Plaignant
M. Lubin Faustin
Mis en cause
Le Devoir
[Montréal] et Mme Lise Bissonnette (rédactrice en chef)
Résumé de la plainte
Le quotidien Le
Devoir refuse de faire paraître la lettre ouverte du plaignant dénonçant le
comportement raciste d’un chauffeur de la compagnie Voyageur, qui lui a interdit
l’accès à un autobus. Les employés du journal se comportent de manière
discriminatoire, notamment en refusant de transmettre les appels du plaignant
et en menaçant ce dernier d’appeler la police. Ils avisent le plaignant qu’il
doit obtenir une autorisation spéciale de la Commission des droits de la
personne pour que sa lettre soit publiée, ce qui constitue une exigence
abusive.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a terminé l’étude de votre plainte contre Le Devoir à qui vous
reprochiez de ne pas avoir publié votre lettre ouverte du 1er mars 1983. Dans
celle-ci vous dénonciez les pratiques discriminatoires dont vous aviez été
victime de la part d’un chauffeur de la compagnie Voyageur qui vous aurait
interdit l’accès à l’un de ses autobus, le 21 octobre 1982, en vous disant que
les clients n’aimaient pas les Noirs. Vous vous en preniez également au
comportement d’une fonctionnaire de la Commission des droits de la personne du
Québec qui aurait démontré une attitude raciste à votre endroit dans la conduite
de son enquête sur l’incident en question.
Selon vous, Le
Devoir aurait manqué à sa responsabilité en ne publiant pas votre lettre qui
avait pour but, entre autres, de retracer un ou des témoins de l’incident en
question. Et le refus de la rédactrice en chef du journal, madame Lise
Bissonnette, de vous donner ses raisons était d’autant plus offusquant que,
tout au long de vos démarches, les responsables du journal auraient eu à votre
endroit des comportements discriminatoires tels refus de transmettre vos appels
téléphoniques, attentes indues au bout du fil, menace du rédacteur en chef
adjoint, monsieur Jean Francoeur, d’appeler la police.
Enfin, vous vous
étonniez que les secrétaires, la responsable des lettres des lecteurs et enfin
l’éditeur adjoint même vous aient informé que si vous vouliez que votre lettre
soit publiée, vous deviez obtenir une autorisation spéciale de la Commission
des droits de la personne. Cette exigence vous est apparue d’autant plus
saugrenue que des journaux comme Le Soleil de Québec, Le Droit et Le Citizen
d’Ottawa l’avaient publiée sans une telle autorisation.
Commentaires du mis en cause
La rédactrice en
chef du Devoir jugeant votre plainte d’une «futilité qui crève les yeux»,
refusait de répondre aux demandes d’explications du Conseil et mettait en doute
même «l’éthique de ceux qui ont publié cette lettre plutôt que la nôtre». C’est
donc sans la version de cette dernière que le Conseil rend la présente
décision:
Analyse
Comme il l’a maintes fois affirmé, le Conseil est d’avis que nul ne peut prétendre avoir accès de plein droit au courrier des lecteurs.
La décision de publier ou non une lettre relève de la prérogative de l’éditeur dont les jugements d’appréciation en la matière doivent demeurer conformes à la responsabilité d’un média soucieux de renseigner adéquatement ses lecteurs. Ceci ne le dispense toutefois pas d’être courtois envers ses usagers lorsque ceux-ci ont des griefs légitimes à lui faire valoir.
Analyse de la décision
- C08A Choix des textes
Date de l’appel
29 May 1984
Appelant
M. Lubin Faustin
Décision en appel
Le plaignant
s’en prend au caractère ambigu de la décision du Conseil qui aurait dû
condamner sans ambages la rédactrice en chef du Devoir ou encore lui dire
carrément qu’il a eu lui-même tort de se plaindre.
Le Conseil
rejette la demande de révision du plaignant et maintient la décision rendue par
le Comité des cas.