Plaignant
Mme Jeannine
Béloir
Mis en cause
CBF-AM [SRC,
Montréal]
Représentant du mis en cause
M. Pierre O’Neil
(directeur du service de l’information, Société Radio-Canada [Montréal])
Résumé de la plainte
CBF dévoile
l’identité et l’adresse d’un enfant maltraité à mort pendant que ses parents
voyagent à l’étranger. Ce faisant, la station ne respecte pas la vie privée des
personnes concernées, d’autant plus que les parents de la victime peuvent ainsi
apprendre la tragédie indirectement.
Griefs du plaignant
Le Conseil de
presse a terminé l’étude de la plainte dans laquelle vous reprochiez à la
Société Radio-Canada d’avoir révélé, dans les bulletins de nouvelles du 11
janvier 1984 de CBF-690, les nom, prénom et adresse d’un enfant martyrisé
présumément par son gardien à un moment où ses parents, en voyage à l’étranger,
étaient «susceptibles d’apprendre la nouvelle indirectement». Une telle
indiscrétion «dans des circonstances particulièrement dramatiques» constituait,
selon vous, une atteinte grave à la vie privée des personnes et vous souhaitiez
«que les «professionnels» de l’information fassent preuve d’un peu plus de
discernement dans la diffusion de certaines nouvelles».
Commentaires du mis en cause
S’opposant d’une
façon générale à l’interdit de publication de l’identité de victimes de crimes,
le directeur du service de l’information de Radio-Canada, monsieur Pierre
O’Neil, affirmait qu’il y avait lieu de se pencher sur chaque cas particulier.
«L’identité d’une victime, établie par son nom et souvent son adresse» est dans
bien des cas «une donnée pertinente qui contribue à la clarté et à la précision
de l’information»; en l’absence de telles précisions, en effet, certains se
demanderaient si la victime est un parent, un ami ou une connaissance,
remarquait-il.
Monsieur O’Neil
indiquait aussi au Conseil que dans ses premiers bulletins de nouvelles,
Radio-Canada n’avait pas identifié la victime qui le fut à compter des
bulletins de 9 et 11 heures, donc bien après que la tragédie fut connue dans la
région où elle avait eu lieu. Les informations diffusées provenaient d’ailleurs
de la Sûreté du Québec qui ne révélait pas aux médias l’identité des victimes
impliquées dans une tragédie avant que la famille n’ait été informée. Dans le
cas présent, les parents de la victime avaient été contactés et étaient rentrés
au pays le soir même. Ils étaient donc peu «susceptibles d’apprendre la
nouvelle indirectement» par Radio-Canada.
Analyse
La liberté de la presse et le droit à l’information seraient compromis si les médias devaient s’interdire d’informer la population sur les drames humains et les faits divers.
A cause de leur caractère pénible toutefois, tant pour les victimes que pour leurs proches, ces drames sont des sujets particulièrement délicats et les médias doivent prendre de grandes précautions et faire preuve d’un grand discernement en les rapportant, notamment en ce qui a trait à l’identification des victimes. Celle-ci devrait être strictement évitée lorsque les proches n’en n’ont pas été prévenus.
Dans le présent cas, le Conseil estime que la Société Radio-Canada a renseigné adéquatement le public sur la tragédie en question d’autant plus qu’elle n’a pas exploité l’événement de façon sensationnaliste.
Le Conseil estime aussi que la Société n’a pas à être blâmée pour avoir identifié la victime du drame en question et ceci dans la mesure où les parents de la victime ont effectivement été prévenus auparavant, selon ce que serait, aux dires du directeur de l’information de Radio-Canada, la pratique des autorités policières dans de tels cas.
Analyse de la décision
- C16B Divulgation de l’identité/photo