Plaignant
M. Marcel
Auclair, M. Yves Beaucage et Mme Denise Leduc (journalistes)
Mis en cause
La Presse
[Montréal] et Mme Ingrid Saumart (journaliste)
Résumé de la plainte
Une série de
quatre articles portant sur les hebdomadaires régionaux, que la journaliste
Ingrid Saumart signe dans les éditions des 5, 7, 8 et 9 janvier 1980 de La
Presse, ne reflète pas la véritable situation de ces journaux. La journaliste
traite ce sujet de manière superficielle et incomplète en ne faisant voir qu’un
côté de la médaille, celui des journaux syndiqués.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a bien reçu votre lettre du 30 janvier dernier dans laquelle vous portiez
plainte contre madame Ingrid Saumart, journaliste, et le journal La Presse,
concernant une série de quatre articles consacrés aux hebdos régionaux dans les
éditions du 5, 7, 8 et 9 janvier 1980 de ce quotidien. Ces articles ne
reflétaient pas selon vous, la véritable situation dans laquelle se trouvent
les hebdos régionaux.
Vous estimiez
que dans la confection de ses reportages, madame Saumart n’avait pas observé
«toutes les règles de l’éthique professionnelle qui doivent guider les
personnes qui sont appelés à travailler dans le secteur de l’information».
Vous exprimiez
l’avis que la journaliste, en traitant «superficiellement» le sujet en
question, avait mal informé les lecteurs de La Presse sur l’ensemble de la
situation qui prévaut dans ce secteur de l’information, «ne faisant part au
public que d’un côté de la médaille… celui des journaux syndiqués». Aussi,
madame Saumart aurait-elle dû, selon vous, aborder dans ses reportages les
questions relatives aux conditions de travail de «la presse hebdomadaire non
syndiquée», à la concentration de la presse régionale, à la formation des
journalistes, à l’éthique des journalistes, etc. Autant de sujets à traiter qui
auraient contribué, selon vous, à rendre «plus complète» et «moins banale»
cette série d’articles.
Analyse
Le Conseil considère que l’attention que décide de porter un journaliste ou un organe d’information à un sujet particulier relève de son jugement rédactionnel. Le choix de ce sujet de même que l’importance qu’il décide de lui accorder lui appartiennent en propre. Le Conseil ne saurait intervenir dans de telles décisions sans risquer de devenir un organisme de direction et d’orientation de l’information, sauf pour revoir, si besoin est, les critères qui président à ces choix et qui ne seraient pas conformes au rôle des professionnels et des organes d’information de renseigner adéquatement la population sur les questions d’intérêt public.
Or, dans le présent cas, le Conseil ne peut attribuer les manquements que vous reprochez aux articles de madame Saumart à un manque de rigueur professionnelle de sa part, non plus qu’il ne peut blâmer cette dernière, autrement que par procès d’intention, d’avoir délibérément trompé le public soit en rapportant de la fausse information ou en lui cachant des informations qu’il était en droit de connaître, en ne faisant pas mention de toutes les préoccupations dont fait état votre lettre.
Le Conseil considère en effet que si l’on peut, à bon droit comme vous le faites, soutenir que les articles de madame Saumart auraient largement gagné à faire état de vos préoccupations et que partant, le public aurait été mieux informé de l’état réel de la presse hebdomadaire, ce qui lui apparaît aussi largement matière à opinion, l’on ne peut pour autant accabler un journaliste ou un organe d’information en l’accusant des fautes professionnelles ou de manquements aux impératifs du droit du public à l’information pour n’avoir pas traité d’une façon exhaustive de tous les aspects d’une question dont ils ont choisi d’informer le public. La discrétion rédactionnelle du professionnel de l’information autant que les contraintes inhérentes à l’exercice du métier l’interdisent.
Ceci étant dit, le Conseil estime toutefois que les griefs que contient votre lettre devraient plutôt faire l’objet d’une lettre du lecteur que La Presse, en l’occurrence, pourrait publier ne serait-ce que pour faire état de votre point de vue qui diffère de celui des articles de madame Saumart. Ceci pourrait constituer un exemple de la vigilance à laquelle se doit le public en ce qui concerne l’information qu’il reçoit de même qu’un rappel aux professionnels et aux organes d’information des exigences d’une information adéquate sur des questions d’intérêt public.
Analyse de la décision
- C03A Angle de traitement
- C08A Choix des textes