Plaignant
M. Serge Mayer
(criminologue, Centre des services sociaux du Montréal métropolitain [CSSMM])
Mis en cause
La Presse
[Montréal]
Représentant du mis en cause
M. Jean Sisto
(éditeur adjoint, La Presse [Montréal])
Résumé de la plainte
L’article «Un
piéton et un cycliste sont heurtés à mort», publié dans l’édition du 2 juin
1982 de La Presse, donne des détails inutiles sur la victime d’un accident. En
effet, le journaliste précise que cette dernière était un transsexuel connu des
policiers pour se livrer à la prostitution.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a terminé l’étude de la plainte de monsieur Serge Mayer concernant
l’article paru sous le titre: «Un piéton et un cycliste sont heurtés à mort»,
dans l’édition du 2 juin 1982 de La Presse.
Monsieur Mayer
reprochait à votre quotidien d’avoir profité de l’article en question pour
donner des détails inutiles sur une des victimes. Il était inacceptable, en effet,
selon le plaignant, qu’un journal qui se respecte précise, dans le cadre de cet
article, que la personne en question était un transexuel connu des policiers de
la CUM pour se livrer à la prostitution dans le secteur Saint-Laurent et
Sainte-Catherine. Ces activités n’avaient rien à voir avec l’accident en
question.
Commentaires du mis en cause
Cette plainte
soulevait, selon vous, un vaste débat à savoir s’il convient «de publier des
détails de ce genre, parfaitement légalement, mais que certains trouvent
moralement ou socialement injustes?» Une chose était sûre, selon vous, «moins
il y a de restrictions, mieux la liberté d’information est servie». Il fallait
aussi prendre garde, selon vous, de censurer la divulgation de certaines
informations relatives au sexe, à l’origine ethnique, etc. Dans le présent cas,
bien que vous admettiez que les détails en question n’étaient pas d’une
importance absolue, leur mention s’expliquait, selon vous, «par le grave
problème de la prostitution dans ce quartier de Montréal, prostitution exercée
en bonne partie par des transexuels recourant souvent à la violence pour
dépouiller leurs clients». De ce fait, l’accident prenait, selon vous, «un
aspect plus spectaculaire».
Analyse
Le Conseil doit ici blâmer La Presse pour sa façon de faire dans ce cas. Les détails personnels concernant la victime n’expliquaient aucunement l’accident en question. Leur mention était donc inutile et discriminatoire, sans compter le préjudice qu’elle a pu causer à la réputation de la victime et à ses proches.
Le Conseil convient que la presse ne doit pas systématiquement s’interdire de faire état des caractères qui différencient ou distinguent les personnes telles la race, la religion, la couleur, l’origine ethnique, l’orientation sexuelle, etc. La mention de ces caractéristiques n’est pas nécessairement discriminatoire. Elle n’a pas nécessairement, en soi, comme effet de particulariser, à leur détriment ou à leur discrédit, les personnes ou les groupes, encore d’entretenir des préjugés à leur endroit. Toutefois, la divulgation par la presse de ces caractéristiques n’est justifiable que lorsque la cohérence du récit l’exige.
Analyse de la décision
- C18A Mention de l’appartenance