Plaignant
Le Conseil du
patronat du Québec
Représentant du plaignant
M. Ghislain
Dufour (vice-président exécutif, Conseil du patronat du Québec)
Mis en cause
Le Devoir
[Montréal]
Représentant du mis en cause
M. Michel Roy
(rédacteur en chef, Le Devoir [Montréal])
Résumé de la plainte
L’article «Selon
le Conseil du patronat : un Québec séparé ne pourrait s’approvisionner en
énergie», publié dans l’édition du 18 mars 1980 du Devoir, traite de manière
inacceptable les trois communiqués de presse diffusés la veille par cet
organisme. Le titre et le préambule de cet article déforment le sens des
communiqués en laissant croire que le Conseil du patronat joue les «marchands
de malheur». La publication de la mise au point du plaignant dans la rubrique
des lecteurs, sans excuse du journal, ne répare pas le tort causé.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse du Québec a terminé l’étude de la plainte que portait le Conseil du
patronat du Québec contre Le Devoir pour l’article paru dans l’édition du 18
mars dernier intitulé: «Selon le Conseil du patronat: un Québec séparé ne
pourrait s’approvisionner en énergie».
Le Conseil du
patronat du Québec jugeait comme «absolument inacceptable» le traitement
accordé dans cet article aux trois communiqués de presse qu’il diffusait la
veille comme résumé d’un document publié le même jour sur le thème «La question
énergétique», lequel se voulait une analyse du Livre blanc sur la
souveraineté-association.
Selon le Conseil
du patronat, le titre et le préambule de cet article, en déformant le sens des
communiqués en question, ont mal informé le public en laissant à ce dernier
l’impression que le Conseil du patronat jouait les «marchands de malheur» dans
cette province.
Même si Le
Devoir reproduisait, le 22 mars suivant, la mise au point du Conseil du
patronat, celui-ci estimait que cette publication dans la rubrique des lettres
des lecteurs, et sans excuse, ne réparait aucunement le tort causé par
l’article en question.
Commentaires du mis en cause
Au cours d’une
entrevue que vous accordiez au Conseil de presse, le jeudi 8 mai, vous
reconnaissiez que l’article en question était erroné puisque ni le titre ni le
préambule ne correspondaient effectivement à l’esprit ou à la lettre des
communiqués et du document du Conseil du patronat. Cette erreur, comme il s’en
produit quelques fois, ne pouvait cependant aucunement être attribuée à la
mauvaise foi de ses auteurs, mais s’expliquait plutôt par la précipitation et
la fébrilité d’une salle de rédaction au moment de la confection d’un
quotidien.
D’autre part, en
accordant à la mise au point du Conseil du patronat la première place de la
rubrique consacrée aux lettres des lecteurs dans sa page éditoriale du 22 mars,
Le Devoir a cru réparer d’une façon satisfaisante le tort qu’a pu causer
l’article en question sans que besoin ne fut d’y ajouter une note de la
rédaction plaidant circonstances atténuantes.
Enfin, malgré
l’erreur en question, Le Devoir n’estimait pas avoir compromis à ce point le
droit du public à l’information non plus que d’avoir terni à jamais les prises
de position du Conseil du patronat compte tenu que la question des
approvisionnements énergétiques du Québec a été traitée à maintes reprises et
sous ses multiples angles dans les pages du quotidien.
Analyse
Le Conseil est d’avis que par l’interprétation qu’ils en ont faite, le responsable du titre de l’article en question ainsi que le journaliste ont faussé, à cause de leur manque de nuance, l’esprit des communiqués émis par le Conseil du patronat sur l’évaluation de la situation énergétique du Québec dans un régime de souveraineté-association.
Le Conseil estime en effet que le titre ainsi que les conclusions tirées par le journaliste dans le préambule de son article, ont déformé le véritable message du Conseil du patronat et induit le public en erreur sur la portée de son étude.
Une plus grande rigueur de la part du journal Le Devoir aurait eu comme effet de rendre davantage justice au Conseil du patronat et d’ainsi répondre aux exigences d’une information adéquate.
Ceci étant dit et bien qu’il ne saurait aucunement imputer l’erreur commise dans le présent cas à de la mauvaise foi, le Conseil est d’avis que si la précipitation et les contraintes de temps auxquelles font face les professionnels de l’information peuvent expliquer certains manquements, elles ne sauraient cependant servir d’excuse à l’information inadéquate du public.
Le Conseil a apprécié la diligence avec laquelle Le Devoir a fait état de la mise au point du Conseil du patronat.
Le Conseil a toujours exprimé des réserves à savoir si la publication des lettres des lecteurs dans la tribune réservée à cette fin par les médias constituait le meilleur moyen de réparer les torts causés par un article, vu qu’elles n’en ont pas le même impact.
Il a de même toujours exprimé des réticences à imposer aux médias quelque forme de rectification idéale, estimant que les décisions à cet effet relèvent de leur discrétion rédactionnelle, compte tenu que leur plus grand souci doit être celui de trouver les meilleurs moyens de corriger les erreurs commises et de faire justice, en leur donnant aussi grande force que possible, aux points de vue de leurs lecteurs.
Le Conseil est d’avis que dans le présent cas, Le Devoir a fait montre de ces préoccupations et a satisfait aux exigences du droit du public à l’information.
D’une part, en accordant la première place à la lettre du Conseil du patronat dans sa tribune des lettres des lecteurs du 22 mars 1980, la coiffant encore du titre «Mise au point!», Le Devoir reconnaissait son erreur sans qu’il ne fut besoin, de l’avis du Conseil, d’y ajouter une note plus explicite d’excuse.
D’autre part, compte tenu que la tribune des lettres des lecteurs est publiée dans la page éditoriale de ce quotidien, ce qui en accroît l’audience, le Conseil est d’avis que les lecteurs du Devoir ont pu en grande partie prendre connaissance du point de vue du Conseil du patronat.
Analyse de la décision
- C09A Refus d’un droit de réponse
- C11C Déformation des faits