d’avoir confirmé, par votre éditorial, les rumeurs
sans fondement à l’effet qu’il était un militant reconnu du Parti québécois et
qu’il était, à titre de candidat aux élections municipales de Sherbrooke,
identifié à cette formation politique. Pourtant, ces rumeurs savamment
entretenues par ses adversaires auraient maintes fois été démenties au cours de
la campagne électorale alors qu’il dut constamment faire des mises au point à
ce sujet.
Or, selon M.
Chouinard, cet éditorial arrivant au lendemain des élections a définitivement
et faussement fait de lui un militant péquiste et surtout un politicien véreux,
disposé à nier une situation de fait pour gagner des votes. Le plaignant
considérait que cette mention erroné a causé un grave préjudice à sa
réputation.
D’autre part, le
plaignant s’en prenait à la mauvaise foi avec laquelle votre journal a traité
une lettre qu’un membre de son organisation vous adressait en guise de mise au
point. Cette lettre était publiée sous la rubrique «Opinion des lecteurs» dans
l’édition du 9 novembre de votre journal qui omettait, cependant, de reproduire
les noms des trois personnes que vous disiez officieusement identifiées au
Parti québécois tandis que l’auteur de la lettre citait, in extenso, ce
paragraphe de votre éditorial.
Commentaires du mis en cause
Pour votre part,
vous répliquiez que M. Chouinard, sans que vous sachiez si c’est à tort ou à
raison, a été officieusement identifié au Parti québécois. C’est d’ailleurs
dans cette perspective que vous auriez utilisé le mot «officieusement».
Analyse
Le Conseil considère que la latitude dont jouissent les organes d’information pour exprimer leurs prises de position éditoriales exige cependant de ceux qui sont chargés de livrer de tels commentaires une grande rigueur professionnelle et une connaissance certaine du sujet dont ils traitent.
Or, le Conseil ne retrouve pas ces qualités dans l’éditorial du rédacteur en chef de La Tribune lorsqu’il écrit que le plaignant était un candidat identifié officieusement au Parti québécois et qu’il était un militant reconnu de cette formation provinciale. Il appert que ces mentions ont été rédigées alors même que l’éditorialiste ignorait l’option politique de la personne impliquée, en ne s’appuyant uniquement que sur une erreur publique. Le Conseil considère qu’il est hautement répréhensible qu’une personne ayant le mandat de livrer aux lecteurs un commentaire éditorial le fasse avec un tel manque de rigueur professionnelle.
Le Conseil est d’avis qu’un éditorialiste, comme tout artisan de l’information, doit accorder une grande précaution à l’exactitude des faits à l’appui de ses commentaires. Sa fonction ne lui permet pas d’induire le public en erreur et d’avoir une attitude irresponsable envers l’intégrité des personnes.
Enfin, le Conseil juge regrettable que La Tribune ait pris la liberté de retirer un élément aussi important du texte de l’éditorial en question au moment de la publication de la lettre de mise au point. Là aussi le Conseil donne entièrement raison au plaignant: cet escamotage diminuait en même temps la portée de celle-ci.
Analyse de la décision
- C09C Modification du texte
- C15A Manque de rigueur