Plaignant
CIVG-TV
[Radio-Québec, Sept-Iles]
Représentant du plaignant
M. Christian
Gagnon (président, Comité régional de Radio-Québec sur la Côte-Nord)
Mis en cause
L’Elan
Sept-Ilien [Sept-Iles]
Représentant du mis en cause
M. Jean-Marc Gagnon
(directeur, L’Elan Sept-Ilien [Sept-Iles])
Résumé de la plainte
Le 31 mai 1979,
L’Elan Sept-Ilien publie une annonce de Radio-Québec qu’il a repiquée dans les pages
du Nordic, son concurrent, et réclame les frais de parution à Radio-Québec.
Devant le refus de Radio-Québec de verser la somme réclamée, l’Elan s’interdit
de publier les communiqués de presse provenant de cet organisme.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
Presse a terminé l’étude de la plainte que portait devant lui, le 5 février
1980, Monsieur Christian Gagnon, président du Comité régional de Radio-Québec
sur la Côte-Nord, qui dénonçait la politique d’information et de publicité de
L’Elan Sept-Ilien.
Monsieur Gagnon
s’en prenait à la façon de faire «pour le moins discutable» de votre journal
qui, dans son édition du 31 mai 1979, a repiqué une annonce publicitaire de
Radio-Québec publiée la veille dans les pages de votre concurrent, Le Nordic,
et comble d’outrecuidance d’en avoir réclamé, par la suite, les frais de 67,50$
à Radio-Québec.
Le plaignant
s’indignait du «chantage» ainsi exercé par votre journal sur Radio-Québec
contre lequel, de votre propre aveu, vous auriez agi ainsi parce que ce dernier
ignorait votre journal dans la distribution de sa publicité.
En effet, devant
le refus du président du Comité régional de Radio-Québec sur la Côte-Nord de
vous payer le montant réclamé, vous l’auriez averti de s’abstenir, à l’avenir,
de vous faire tenir toute documentation concernant Radio-Québec qui, de toute
façon, «prendra désormais la direction de la poubelle» puisque, indiquiez-vous,
si votre journal n’était pas assez bon pour s’attirer les commandes
publicitaires de cette société, il n’avait pas à l’être davantage pour diffuser
ses communiqués. En subordonnant ainsi l’information à la publicité, le
plaignant estimait que votre journal commettait une faute d’éthique grave.
Commentaires du mis en cause
Vous estimiez
pour votre part qu’il aurait été normal que ce soit Le Nordic qui portât
plainte contre vous plutôt que Radio-Québec qui, selon vous, n’a subi aucun
dommage de l’incident, mais a même pu, en refusant la note, bénéficier d’une
annonce gratuite. Vous affirmiez en outre que cette «tactique d’utiliser des
annonces des autres journaux», que vous aviez employée en l’occurrence, s’était
avérée pour vous la meilleure façon de savoir qui, dans les grandes
administrations, décide d’accorder les contrats de publicité et sur quoi ces
derniers se basent pour ce faire.
Vous affirmiez
d’autre part au Conseil que votre journal n’est pas «une oeuvre de charité» et
qu’en vue d’en assurer la survie, vous vous deviez d’agir comme vous l’avez
fait, contrairement à ce qu’ont fait les journaux qui vous ont précédé et qui
sont disparus. Aussi, votre «politique en vigueur depuis longtemps d’aider ceux
qui vous aident» avait-elle fait ses preuves.
Enfin, vous
faisiez part au Conseil qu’à plusieurs reprises votre journal avait dénoncé
dans ses pages plusieurs organismes publics, dont Radio-Québec, comme étant
«des organismes inutiles qui n’étaient bons qu’à dilapider les fonds publics».
Or, si votre journal se refusait toujours à publier les communiqués émis par
Radio-Québec, c’était parce qu’il se refusait encore aujourd’hui à «ce genre de
complicité» qui consiste à «justifier la fonction et les gestes de bien des
fonctionnaires».
Analyse
Le Conseil se doit de condamner sévèrement le procédé utilisé par votre journal dans le cas présent. Il est invraisemblable que vous ayez même pu songer à recourir à une pratique qui frise la malhonnêteté et qui trahit une inconscience des exigences élémentaires de l’éthique journalistique.
Il est aussi répréhensible, selon le Conseil, d’avoir subordonné l’information à la publicité. Les mesures de représailles que vous avez annoncées à l’endroit de Radio-Québec vont à l’encontre du devoir et de la responsabilité première des organes d’information de renseigner la population sur tous les sujets d’intérêt public.
Bien que les revenus publicitaires soient essentiels pour assurer l’équilibre financier d’un journal, voire dans certains cas sa survie, cette considération ne devrait pas être la seule à affecter le contenu rédactionnel d’un journal. En ne retenant que le seul facteur publicitaire selon une «politique en vigueur depuis longtemps», vous n’avez pas su respecter l’autonomie dont doivent jouir les services d’information dans une entreprise de presse.
Le Conseil n’entend ni substituer son propre jugement au vôtre ni déterminer à votre place le contenu rédactionnel de votre journal. Libre à vous de communiquer ou non les avis de Radio-Québec. Il importe cependant que vos critères de décision tiennent compte de l’intérêt du public et ne soient pas dictés uniquement par le profit escompté d’un achat de publicité.
Analyse de la décision
- C21E Subordonner l’information à des intérêts commerciaux