Plaignant
M. Gaston
Tessier
Mis en cause
CBFT-TV [SRC,
Montréal] et M. Simon Durivage (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Pierre O’Neil
(directeur général des programmes, CBFT-TV [Société Radio-Canada, Montréal])
Résumé de la plainte
Dans le cadre de
l’émission «Le Point» diffusée le 29 mai 1990, la Société Radio-Canada présente
un reportage qui traite de l’adoption de la loi C-43 sur l’avortement en
faisant entendre les commentaires d’un «médecin avorteur» et d’un «juriste
pro-avortement», sans faire entendre aussi l’opinion d’un porte-parole des
groupes Pro-Vie.
Griefs du plaignant
La plainte
concerne un reportage diffusé par Radio-Canada à l’émission Le Point, le 29 mai
1990, à la suite de l’adoption par la Chambre des Communes de la loi C-43 sur
l’avortement.
Le plaignant, M.
Gaston Tessier, reproche à Radio-Canada d’avoir «manqué d’objectivité et
d’équité» en faisant entendre au cours de ce reportage «les commentaires d’un médecin
avorteur» et «d’un juriste pro-avortement» sans faire entendre aussi l’opinion
«d’un porte-parole des groupes Pro-Vie».
Commentaires du mis en cause
En réponse à la
plainte, Radio-Canada rappelle d’abord, par l’entremise de M. Pierre O’Neil,
alors directeur général des programmes (Information télévision), la politique
de la Société en matière d’équilibre et de pluralisme d’information:
«Toute émission
traitant d’un sujet controversé doit exposer de façon impartiale, en même temps
qu’un des points de vue sur ce sujet, les autres opinions pertinentes…
L’équilibre sera atteint, selon le cas, soit dans une émission, soit au cours
d’une même série».
Il rappelle que,
ce soir-là, l’émission Le Point «abordait la question de l’adoption en Chambre
des Communes de la loi C-43» et portait «sur les difficultés d’application de
la loi» et non «sur le bien-fondé des points de vue « pro-vie » ou
« pro-choix »».
Il poursuit en
disant que Radio-Canada a cru que la loi «mettait en relief deux problèmes
importants»: celui des «médecins qui pratiquent des avortements et s’exposent
en première ligne à des accusations criminelles» et celui de «l’accès à des
services minimaux pour tous».
Il rappelle
enfin que dans les séries de Radio-Canada les «équilibres sont souvent faits
non pas au jour le jour mais sur des périodes moyennes ou courtes».
Réplique du plaignant
En réplique, le
plaignant, M. Tessier, cite la politique de Radio-Canada à laquelle avait fait
allusion M. O’Neil et affirme que «l’avortement est un sujet controversé» et
que le président des médecins du Québec pour la vie, le Dr Maurice Campbell, et
Me Emile Colas, du Front commun pour le respect de la vie, «auraient eux aussi
exprimé d’autres opinions pertinentes» et qu’ainsi «l’équilibre aurait été
atteint. Ce qui n’a pas été fait». Il considère donc que «Radio-Canada a manqué
à ses obligations d’objectivité et d’équité».
Analyse
Le Conseil reconnaît la nécessité d’une information complète, couvrant dans toute la mesure du possible les principales facettes d’une question. Il reconnaît aussi la nécessité d’une information équilibrée, présentant des opinions diverses, voire même divergentes, qui sont pertinentes à la question abordée, d’autant plus s’il s’agit d’une question suscitant la controverse.
Dans le cas sous étude ici, le Conseil constate que, dans la présentation de l’émission, Radio-Canada a bien annoncé que le sujet du reportage porterait de façon restreinte sur les difficultés d’application de la loi C-43 sur l’avortement et non sur l’avortement en général ou sur le bien-fondé ou non de cette loi. Ce choix du sujet relevait de la liberté éditoriale de Radio-Canada. Le Conseil ne peut retenir de griefs contre la Société pour avoir choisi de traiter ce sujet.
En ce qui concerne le traitement accordé à celui-ci, le Conseil estime que le reportage du Point présentait une information équilibrée. Des interviews portant sur les aspects positifs et plus négatifs de la question abordée l’application de la loi C-43 ont été présentés.
D’une part, la ministre de la Justice du Canada, Mme Kim Campbell, a expliqué de façon favorable divers aspects de cette législation et de son application. D’autre part, le Dr Guimond, qui a pratiqué des avortements dans le passé, a fait état des difficultés que l’application de cette loi peut soulever pour la profession médicale. Egalement, Me Caron, juriste, a traité de certains aspects juridiques de l’application de la loi et de son influence sur les services offerts.
Aussi, pour les considérations qui précèdent, le Conseil ne retient pas la plainte de M. Tessier selon laquelle Radio-Canada a «manqué d’objectivité et d’équité» en ne faisant pas entendre l’opinion «d’un porte-parole des groupes Pro-Vie».
Le Conseil constate cependant que, telle que formulée, l’annonce faite à la fin du Téléjournal par le présentateur (celui-ci dit «N’oubliez pas Le Point qui suit, qui consacre son émission au pour et au contre de la nouvelle loi sur l’avortement»), a pu créer temporairement des attentes différentes au sujet du reportage à venir à l’émission Le Point. Le Conseil note cependant avec satisfaction que la situation a été corrigée par la présentation qui a été faite du sujet au début du reportage.
Analyse de la décision
- C12A Manque d’équilibre