Plaignant
M. John Poliquin
Mis en cause
Dimanche-Matin
[Montréal]
Représentant du mis en cause
M. Claude
Laverge (chef de l’information, Dimanche-Matin [Montréal])
Résumé de la plainte
Le 4 juillet
1982, Dimanche-Matin publie à la «une» et en page trois une photo montrant le
cadavre d’un automobiliste gisant dans son sang. Cet hebdomadaire fait ainsi
preuve de sensationnalisme et démontre un manque de respect pour les proches de
la victime. Les policiers devraient peut-être interdire aux photographes de
presse de prendre de telles photographies.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a terminé l’étude de la plainte de monsieur John Poliquin qui reprochait
à votre journal sa publication, à la une et en page trois de l’édition du 4
juillet 1982, d’une photo montrant le cadavre d’un automobiliste gisant dans
son sang. Cette photo à la une était accompagnée du titre: «La « 13 »
fatale» et en page trois d’un texte identifiant la victime. Cette façon sensationnelle
de faire l’information démontrait, selon le plaignant, un manque élémentaire de
respect pour les proches de la victime.
Pour prévenir la
répétition de ce genre d’incidents et éviter qu’on accorde un traitement de faveur
à une certaine presse qui exploite les faits divers à la une», monsieur
Poliquin se demandait si, dans de telles circonstances, les policiers ne
devraient pas interdire aux photographes de presse de prendre de telles photos.
Si tel était le cas, les policiers auraient-ils à faire face à une accusation
d’entrave au métier de journaliste, s’enquérait-il?
Commentaires du mis en cause
Vous expliquiez
au Conseil, pour votre part, que l’intention de votre journal était d’inciter,
en ce début de la période estivale, le public à la prudence et à la sécurité
routière en montrant les conséquences des dangers de la route.
Vous étiez en
outre d’avis qu’une mort violente de ce type ne pouvait être considérée comme
faisant partie de la vie privée d’une famille, la loi prévoyant un processus
d’enquêtes publiques dans de tels cas dont, entre autres, celle du coroner.
Enfin, vous estimiez qu’il ne vous appartenait pas de juger du comportement que
devraient avoir les policiers avec la presse dans de telles circonstances.
Analyse
Le Conseil estime qu’en faisant sa manchette de la photo incriminée, Dimanche-Matin a surtout mis l’accent sur les aspects sensationnels que pouvait offrir le drame. Bien sûr, votre intention de sensibiliser vos lecteurs aux dangers de la route était louable. Cela s’est peut-être fait cependant au détriment d’une victime ou de ses proches.
Les décisions concernant le choix de la nouvelle et l’importance à lui accorder relèvent de l’autorité rédactionnelle des organes d’information. Il n’en demeure pas moins cependant que la presse qui privilégie le traitement des drames humains devrait manifester, à l’endroit des victimes et de leurs proches, de l’humanité et de la déférence plutôt que de mettre l’accent sur les aspects morbides, spectaculaires et sensationnels de ces drames sur lesquels elle attire l’attention du public.
Le Conseil est d’avis, par ailleurs, que la liberté de la presse et partant, le droit à l’information, seraient gravement compromis si la presse se voyait interdire par qui que ce soit le droit de prendre les photos qu’elle juge à propos ou si elle se voyait dicter le contenu de l’information qu’elle doit transmettre ou non au public. Des décisions de cet ordre relèvent de sa responsabilité et de l’obligation qui en découle d’informer le public d’une façon adéquate dans le plein respect des personnes.
Analyse de la décision
- C06A Accès à l’information
- C16F Images de violence physique