Plaignant
La Fédération
des syndicats du secteur aluminium Inc.
Représentant du plaignant
M. Réjean
Beaudoin (avocat, Dion, Girard 1/4 Beaudoin)
Mis en cause
Le Quotidien
[Chicoutimi] et Mme Andrée Brassard (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Denis
Tremblay (directeur de la rédaction, Le Quotidien [Chicoutimi])
Résumé de la plainte
Dans son édition
du 4 février 1981, Le Quotidien publie le contenu d’une entente entre l’Alcan
et ses employés alors que celle-ci faisait l’objet d’un embargo. La journaliste
Andrée Brassard avait refusé les documents concernés, contrairement aux autres
journalistes de la région, en invoquant qu’elle pourrait obtenir ses
informations autrement.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a terminé l’étude de la plainte de la Fédération des syndicats du
secteur aluminium Inc. [FSSA] contre madame Andrée Brassard, journaliste, qu’il
accusait d’avoir dévoilé, à la une de l’édition du 4 février 1981 du Quotidien de
Chicoutimi, le contenu de l’entente intervenue lors de la réouverture du
contrat de travail entre l’Alcan et ses employés qui faisait l’objet d’un
embargo.
Le 3 février
dernier, madame Brassard avait, contrairement à tous les autres journalistes de
la région, refusé les documents sujets à l’embargo en question en invoquant
qu’elle pouvait obtenir ses informations par d’autres voies et les publier sans
se sentir liée par le délai de publication ainsi imposé.
Ce faisant,
madame Brassard avait causé un tort considérable à la crédibilité de la FSSA,
tout en servant mal l’intérêt public. De plus, son exemple pouvait inciter les
journalistes qui respectent ce genre de consigne à transgresser cette exigence
du métier dans l’avenir.
Commentaires du mis en cause
Madame Brassard
soutenait, pour sa part, que l’embargo décrété par votre syndicat était une
manoeuvre destinée à forcer les journalistes à taire les informations qu’ils
obtiennent en primeur, grâce à leurs propres sources. Il s’agissait donc là
d’une stratégie «vicieuse» de la part de votre syndicat puisque si elle avait
pris connaissance des documents en question, elle aurait été liée par l’embargo
qu’elle aurait été obligée de respecter. La journaliste ne pouvait en effet
accepter d’être à la remorque de votre syndicat pour diffuser les informations
qu’elle pouvait recueillir d’autre part. Elle trouvait inadmissible que par un
embargo on veuille bâillonner et empêcher un journaliste d’accomplir son
travail selon les règles élémentaires de la pratique journalistique.
Enfin, madame
Brassard, appuyée en cela par le directeur de la rédaction du Quotidien,
monsieur Denis Tremblay, affirmait avoir obtenu son information d’une autre
source et partant, Le Quotidien «n’avait pas à respecter cet embargo».
Analyse
Le Conseil ne peut conclure, dans ce cas, que madame Brassard ait transgressé l’embargo en question. D’une part, elle a refusé de consulter les documents frappés par cette mesure au moment même de leur distribution. D’autre part, rien ne permet au Conseil d’affirmer qu’elle les ait consultés à un autre moment. Enfin, rien ne permet non plus de nier que la journaliste détenait son information d’une source indépendante.
On ne peut empêcher la divulgation d’une information sujette à embargo lorsque les journalistes ou les organes d’information la possèdent déjà ou la tiennent d’autres sources. L’on ne saurait dès lors s’étonner que les organes d’information ou les journalistes les publient sinon en primeur, du moins le plus tôt possible. Dans ces cas, on ne peut certes invoquer la violation d’une règle d’éthique journalistique.
Analyse de la décision
- C23A Violation d’un embargo