Plaignant
L’Association
touristique du pays de l’érable
Représentant du plaignant
Mme Cécile Dupont-Chamard
(présidente, Association touristique du pays de l’érable)
Mis en cause
Beauce Média
[Sainte-Marie-de-Beauce] et M. Michel Dufour (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Pierre Breton
(directeur de l’information, Beauce Média [Sainte-Marie-de-Beauce])
Résumé de la plainte
Le titre «Plan
de développement touristique régional : L’ATPE repasse dans des sentiers
battus» et l’article qu’il accompagne, publiés par Beauce Média le 25 février
1986, ne reflètent ni la réalité, ni la conférence de presse portant sur le
plan de développement de l’Association touristique du pays de l’érable. Le
journaliste Michel Dufour, qui signe cet article, utilise un style qui se
rapproche plus du commentaire que du reportage. Son texte reflète l’esprit
négatif caractérisant la couverture accordée par Beauce Média à l’organisme
concerné.
Griefs du plaignant
Le Conseil a
terminé l’étude de la plainte de l’Association touristique du pays de l’érable
[ATPE] contre monsieur Michel Dufour, journaliste, et l’hebdomadaire Beauce Média,
concernant un article publié le 25 février 1986 sous le titre «Plan de
développement touristique régional. L’ATPE repasse dans des sentiers battus».
Convenant tout
d’abord que les médias et les journalistes étaient seuls aptes à juger de la
manière dont «sera traitée l’information», la présidente de l’ATPE, madame
Cécile Dupont-Chamard invoquait que l’article qu’elle dénonçait, non plus que
son titre, ne reflétaient ni la situation ni la conférence de presse de l’ATPE,
surtout si on les comparait «à l’ensemble de la couverture de presse des autres
journaux invités».
Ainsi, il
n’était pas juste que le titre affirmât que son plan de développement, l’ATPE
repassait dans des sentiers battus, puisque ce type d’étude n’existait pas et
aucun autre plan de cette nature n’avait été réalisé pour le territoire couvert
par l’association et dans la perspective régionale qu’elle avait adoptée,
conformément à son mandat.
D’autre part, en
«présumant de nombreuses embûches pour l’ATPE», on peut même croire, à sa lecture,
selon madame Dupont-Chamard, «à une utilisation douteuse des deniers publics»
par l’ATPE dont la légitimité semblait remise en question.
Par ailleurs, la
plaignante considérait que le style utilisé se rapprochait plus du commentaire
que du reportage sans nécessairement que les faits ne soient situés dans leur
contexte. Par exemple, le journaliste affirmait que les municipalités
régionales du comté n’avaient «pas réagi encore officiellement» au plan de
développement, bien que, selon madame Dupont-Chamard, les MRC concernées
s’étaient impliquées dans la gestion et avaient été consultées de façon très
officielle, ce qui serait mal rendu. L’utilisation des termes «visite des
maires» dans l’article pour décrire la première étape de consultation rendait très
mal cette situation, puisque, aux dires de madame Dupont-Chamard, «nous ne
rencontrons pas uniquement les maires, mais les intervenants majeurs impliqués
dans l’industrie touristique».
La plaignante
reprochait aussi au journaliste d’avoir cité monsieur Bernard Tremblay,
consultant chargé de coordonner le plan de développement, «alors que celui-ci
ne faisait pas partie de la conférence de presse, mais était présent pour
donner de l’information complémentaire». A cet égard, la plaignante rappelait
que c’était elle qui agissait comme porte-parole de l’association touristique,
et non monsieur Tremblay.
Enfin, disant
croire «qu’il s’agit là d’une vision fortement dirigée de façon négative et
qui, de surcroît, porte à confusion», madame Dupont-Chamard considérait que
l’article respectait «l’esprit négatif» avec lequel Beauce Média traitait la
nouvelle concernant l’ATPE depuis quelques années. «En regroupant les idées
véhiculées dans l’article, voici l’idée générale que, selon elle, l’on peut en
tirer: «L’Etat paie 100 000 $ à un organisme n’ayant pas à intervenir en
développement, pour passer dans des sentiers battus, dont personne ne veut».
Commentaires du mis en cause
Le directeur de
l’information de Beauce Média, monsieur Pierre Breton, soulignait pour sa part
que le communiqué et les documents émis par l’ATPE au sujet du plan de
développement, et décrivant les principales parties de ce plan, faisaient état
de composantes que l’ATPE a déjà eu le temps d’aborder en tout ou en partie» en
ses quelque huit années d’existence, «d’où le titre coiffant l’article
incriminé».
Quant à
l’implication des municipalités régionales de comté, il soutenait que son
journal suivait assidûment les séances des MRC Nouvelle-Beauce et Robert-Cliche
et qu’il était «indubitable que les maires ont montré une certaine
circonspection» face au plan de l’ATPE. Il citait également à cet égard une
lettre dans laquelle le Sous-ministre du Tourisme faisait état des réticences
de certaines MRC de la région. Dès lors, selon lui, le journaliste de Beauce Média
«n’a donc pas «interprété» les faits, mais les a plutôt situés dans un contexte
plus large».
En ce qui a
trait aux comparaisons établies par la plaignante entre la couverture assurée
par Beauce Média et celle des autres journaux de la région, monsieur Breton
faisait remarquer que l’un de ces journaux n’avait aucun représentant à la
conférence de presse de l’ATPE et qu’un autre s’était limité à la reproduction
intégrale du communiqué de cet organisme.
Par ailleurs, il
expliquait que l’importance accordée dans l’article aux propos du consultant
Bernard Tremblay tenait au fait que celui-ci étant coordonnateur du plan de
développement, il était à ce titre «la personne la plus apte à livrer de
l’information».
En ce qui
concerne l’interprétation qui, selon la plaignante, se dégageait de l’article,
monsieur Breton disait douter fortement que le lecteur en soit arrivé à cette
conclusion. Selon lui, c’était peut-être au tour de la plaignante de se «livrer
à une interprétation exagérée».
Il affirmait
enfin être en «désaccord complet» avec le grief de la plaignante à l’effet que
cet article respectait l’esprit négatif avec lequel Beauce Média traitait la
nouvelle concernant l’ATPE depuis quelques années. Selon monsieur Breton en
effet, une relecture de l’ensemble de ces articles ne permettait nullement
d’étayer cette accusation. Aussi, jugeait-il qu’il n’y avait pas lieu pour le
journal d’apporter les correctifs demandés par la plaignante et précisant
cependant qu’il se ferait «un point d’honneur» de publier la lettre de madame
Dupont-Chamard dans la section «Tribune libre» du journal.
Analyse
L’attention que décide de porter un journaliste ou un organe d’information à un sujet particulier, de même que la façon de le traiter, leur appartiennent en propre. Les professionnels de l’information sont donc libres de leurs choix rédactionnels sous réserve évidemment de ne pas trahir le sens des événements rapportés. On ne saurait non plus exiger d’eux qu’ils se plient à quelque philosophie ou courant d’idées dans leur façon d’aborder les événements ou qu’ils véhiculent des messages qui épousent l’image ou le sens que veulent donner à leur action des personnes ou des groupes.
Dans le présent cas, le Conseil est d’avis que le journaliste s’est acquitté de sa tâche de façon adéquate en rapportant divers points de vue sans pour autant exprimer de jugements personnels.
Le Conseil considère d’autre part que le titre de l’article comportait effectivement un jugement de valeur, le journal n’ayant pas fait la distinction qui s’impose entre information et opinion.
Enfin, le Conseil estime que la publication de la lettre de la plaignante constituait un moyen adéquat pour faire connaître aux lecteurs son point de vue et il prend acte de l’offre en ce sens du directeur de l’information du journal.
Analyse de la décision
- C09A Refus d’un droit de réponse
- C11C Déformation des faits
- C20A Identification/confusion des genres